Laissant le soin aux deux autres de préparer le remède et de déchiffrer les parchemins, Tara était elle aussi retournée un moment dans la grande salle au miroir. Son père avait fini par la rejoindre et était resté un long moment avec elle.
► Afficher spoilerTara était toute occupée à régler les pièces d'une armure à sa taille quand le Baron William vint la retrouver dans la grande salle.
Il s'assit en silence près de sa fille et l'observa un moment.
La jeune femme finit de passer l'armure lamellaire, en testa la souplesse en faisant quelques exercices acrobatiques puis revint, l'air satisfait, vers son père.
« Ma petite Tara... Tu as tellement changé... Tout ça dû être dur pour toi. Je suis vraiment désolé. »
Elle s'accroupit face à son père, tirant sa lame de son fourreau pour la polir et répondit en souriant :
« Oui. Mais j'avais en mémoire les meilleurs modèles qui soient... Et tout ça, c'est du passé maintenant ! Marlak est probablement mort pour de bon, vous m'êtes revenus... même si j'aurais préféré que ce soit dans d'autres circonstances et qu'Enguerrand soit avec nous, nous allons finir par rentrer à la maison, reprendre nos terres et nos vies. Tout est bien qui finit bien ! »
C'était la première fois que William discutait vraiment seul à seul avec sa fille depuis que le sortilège de Marlak avait été rompu.
« Il semble qu'il y ait encore quelques embûches sur le chemin, non ? Mais peu importe, je comprends ce que tu veux dire. » Il marqua une courte pause, relevant l'air à la fois déterminé et préoccupé de sa fille. « Tu sais, j'ai beaucoup discuté avec ta mère ces derniers jours. A propos de toi notamment. Elle pense comme moi : tu ressembles trait pour trait à Blanche Auraniël. Tu te souviens ? La statue sur la grand place était à son effigie. C'est avec elle qu'est né l'image des vierges guerrières dans notre famille. D'ailleurs, c'est avec elle qu'à débuté la lignée. En son honneur, nous transmettons de génération en génération son nom et son héritage, à la personne la plus digne d'elle. »
Tara avait déjà entendu cette histoire de nombreuses fois : Blanche Auraniël, fondatrice de la baronnie d'Ebelern, une guerrière sans pareille, il y avait de ça une douzaine de générations, qui avait rassemblé sous sa bannière tout ce que leurs terres comptaient d'hommes libres pour offrir autre chose qu'un avenir terni par les guerres de religion et les conflits entre races à la frontière entre Vigil et le GorUnTha. Ni les uns ni les autres n'avaient su triompher de cette femme bénie par les dieux. Jusqu'au jour où elle obtint le traité de paix fondateur d'Ebelern.
Même si elle avait épousé un de ses généraux, elle était restée connue comme la vierge guerrière de l'est, menant même les femmes au combat. Et c'était son nom qui était transmis depuis dans la famille. Le baron reprit la parole.
« Cet héritage, c'est son épée. Celle là même que tu tiens dans tes mains. Je pensais la transmettre à ton frère aîné quand tu étais jeune. Il la méritait en tout point... Mais aujourd'hui je vois bien que les dieux ont voulu que ce soit toi qui en hérites ! Laisse moi te montrer quelque chose... » il tendit la main pour que Tara lui passe l'épée. Il se leva et se mit en position de garde.
Son style était plus conventionnel que celui de Tara. Celui d'un cavalier lourd, à n'en pas douter. Il fit quelques passes d'armes dans le vide avant de revenir face à sa fille.
« Cette épée recèle un grand pouvoir. Jusqu'à présent tu n'as fait qu'en effleurer la surface. Il te faut à présent être liée à elle par le sang. C'est la tradition. Donne moi ta main. » La jeune femme se releva et s'exécuta, elle ôta le gant de sa main droite et la tendit à son père. Il posa la lame de l'épée dans sa paume tendue et lui referma les doigts dessus.
« Ca va piquer un peu. » il sourit à sa fille et retira doucement l'épée, entaillant ainsi la peau de sa main. « A genoux à présent... Moi, baron William Auraniël, Baron d'Ebelern, te nomme toi, Tara, digne héritière de Blanche Auraniël, maîtresse de la lande et protectrice du peuple. »
Il adouba sa fille, à la manière des chevalier, avant de rendre l'épée à sa fille : « C'est tout ? Je pensais qu'il fallait accomplir des épreuves et ce genre de chose ? » « Ces épreuves tu les as plus que passées haut la main ma fille. a partir d'aujourd'hui, le sort ta lame, et le tien sont liés. Tu verras ses pouvoirs grandir à l'unisson avec les tiens. Jusqu'au jour où tu la cédera à ton tour. »
Tara parut hésiter un moment, les yeux perdus sur le fil étincelant de la lame. Vibrait-elle d'une pulsation sourde et puissante ? Ou bien était-ce une illusion liée à la fatigue ? Elle la remit au fourreau dans son dos. « J'en serai digne, père ! » dit-elle fièrement.
« Hum... On ferait mieux d'aller voir où en sont les autres non ? »
A leur retour, Tara ne portait plus la simple tenue de cuir noir qu'elle avait porté jusque là, troquée au profit d'une armure lamellaire, un peu moins souple mais plus résistante, dont les reflets argentés indiquaient la nature extrêmement précieuse de son métal.
Arrêtée un instant par Justine en entrant dans la salle, son regard se ternit d'une vive inquiétude, qu'elle laissa transparaître quand elle vint trouver ses camarades, affairées à la confection du remède.
« Où en êtes-vous ? Il faut faire vite... ma soeur est en train de mourir ! Justine dit qu'elle n'en a que pour quelques heures tout au plus avant de... avant de se changer en ces choses. »Au regard dépité de la sorcière, Tara perdait espoir.
« Il vous faut un cobaye pour tester la méthode dont parlait Ichabod ? Faites le sur moi, je suis résistante ! »