Le Capitaine écoute avec attention
« Votre Excellence !
« un peu plus de malades ... »
« les infâmes roknaris mis hors d'état de combattre par le truchement de leur met favori ... »
Par tous les 5 ! Tout ceci ne pouvait pas être intelligible par ce brave Commandant Domingo Goñy ! »
il plaisante
« Pour lui « une bataille se livre lame au clair, face à l'ennemi, et pas autrement ! », c'est tout à son honneur,
mais pas toujours le plus efficace. »

« Je ne vais pas envoyer de sous-fifre. Les meilleures confidences sont celles que l'on partage le moins.
Je me déguiserai en colporteur pour délivrer votre message. »
« Mais, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, que doit-il en faire exactement ?
et comment puis-je m'assurer qu'il s'agit bien de votre agent
et non de quelque subalterne à qui il aurait pu demander de le remplacer ? »

Rassuré par la réponse, Martou enchaîna :
« Cela relève des transactions politiques.
Mon enquêteur à retrouvé sa trace et aux dernières nouvelles, il serait encore vivant. J'ai donné des ordres pour qu'il soit libéré.
Je n'ai pas d'informations sur la réussite de cette opération.
Ceux qui ont œuvré à la prise de Gotorget ont bien manœuvré en dévoyant mon frère.
Ils ont obtenu une citadelle pivot pour la guerre et une victoire politique sur ma famille, affaiblissant d'autant mes capacités d'action. »
Puis revenant sur l'opération en cour :
« Est-il possible de contrôler les cols et routes pour couper Gotorget du monde ? »

« Hummm »
Le capitaine réfléchit longuement avant de répondre
« Sans vouloir doucher vos espérances, Votre excellence,
« surveiller » les routes et les cols est loin d'être aisé,
ce sera toujours moins difficile que de les « isoler »,
et même s'il était possible ce qui est tout à fait inenvisageable à moins de 50 000 hommes
de « bloquer tout passage par les routes et les cols » ...
Cela ne couperait pas pour autant « toute possibilité de communication de la forteresse » ...
Surtout depuis qu'ils ont regarni les pigeonniers
et installé leur grand miroir et leur système de messages lumineux... »
Il concède
« Et ce Capitaine dy Cazaril était devenu une légende pour ses hommes,
il avait, à maintes reprises, fait la démonstration
qu'il parvenait à ravitailler la forteresse,
même pendant qu'elle était assiégée de toutes parts et que les roknaris ne laissaient passer rien ni personne .... »

Il guette avec appréhension la réaction de Martou

« Merci pour votre franchise : il n'est pas possible de contrôler les cols et routes.
Reste à agir sur un périmètre plus restreint et plus rapidement. »
Il continua :
« J'ai des troupes à deux jours d'ici, rapidement mobilisables.
Personne ne sait pour l'heure que leur présence dans ce secteur à pour but de reprendre Gotorget.
Avez-vous quelqu'un dans la place qui pourrait se rendre utile pour nous renseigner sur l'ampleur de la réussite de l'empoisonnement et, ou permettre à une petite escouade de pénétrer dans la forteresse ? »

« Dans la place ?!? » il s'en étouffe « A l'intérieur de la forteresse de Gotorget !?! »
il dévisage son interlocuteur avec effroi
« Votre Excellence, aucun ibrane, ni chalionnais, ni brajarien ...
Aucun autre que les rares roknaris qui soient « de souche », et « connu », et « reconnu », n'a jamais été autorisé à franchir le seuil de la forteresse.
Les rares délégations diplomatiques qui s'y sont présentées ont été reçues « sous tente » sur le sentier.... »
Il réfléchit
« Pour pénétrer discrètement par quelque poterne dérobée -en espérant qu'elles n'aient pas été toutes condamnées-
il faudrait retrouver un ancien de ceux qui y résidaient lors du siège ...
Mais les rescapés ont été prestement rapatriés dans leurs familles ...
et je n'ai pas connaissance qu'il y en ait qui soient revenus ... »

Sans se laisser démonter pas ces nouvelles annonces, l'intendant continua ses investigations pour cerner au mieux la situation avant de prendre la moindre décision qui pu se révéler funeste.
« En ce qui concerne le temps. Pensez vous que l'on soit amené à avoir de la neige, de la brume ou du froid dans les jours à venir ? »

« Nous entrons dans la saison du Père, Votre Excellence ».
« Il faudrait un miracle pour que le ciel soit clair et permette de voir au loin ...
La forteresse sera au dessus de la brume de la vallée jusqu'au milieu de l'après-midi. »

Martou avait précipité son intervention dans le nord.
Ce qui n'était qu'un projet devenait terriblement concret.
Et finalement qui sait si l’hiver, saison traditionnellement des trêves ne s'avérerait pas être un heureux hasard...
« Je ne connais pas la région comme vous, mais j'espérais bien que le père isolerait de lui même la forteresse en choisissant cette date.
Il me faut deux coursiers pour se rendre auprès de mes généraux et mettre en route mes deux régiments que je tiens en réserve pour qu'ils soient en route le plus vite possible. »
L'intendant regarda un instant le vent pousser les nuages comme s'il cherchait à y lire quelques présages puis reprit :
« Il est impossible d'escalader des murailles lorsqu'elles sont gardés mais si tout va pour le mieux les remparts devraient être suffisamment dégarnis au matin du 24.
Il me faudrait une escouade de bons grimpeurs. Et au besoin je ferais diversion pour leur laisser plus de marge de manœuvre. »

Martou haussa un sourcil réprobateur lorsque le second fit remarquer un peu prestement qu'il y avait des forces disponibles.
De quel droit se permettait-il ? Et qu'est ce que cette attitude cachait ?
« Je n'ai jamais dis que je n'utiliserai pas au mieux les troupes présentes ici mais il faut marquer l'ennemi, qu'il sache en perdant Gotorget qu'il n'est plus maître de la région. »
Martou sonde son interlocuteur une nouvelle fois : Il avait besoin de lui mais il avait aussi trop à perdre pour miser sur le mauvais cheval.
Finalement, il ne le sentait pas ce Domingo... Soudain méfiant il enchaîna d'un ton froid :
« Qu'avez vous à voir dans la vente à l'ennemi de la citadelle ? »

Il y avait bien longtemps que Martou oscillait entre la méfiance légitime de l'homme politique habitué à côtoyer tous les coup bas et la paranoïa.
La trahison de Dondo lui montrait de façon encore plus prégnante que l'on ne pouvait se fier à personne et en même temps, il ne pouvait être partout à la fois.
L'intendant détestait ce cas de figure où il n'avait pas le temps de mettre en place ses pions pour protéger ses pièces maîtresses.
sāh māta, le roi est pris... pensa-t-il avec fatalisme. « Joue la partie jusqu'au bout » lui disait son mentor. « Soit tu gagnes, soit tu apprends » mais l'heure n'était pas à perdre.
Lorsque l'on a pas le choix, il n'y a pas à réfléchir mais gares à toi Domingo, si tu me trahis il n'y aura nul terres de repos pour toi !
Ce serment conclut avec lui même, Martou enchaîna comme si rien ne devait jamais le perturber :
« Bien je suivrai votre conseille et trouverai une équipe.
Envoyez un émissaire au col de la platrière, j'ai trop besoin d'un coordinateur sur place pour que vous perdiez votre temps à courir la montagne.
Fournissez moi un éclaireur qui connaisse bien la région ou plusieurs si vous en avez sous la main et faites en sorte que votre garnison sans montrer d'activités inhabituelles, se tienne prête à faire les manœuvres demandées par cet incompétent de Natzari dy Rinal. »
Martou ne réitéra pas sa demande d'aller mander ses généraux : Je dépêcherai deux hommes à moi.

« Si tout est clair pour vous, au travail et venez souper avec moi ce soir si vous voulez. »

C'est Dondo dy Jironal en personne qui a mené ces négotiations-là...
Et certains termes de cet accord ...

« Bien votre excellence. »
« Pour les éclaireurs...Je vous les présente ce soir ? ou dois-je vous les envoyer avant ? »
Dès qu'il a la réponse, le Capitaine salue et s'empresse de filer vers sa destination quelle qu'elle soit, en tout cas loin de ce campement.

« Ce soir sera suffisant. Ne leur dites rien sauf qu'ils seront absent quelques jours.
Merci pour votre collaboration, je n'oublie jamais de récompenser comme il se doit les serviteurs de Chalion et vous avez là, la chance d'obtenir particule et terres.
Ne ménagez pas vos efforts. »
Utiliser ses hommes comme espion serait vain et trouver des vauriens de confiance prendrait trop de temps. Il fallait se résoudre à faire confiance...

Domingo parti, Martou rédige quatre missives.
Deux pour chaque coursier qu'il envoie quérir sur l'heure, ses généraux.
Une première missive destinée à renseigner l'ennemie au cas où le messager soit intercepté.
Dans cette 1ère, il y a l'ordre d'intensifier les patrouilles pour montrer symboliquement que Chalion ne compte pas abandonner les terres du nord aux Roknaris.
Celui-ci est signé Natzari dy Rinal envoyer spécial de la couronne.
Dans la 2ème missive qui est cachée dans la scelle du cheval, Martou dévoile qu'une bataille décisive va avoir lieu et qu'il demande donc à ses généraux de mettre en branle un contingent mobile et autonome pour le rejoindre à Salobrena.
Il y signe de son nom, de son cachet et passe ses amitiés à leurs femmes respective qu'il nome avec soin.

Son soucis suivant est de recruter une équipe d'intervention :
Il s'applique à faire faire l'inventaire des ressources qu'il peut trouver au sein de sa propre troupe.
Il prends ensuite lui même le chemin du relais le plus proche suivant les mêmes modalités que sa visite au commandant (Il est capuchonné mais pas les deux cavaliers expérimentés ni Beldrom qui portent des uniformes de l'armée du fils mais pas les couleurs Di Jironal).
Ils s'attablent pour boire un verre et observer l'ambiance et les personnes présentes en cet après midi du lundi 21 janvier 1468 (16h22, la nuit ne va pas tarder à tomber)

Dans un premier temps, Martou fait la conversation avec ses hommes sur la corvée d'avoir été envoyé dans le nord pour faire des patrouilles inutiles tout en écoutant et observant discrètement ce qui se dit aux alentours et si leur présence suscite des commentaires.