La fillette avançait à petits pas, un peu à la traîne, et visiblement pas bien rassurée. Les restes silencieux des géants endormis n'avaient rien pour la mettre à l'aise, et elle avait la ferme attention de ne pas s'attarder ici... se pressant pour rattraper les autres, elle observait l'étrange miroir qui leur faisait face, attendant elle-même la réponse à l'interrogation de Tara.

Aravilan avait fermé les yeux sur le chemin comme demandé par Tara.
Par moment elle se mettait à compter puis à regarder les gens, murmurant un « Trouvé ! » de temps en temps et se donnant des claques fébriles occasionnellement.
Ces gestes étaient un semblant d'aide pour tenter de regagner, en vain sa lucidité mais le fait que sa joue devenait plus rouge que sa raison ne revenait lui fit vite changer d'idée.
(en commun) « Moi ! Moi je suis une dragonne !! »(en draconien) « Sésame ouvre toi ! »

Ichabod jeta un regard à la fois admiratif et craintif aux restes des dragons. Comprenant sans peine le silence respectueux de Tolrik, il s'abstint de poser les questions qui lui brûlaient les lèvres et suivit le nain.

« Ce miroir? »

Tolrik parut ennuyé par la question, hésitant à répondre, avant de finalement dire:

« C'est ce qui sert de pont entre ce monde et celui où reposent les âmes de nos maîtres et créateurs. »

La dragonne siffla en entendant la question de Sania et lui répondit simplement:

Réponses.

Le remous sur le miroir s'intensifiait à l'approche du petit groupe tandis qu'un murmure lointain se faisait entendre:

« Qui est là? »

La petite ouvrit les yeux tout grand de surprise en entendant la voix qui les interpellait, s'avançant au milieu des adultes pour mieux contempler l'imposant miroir. Tolrik semblait porter la plus grande déférence envers leur interlocuteur. Et s'il disait vrai sur la nature de cet être, cela dépassait tout ce qu'ils avaient rencontré jusque là.

« Mes respect, nous sommes des amis d'Ormen. Nous regrettons de troubler la quiétude de ces lieux par notre présence, mais les derniers évènements tragiques qui ont agité vos descendants et serviteurs nous ont conduits ici. Une femme est arrivée ici il y a peu, et avec elle un fléau qui a décimé les défenseurs de la forteresse et contraint vos fils à la servitude dans cette vie ou dans une autre bien moins enviable. Elle est venue trouver quelque chose ici, quelque chose qu'Ormen a tenté de tenir loin de sa portée au prix de sa vie. Nous sommes ici pour que son sacrifice ne reste pas vain. Il est... possible que vous aillez entendu parler de cette femme par le passé, elle a porté plusieurs noms au cours des âges, la dame-peste, la voleuse d'enfant, "celle qui amène pire que la mort" ... ou plus simplement "Alessa". »

La petite baissa les yeux, frustrée d'avoir une fois de plus son propre nom associé à toutes ces horreurs.

Réponses hein ?
Et le miroir parla. Enfin, pas vraiment, on n'était pas sûr. Mais l'incertitude ne freinait pas Sania, qui partit du principe que le miroir venait de parler.
« Réponses hein. »
Elle sourit. Le miroir voulait des réponses, et Ormen pensait que le miroir pourrait leur en donner également. Ou quelque chose dans ce genre là.
Prenant une inspiration, Sania répondit à la question de sa voix bien portante. Enfin, elle faillit, mais Alessa lui coupa la parole avant qu'elle n'ait commencé à parler. Du coup elle attendit, avant de répondre de sa voix claire.

« Je suis Sania Feras, fille de Narea Feras et de Lagune. Et avec moi est ... » Elle avait déplacé la dragonne de son épaule à son bras, qu'elle brandit pour l'effet dramatique.
« Est ... Une jeune dragonne, peut-être la dernière de sa race. » L'effet tombait à plat dans l'eau.
Au fait, c'est quoi ton nom ? Tu en as un ?

Toujours plus intriguée, la baronne fit halte aux côté de ses amies, tenant fermement l'elfe sur ses épaules, et mis le genou à terre.
Ne sachant trop que dire, ni si le geste était sensé. Elle se sentait insignifiante devant un tel artefact. Elle écoutait sagement les explications d'Alessa, et la présentation de Sania. Devaient-ils tous se présenter ? Ces deux là avaient de bonnes raisons de le faire. Elle n'était là que pour poursuivre sa quête de vengeance contre les alliés de Marlak, et trouver un moyen de protéger ses terres.

Elle glissa un regard vers Duke, songeuse. Et lui ?

Toute à ses pensées, et en continuant d'écouter les autres, elle détaillait le "miroir", se demandant combien de temps une aura aussi puissante pourrait passer inaperçue de l'Alessa "originale".

Le remous du miroir se calma un instant avant que la voix n'ajoute:

« Ainsi donc Ormen est mort, tout comme cette cité... Comme sa sœur avant elle... Victime de la même personne... Nous connaissons cette femme...

Porteuse de mort... Aberration contre-nature... créatrice de prodiges néfastes... Reine d'Iskandelis... Membre de la funeste triade... »

Le silence s'installa pendant près d'une minuteavant qu'une autre voix, plus douce, ne prenne le relais:

« Nous vous remercions de nous avoir prévenu... Et d'avoir pris soin de ces enfants sombrécailles... »

De nouveau la surface du miroir se fit lisse tandis que le silence revenait...

Aravilan gigotait par moment sur l'humaine, tentant de jeter un coup d'oeil curieux.

Elle tentait de se réfréner ses aléatoires pertes de controles et comptait sur ses compagnons pour.

« Oh c'est joli, un miroir qui parle ! Par contre il devrait voir un sage car il a l'air d'avoir des troubles d'identité »

Euh .. mais .. d'accord, peut-être que ça servira aux autres ces informations, mais ...
Sania s'apprêta à poser une question, mais fut cette fois interrompue par Aravilan.
Après avoir jeté un regard ennuyé à son elfe de compagnie, la mercenaire s'adressa au miroir.
« Excusez-moi, mais il n'y a qu'un enfant sombrécaille ici. Enfin, vous parlez bien de la dragonne qui se sert de moi comme perchoir ? Parce que je la crois unique. »

La fillette opina doucement avant de reprendre.

« ... et si d'autres des vôtres sont encore sains et saufs, il n'est peut-être pas trop tard pour les mettre à l’abri eux-aussi, tout comme nos propres gens. Mais il nous est difficile de prévoir ses agissements, ses projets et sa nature nous échappent. Agit-elle au nom de cette "triade" que vous avez évoqué? Vous savez peut-être ce qu'elle cherchait en venant ici et ce qu'elle comptait en faire? »

La voix plus sèche répondit à la question posée par Alessa:

(en draconien) « L'Orbe de contrainte. »

Nulle réponse ne provint du miroir pendant presque une minute avant que la voix plus douce ne reprenne la parole:

« Il n'y a rien que vous puissiez faire pour protéger la dernière couvée, jeunes gens... Cette cité est condamnée, comme sa sœur avant elle. Quand à l'objet... Il permettra à quiconque le possède de manipuler les dragons de cette cité... »

La petite avait le regard dans le vague, les pensées se bousculant dans son esprit.

« Je présume qu'un tel fléau pour vos enfants n'est pas votre création, sans doute l’œuvre d'un ancien adversaire d'un autre temps, auquel elle semble apparentée pour avoir connaissance de son existence. Cela dit pour l'avoir vue à l’œuvre de nos propres yeux, la simple menace de la contamination semble avoir tourné nombre des plus réticents à sa cause, et elle n'a eu aucun mal avec les rares comme Ormen qui restaient encore pour lui faire obstacle.

Qu'est-ce que l'orbe vient lui apporter de plus... et pourquoi venir la chercher maintenant? Quelle place a-t-elle dans ses projets? Les autres cités sont-elles également exposées à une menace similaire? »

Elle ouvrit la bouche pour s’apprêter à poser une nouvelle question, avant de se résigner, par politesse.

« Dites, vous croyez que de là où nous nous trouvons, nous pouvons savoir ce qu'elle manigance? »

Une autre voix avait pris la parole, plus fluette et agile, bien vite interrompue par la voix féminine:

« Ahem... Les Orbes étaient un mal nécessaire. Quand à l'utilisation qu'elle prévoit pour l'objet, je n'en ai pas la moindre idée... A moins que les dragons ne soient pas tous morts, comme vous nous l'avez dit...

Etes-vous malade? »

Le fillette risqua un regard en direction de Tara qui commençait à avoir une petite mine avant de répondre par un "oui" de la tête.

« Pour la plupart, à des stades plus ou moins avancés. En revanche la nature nécrotique de la maladie n'a pas semblé capable de réanimer les nains qui y ont succombé. »

Aravilan préférait concentrer ses efforts sur son mutisme. Le problème est que comme le haut s'efforçait d'être bloqué tant bien que mal, c'est le bas qui s'agitait et deux jambes indécises se bataillaient contre le torse de Tara et des gens autour.

L'elfe poussa un soupir pénible et fatigué tout en réflechissant à ce qu'elle pouvait faire pour annuler ce maléfice...

Les voix amenaient finalement plus de questions que de réponses. L'air perplexe, la guerrière releva la tête et prit à son tour la parole.

« Nous vous aiderons, cela va de soi, cette femme est dangereuse et nous avons des comptes à régler avec elle de toutes façons. » Elle pensa à ses cicatrices, comme gravées au fer rouge dans sa chair par les sortilège de Marlak, ainsi qu'à la maladie qu'elle sentait peu à peu dévorer ses forces. Si elle était son alliée, elle paierait aussi. Mais ça ne me rapproche pas d'Ebelern tout ça... Attends moi encore un peu Brent.

« Pouvez-vous nous en dire plus ? Qu'attendez-vous de nous ? Que nous récupérions l'orbe ? Ça me paraît difficile pour nous de lutter contre elle en l'état actuel des choses. »

D'autres questions se pressaient déjà sur ses lèvres, et contrairement à Alessa, elle n'avait pas la patience ni la sagesse d'attendre pour les poser :
« Je ne me suis pas présentée, veuillez m'en excuser : Je m'appelle Tara, Tara Auraniël, baronne d'Ebelern. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette triade ? et Iskandelis... quel est cet endroit ? »