Elric sursauta. Son sommeil fut interrompu par une grosse langue chaude et humide qui lui léchait le visage.
"Aaa-aaah!," cria-t-il en se levant d'un bond dans la confusion la plus totale.
"Mais que... d'où il sort ce chien?"

Un magnifique animal au pelage blanc pur était assis devant Elric. Le chien l'examinait d'un oeil curieu et amusé.
Au cours de son aventure au pays des brumes, Elric avait entendu quelques bruits éloignés qui auraient pu vaguement être associés à un animal, mais jamais n'était-il tombé sur un vrai chien en chair et en os.
- Wouf!, aboya-t-il gentilment.
- Bonjour...
Le chien haleta. Il avait l'air si réel... il n'en croyait pas ses yeux.
- Je m'apelle Elric, et toi?
- Wouf!- Enchanté. J'ai dormi combien de temps?
Aucune réaction. Il continua à haleter.
- Tu ne saurais pas comment sortir d'ici par hasard?
Mais il ne l'écoutait pas. Le chien s'approcha pour sentir sa nouvelle rencontre. Il flaira ses bottes, son aine, sa main, son sac brun. Elric glissa délicatement ses doigts dans le pelage immaculé de l'animal. Il était doux et chaleureux au toucher. Il n'avait rien touché de doux et chaleureux depuis des lustres. Voire même quoi que ce soit de tanbible. La situation semblait presque surréelle.
L'attention de son nouvel ami était dirigée sur le sac brun qu'Elric transportait à sa ceinture. Après l'avoir senti amplement, le chien recula d'un pas et s'assit sagement. D'un air friand, il regardait le sac et Elric en alternance.
- Ah, tu as faim, dit-il en ouvrant son sac.
Le chien se leva d'un air excité et se balançait la queue.
L'homme sortit un morceau de viande séchée de son sac et le tendit à son nouvel ami, lequel dévora son cadeau joyeusement. Cette expérience, autrefois si banale, émervellait présentement le vagabond. Elric ne pouvait s'empêcher de sourire. Il lui donna un autre morceau. L'expression de gratitude que le chien avait en se léchant les lèvres remplit de ravissement le coeur de l'homme. Il ne s'était pas senti aussi bien depuis ce qui semblait avoir été des siècles.
Le chien fourra son museau dans le sac de nourriture. Elric éclata de rire:
- Gros gourmand! Faut pas tout manger d'un coup!
Le canin retira sa tête du sac et en sortit grosse une amulette en or jaune éclatant. Le coeur d'Elric bondit dans sa poitrine.
- Oh non-non-non, ne touches pas à ça, c'est pas pour manger.
Il tenta de ratrapper son amulette mais le chien esquiva, puis s'éloigna de quelques pas avec l'amulette dans la gueule. L'homme sentit une vague de panique monter en lui.
- Donne... c'est pas à toi ça. Donne!
L'animal semblait vouloir jouer avec lui. Il se mit en position, prêt à déguerpir, comme pour taquiner Elric. Son coeur se serra d'angoisse à l'idée de perdre son Talisman.
- Je te jure si tu...
- Rouff!, aboya la bête blanche avant de détaler à toute vitesse.
L'homme le prit en chasse. Il courait le plus vite qu'il pouvait mais le quadripède était beaucoup plus rapide et le distancait aisément. C'est à ce moment qu'Elric remarqua un détail insolite: un arbre était apparu à l'horizon. Un arbre différent de celui qu'il était habitué de voir. Le chien se dirigeait vers cet arbre.
À bout de souffle, l'homme se rendit à l'arbre, lequel demeura visible à son approche. Il s'appuya un moment contre le tronc pour reprendre son souffle. Une petite rivière passait près du pied de l'arbre Le chien se trouvait assis près du cours d'eau, le narguant de son amulette.
Depuis son réveil, le monde autour d'Elric semblait se meubler graduellement d'objets tangibles : un chien, un arbre, une rivière...
Il s'approcha doucement du cabot en tentant de contenir sa hargne.
- Cette chose que tu tiens dans ta bouche... a une grande valeur pour moi. J'en ai besoin pour guider mon âme vers le chemin de la Lumière. Ne m'oblige pas à te l'enlever de force.
La bête blanche restait immobile et le fixait droit dans les yeux. Elric avait un étrange sentiment que l'animal pouvait le comprendre. Il s'en approcha doucement, et lorsqu'il était assez près pour tendre son bras et le toucher, le chien sauta dans l'eau.
Dans un élan de rage désespérée, l'homme se jeta à l'eau pour tenter d'attraper la bête.