« Kraa ! » « Kraa ! » « Kraa ! »

On est dans la pièce où Indibil m'a laissé. Quand a-t'il vu à travers mon déguisement ? Mes yeux sont attiré par la fenêtre où trois corbeaux me scrutent.

Je peux quitter encore par là. Je m'incline, les corbeaux sautent sur les côtés pour moi, et j'étire ma tête par la fenêtre.

« Kraa ! »

Aie ! Petits monstres ! Ils me pincent avec leurs becs pointus, leurs pieds griffus saisissant le rebord de la fenêtre. Ils sont si petites ...Je rigole devant leurs efforts lilliputiens pour me tenir, « hahaha » fou rire dans le crépuscule de la ruelle en contrebas.

« Pour les orphelins ! »

Je vole de la fenêtre, traînant les corbeaux pendant que je recule, ils pullulent et battent l'air de la suite alors que je retombe sur le lit à baldaquin. Je fixe, caquetant au plafond, tandis que les corbeaux tournoient au-dessus la baldaquin.

Un changement de costume, alors ...

« hahaha... » Selina se tient au milieu de la scène, des mains gantées noires couvrant son visage blafard.

« hahaha... » Putain de merde, ai-je vraiment cassé cette connasse ? De mes genoux, je gratte encore la dernier accorde de ma chanson, souriant en un manière saugrenu vers la scène.

Elle ouvre les bras, paume vers le haut, le visage parfaitement composé.


« Mes frères, gardons l'espoir et la force d'y croire
Pour la paix dans le monde, l'amour que l'on sème
Écoute ma chanson d’enfançon
La vie des orphelins, plein de problèmes

Pas de nourriture, pas d’abri
Ils restent là face au roknari
Spectateurs au bord de Chalion
Leur peine est de manquer d’un champion

Mes sœurs, gardons l'espoir et la force d'y croire
Pour la paix dans le monde, l'amour que l'on sème

Esclave d'une vie qu'il n'a pu choisir
Enchaîné par la peur de mourir
Mais comment pouvez-vous fermer les yeux
Croire que tout ira mieux
Si personne ne fait rien?

Si personne ne fait rien
Coupables nous serons de ces orphelins
Voulez-vous vraiment que tout s'arrête?
Si ça continue, le bâtard viendra peut-être

Mères et pères, gardons l'espoir et la force d'y croire
Pour la paix dans le monde, l'amour que l'on sème »

J’essaye de l’accompagner, mais sa voix est si adroite qu’elle n’a pas besoin. Elle glissant du registre grave du baryton jusqu’à le vibrato strident d’un mezzo-soprano, sautant haut et bas plusieurs fois dans une seule barre.

« Bonsoir et bienvenue au la grenouille qui grogne, vous piliers du Bergara ! Votre largesse vers les orphelins a été accepté par le bâtard, et la « troupe templier » vous remercie. »

« Chalion vous regarde, vous juge, pour la façon dont vous traitez les orphelins. Qu’est ce qui nous sépare des roknari sinon notre fidélité au bâtard ? Donc, avec ce geste généreux, vous avez acheté la protection du bâtard et le respect de la nation. »

« Je vous exhorte : protégez les orphelins. Dites à vos pairs de vos responsabilités envers les créatures les plus vulnérables du bâtard ! Vous devez rester vigilant aux côtés de Chalion, aux côtés des orphelins, sous la protection du bâtard, contre les esclavagistes quadraine au nord. »


« Inclinez la tête et rejoignez-moi en prière … » Je baissé la tête avec le public, les scrutent derrière mes lourds cheveux noirs.

« Grêle, suzeraine sombre en blanc,
Nous vous remercions, vous ne nous ruinerez pas
Avec des évènements intempestifs,
Ni inondations, ni fléaux.
Merci de ne pas nous avoir écorché
Oh ne nous braconne pas
Ou arrosez-nous de graisse torchée … »

Nous relevons la tête. Devant nous, elle se tient, bras ouverts, trois corbeaux noir perchée à travers ses épaules, les têtes s’agitant, leurs becs pointus curieusement ensanglantés.

« Moi je suis aussi une orpheline, née à Cardegoss, pas d’espoir, pas de nourriture, pas d’abri. Mais le bâtard m’a trouvé à Merilla, m’instruisant dans la musique à travers les oiseaux, les souris dans les murs, même les arbres et les herbes ont leur propre musique si vous connaissez l’astuce de l’écoute … »

« Et maintenant j’ai le plaisir de vous présenter ces trois créatures favorites du bâtard, un genre du créature qui vous scrute toujours. » Dit-elle, regardant fièrement les corbeaux sur ses épaules. « Hier matin, ils se sont régalés sur le chair des roknaris qui à offensé le bâtard à son temple ; demain, qui sait ce qu’ils vont consumer. »

Pendant qu’elle chante sa dernière chanson, je regarde le public pour leurs réactions : comment ce poison réagit-il à sa voix ?

« Dans les jours passés, »
« Kraa ! »
« Mon ombre m’a dit l’heure »
« Kraa ! Kraa ! »
« Le sol sale, »
« Kraa ! »
« Mon sablier »
« Kraa ! Kraa ! »

« Le temps est dans les herbes, »
« Kraa ! »
« Les arbres, les saisons »
« Kraa ! Kraa ! »
« L’ondulation des morts »
« Kraa ! »
« La vie dans les chansons »
« Kraa ! Kraa ! »

La chanson d'ouverture fait grand effet :
Le public est médusé.
Statufié.
Sans voix.


À l'invitation de Selina, ils se recueillent humblement.

À la fin, ils s'empressent de payer leurs repas et de s'en retourner chez eux.

C'était peut-être une succès, ce soir ? Nous avons retourné au le temple du bâtard hors de la ville. Les connards du public ne sont pas bavardés du prix d'un orphelin après le spectacle : c'est mieux, ça. Toutefois, le matin, cela s’améliorera-t-il pour les orphelins à Bergara ?

À Oby, je n’ai eu qu’a regarder l’argent dans le chapeau pour mesurer le succès de la soirée. Il-y-a deux semaines, je m’ennuyais déjà de jouer des rôles principaux dans ce petit coin du monde, préférant plutôt de jouant les seconds couteaux derrière les comédiens supérieurs, évaluer en particulier notre succès par la façon dont nous pourrions changer les esprits des gens. Puis mon père est décédé, j’ai trouvé un tel acteur qui dort maintenant à côté d’où je suis assis, et je n'avais plus de moyen facile de jauger mon succès.

Pendant notre voyage bref au temple, la terreur de Selina d’être vue semblait s’évanouir. On a discuté librement l’avenir, comment on pourrait voyager avec les orphelins et leur enseigner le théâtre ; et les orphelins qui reste à Bergara, comment on pourrait protéger leur avenir. Selina m’a aussi dit qu’elle avait envoyé une lettre à un ancien collègue de théâtre d’Arrasate, l’inviter de nous rejoindre en Bergara. Il y a plusieurs trucs à gérer, et il ne nous reste que cinq jours, plus d’aide serait la bienvenue !

Je suis épuisé … Je commence à me lever, la main du Selina attrape mon bras.

« Reste ici, je t’en prie. »

19 septembre 7h00

90 royales dans mon bourse, j'arrive au l'atelier du Nadal Mateo Cruz, hors des murs de Bergara. C'est très tôt, mais s'il est disponible, je peux lui parler avant d'entre dans les murs à la recherche d'une tranche de bacon ... et à la recherche de Ser Marçal. Où a-t-il passé la nuit, et pourquoi est-il si fragile, bon sang ?

Le charpentier est dans sa cour, en train de raboter des poutres ...

« Bien le bonjour, maître Cruz. » Dis-je souriant. « Est-ce un bon moment pour vous interrompre ? Je cherche votre avis sur quelques points saillants : vos besoins concernant les apprentis, les frais de construction d’un orphelinat, et le prix de la construction de quelque chose comme ça. » Je lui montre mon dessin :


« Une scène itinérante, avec l’espace pour un dizaine des danseurs. Deux chevaux peuvent le trainer.
Assez durable pour durer la route de Cardegoss. »

« Bien le bonjour Messire Troubadour. » répond le charpentier en posant son rabot.
« Le moment n'est ni bien ni mal choisi. C'est simplement maintenant que vous êtes ici, moi aussi.
Alors autant discuter maintenant qu'à un autre moment ... »
Il frappe ses mains pour en faire tomber la sciure
« Je peux prendre un apprenti, j'en ai déjà 4, je peux pas en prendre plus. »

« Pour l'orphelinat à construire ...
Vous avez le terrain ? Vous avez une idée de la taille du bâtiment final ?
Le prix d'un bâtiment c'est très variable. Il y a la main d’œuvre, bien sûr, mais aussi les matériaux ... »

l'homme est amer
« Il se passe que ma belle-sœur vient d'arriver avec ses enfants et que je dois l'héberger.
Ils ont plus rien, mon frère est mort, ça me fait 5 bouches de plus à nourir.
Voilà ce qui se passe. »

Je suis préoccupé avec les orphelins que je ne connais pas ; cet homme a sa propre tragédie à laquelle faire face, et il est toujours prêt à aider un orphelin. Un homme bon, bien sûr.
Je le regarde, laisse planner pour un instant sa mauvaise nouvelle. « Désolé, pour votre famille, et pour vous. » Je n'ai rien à dire de plus pour le moment.

« On y peut rien, pas vrai ?
Les catastrophes, ça arrive.
On fait face comme on peut ... »
Il montre sa poutre
« Voyez cette pièce ? C'est une belle poutre, pas vrai ?
Elle viendra en traverse soutenir une belle grange.
Le laboureur qui me l'a commandée l'attend depuis une semaine,
il en a besoin pour sa grange, pour ranger sa récolte, plus abondante cette année qu'il ne l'espérait.
Et je n'arrive pas à m'empêcher de penser qu'elle serait parfaite pour une cabane pour héberger ma belle-sœur.
Mais elle n'a pas un sou. Et ce laboureur paye bien.
Et pour l'instant, c'est le plus urgent. »

Je secoue la tête, sifflant en sympathie. Ces moments difficiles ont touché plus que les orphelins, bien sûr ...

« C'est toujours difficile, de faire face aux catastrophes, mais je crois que vous les abordez bien. La récolte du fermier nourrira beaucoup de gens, et ... » Il n'ignorait rien de ce que je viens de dire.

« Maître Cruz, si je peux vous aider, ou rassurer votre famille, d'une manière ou d'autre ... Vous avez besoin d'argent pour nourrir votre famille, et une troupe du théâtre a besoin d'une bonne scène, ainsi que des chariots pour nous emmener loin d'ici. Si notre commerce peut vous aider, cela nous aiderait aussi.

Nous sommes tellement occupée avec les orphelins, les plus nécessiteux de ce coin du monde, mais notre objectif c'est d'emmener les histoires des gens à la cour du Roya, afin que le gouvernement central puisse en savoir plus sur les luttes et les catastrophes du peuple qu'il dirige à la frontière. Si vous en avez le temps et l'envie, j'entendrais votre histoire.

Franchement, vous avez déjà un gros fardeau sur vos épaules ; si une autre bouche à nourrir est la goutte qui a fait déborder le vase, personne penserait du mal de vous si vous vous retiriez. »

Que suis-je en train de faire ? Depuis hier, je n'ai rien fait pour les orphelins sauf ramasser 90 royales hier soir, et je n'ai plus que dix places pour les apprentis au lieu de treize. Neuf si Cruz se retire !

« Maître Cruz, considérez que c'est fait. Je suis ravi d'avoir la chance de vous aider, même pendant que vous aidez votre communauté. »

Je laisse ses outils ponctuer le silence et attendre de voir quel autre sujet il abordera ensuite.

« Repassez demain, on dessinera les plans ... » dit-il en reprenant son rabot.
« Pour aujourd'hui, je dois finir cette poutre ... »