Lucan regarda le petit homme en haussant les épaules.

« Tu fais bien ce que tu veux. »

Apparemment, la perspective de se hisser sur le dos du cheval ne lui semble pas la plus favorable dans sa situation présente.
L'homme décide donc de se suspendre à la bride du cheval monté par le semi-homme pour guider la monture sous le couvert d'un pin à large ramure.

Une fois à l'abris, Lucan déscendit de sa monture et s'adressa aux autres.
« Alors, qu'avez vous à raconter ? »

L'homme prit appui comme il put de son épaule droite contre le tronc du pin.
« Je ne connais pas ces chevaux, et je n'ai pas vu d'autre convoi que la caravane que j'ai croisée tout à l'heure et qui fait route vers Yhaune.
Je ne connais aucun d'entre vous et je ne comprends pas bien ce que vous me voulez ... » dit-il sobrement.

Lucan, regarda le vieillard s’adosser à l'arbre.

« Ne vous inquiétez pas vieil homme, ce n'est pas a vous que je m'adresse. »

L'homme acquiesce silencieusement, se soutenant à l'arbre en attendant que le déluge ne se calme.

« Peux-tu peut-être nous indiquer ton lien avec la caravane et nous révéler ton identité ? Ça aidera sûrement les deux autres à se dérider, » amorce H'elix.
« Je ne suis moi même pas une menace, messieurs. Mon nom est H'elix Petitbidon Je viens de loin vers l'ouest et mon vague objectif réside à l'est. En somme, je ne fais que passer. D'ailleurs j'ai du passer trop tard car, comme je l'ai déjà mentionné, je n'ai rien aperçu. »

Ce faisant, le halfelin tente vainement de positionner sa monture sous un feuillage qui aurait pu les accueillir efficacement tous les deux. C'était bien agréable d'être un tantinet plus grand que les autres pour une fois mais il va probablement falloir se résigner au plancher des vaches tout bientôt.

A ces mots, l'homme fronce les sourcils autant que la face.
« C'est bien louable comme intention, mais peu prudent à la réalisation.
Ces harnais portent le sceau de « la Dame »,
et si vous ne lui appartenez pas encore,
vous ne souhaitez probablement pas que cela ne vous advienne. »
marmonne-t-il entre ses dents.

« Hummmm, une entité qui a l'air des plus agréables. Elle officie dans les environs, cette "Dame" ? Je dirais d'office que je n'ai pas envie de la croiser, » lance H'elix, toujours juché sur son canasson, au vieillard cacochyme.

Il se tourne légèrement vers Lucan et poursuit: « Bon, si tu n'as pas à les rendre, tu devrais pouvoir m'en laisser un, non ? Un chasseur n'a pas à s'encombrer d'une monture en trop tandis qu'un petit homme pourrais bien y voir ses pauvres petits pieds sauvés. »

L'affable halfelin n'y croit guère mais un gain est un gain et il faut bien tenter. D'autant que tout ce qui pourrait faciliter la suite de son périple est bienvenu.

« Elle réside à Ordulin si vous voulez le savoir.
Un manoir sur les hauteurs. » dit l'homme appuyé au tronc du pin.

« Madame est bien installée ! »s'exclame H'elix. « J'imagine qu'elle baigne dans la plupart des magouilles des environs. Il faudra s'en méfier, » ajoute-t-il, plus pour lui même qu'à l'attention de ses voisins.

« Ou allez vous donc ainsi, vaillant vieil homme ? Il en faut du courage pour arpenter ce chemin seul et sans monture » ajoute l'halfelin pour alimenter la conversation.

« Mon intention me conduit à Pontarchen. » répondit l'homme « Ce n'est pas comme si j'y étais attendu non plus, mais avec un peu de chance on m'y accordera le gite et le couvert sans trop de contreparties. Je n'ai plus rien. »

« Ça fait une trotte ! Yhaune ne te plaisait plus ? Je vise pour ma part Tentras qui, semble-t-il, pourrait me permettre de faire quelques... juteuses affaires aux détours des ruelles, » rétorque H'elix en s'acharnant à descendre de son cheval.

Le Halfelin scrute un instant les entourages. Son regard s'attarde sur la protection des arbres et sur ses placides camarades. Il décide de s'éloigner du groupe de quelques arbres et s'installe du mieux qu'il peut au creux d'un tronc noueux qui lui permet de garder un œil sur l'assemblé. Considérant qu'il peut se détendre un instant, il se relâche et commence à somnoler alors même qu'il attend la réponse du Vieux.

« En fait, je viens de Valherse. » confesse l'homme, fatigué
« Le Temple m'y a trouvé un transport *grimaçant* « maritime » qui m'a laissé à Yhaune.
Ils devaient m'emmener jusqu'à Selgonte, mais ... je ne supporte plus les bateaux. »

Musique d'Ambiance

"Tu crois que c'est un hasard si tu te trouves ici, Elric?" demanda la voix désincarnée au fonds de son inconscient.
"Après tout ce que tu as vécu à Padhiver, tu te retrouves encore une fois dans une terre en voie de corruption. Rends-toi à l'évidence, Amaunator ne t'avais pas oublié. Mais plutôt il t'a gardé en réserve jusqu'à ce qu'il ait une fois de plus besoin d'un champion de la lumière. Les limbes de l'espace-temps n'étaient pas pour toi une malédiction. Encore moins une punition. C'était un test."

Elric était perdu dans ses pensées, lesquelles étaient représentées par lui-même se tenant dans une plaine infinie, couverte d'une brume épaisse et opaque. La voix désincarnée venait de toutes les directions. Il ne la reconnaissait pas, même si elle évoquait chez lui, un sentiment de confort et de familiarité.

Les implications de ces mots étaient étourdissantes. Pourquoi moi? pensait-il. Il y a d'innombrables autres prêtres, plus sages et plus expérimentés que moi. C'est à eux que reviens l'honneur d'accomplir Sa mission Divine...

"Ne sois pas stupide, Elric. Abbé Sauras, évêque Viktor, révérend Hubert, et même Saint-Jovan... c'est de eux que tu parles? Des hommes très respectables certes, mais en quoi sont-ils pauvres ce que toi tu es riche?"

Cicatrices de l'âme.

Une décharge électrique le long de sa colonne vertébrale ramena le prêtre à la réalité. Il se trouvait à l'abri, sous un arbre, au sein du groupe qu'il avait rencontré quelques instant plutôt. Deux chevaux, un voyageur aux traits elfiques, un semi-orc coiffé d'un grand chapeau, un semi-homme étendu contre une souche, un vieillard en lambeaux, et le chien blanc qui se montrait amical et affectueux.

Elric avait entendu la conversation mais n'y avait porté qu'une oreille distraite durant ses réalisations importantes. Il était tout de même en mesure de se situer dans la conversation:

« Pardonnez mon silence, » s’adressa-t-il à Lucan. « Ce n'est pas dans mon habitude. Mon esprit était occupé avec des réalisations bouleversantes... Je me nomme, Elric Thorne, prêtre assermenté de l'église d'Amaunator à Eauprofonde, Porteur d'Aube de Saint-Lathandre. Vous me voyez être un principal intéressé sur l'identité du propriétaire de ces chevaux... »

Le demi-orc a regardé la pluie tomber, comme s'il compte le nombre de gouttes qui se dirigent vers le sol au gré de la gravité. Sortant subitement de sa torpeur, il fait comprendre à tous que son mutisme ne signifie pas qu'il n'est pas attentif.

« Votre "Dame" est très certainement une esclavagiste, ou une sombre cultiste. Les chevaux dont vous parlez depuis quelques minutes servait à charrier des gens, plus ou moins morts. Manque de bol pour les conducteurs et autres, puisque les moins morts de leurs prisonniers se sont rebellés.

Je ne pourrais pas vous en dire plus puisque j'ai été envoyé dans les vapes durant cet affrontement, pour ne me réveiller qu'une fois le chariot en miettes. Et ces criminels en morceaux.

Je ne suis pas un détrousseur, plutôt un égaré malchanceux, au mauvais endroit, au mauvais moment.

Et si vous voulez le savoir, je veux bien vous accompagner jusqu'à Yhaune, Pontarchen ou Tentras peu importe. Je préfère d'ordinaire voyager seul, mais la contrée n'est pas sûre et autant circuler en groupe. Une fois la civilisation retrouvée, il sera plus facile à chacun d'entre nous de retourner à ses obligations non?

On décolle dès que la pluie se calme, ou vous voulez prendre une rincée?

Et pour les nouveaux, je m'appelle Dorm. »

Comme pour signaler qu'il est prêt à partir, ne souhaitant pas du tout s'attarder dans ce coin plein de mauvais souvenirs, Dorm enfonce son chapeau un peu plus sur sa tête.

H'elix sursaute à la reprise de la conversation. Il s'étire et considère ces nouvelles informations.
J'ai probablement eu de la chance de ne pas tomber sur ce convoi lorsqu'il était encore en état de marche,pense-t-il.

Il se relève et retourne vers le groupe.
« Ça tombe bien, m'sieur Dorm, j'avais moi même besoin d'un peu de compagnie pour poursuivre vers l'est l'esprit tranquille, » balance-t-il gaiement.

« On ne devrait pas retirer toute trace de la provenance de ces chevaux avant qu'une rencontre inopportune ne nous attire l'ire de sbires de cette sombre dame ? J'en serais plus rassuré, je l'avoue, » souffle-t-il ensuite. « Enfin, c'est ce que je ferais si m'sieur Lucan décidait de m'en céder un, » termine-t-il d'un air chafouin.

« Par là, y a Ordulin - avec « La Dame » à éviter, » dit l'homme indiquant la direction qu'il suivait
« pis après y a Pontarchen, niché à l'abri entre la Sembie et le Cormyr. Un coin paisible quoique fortement militarisé. Moi, je quitte cette Sembie de malheur où je n'ai rien à faire et surtout pas à être. »
« Par là-bas, ... » ajouta-t-il en indiquant la direction opposée « Y a Yhaunne, son port et ses shadowars. Pour Tantras et la Vespérine, c'est la direction. Mais moi j'irais pas. »