« Heu ? pourquoi pas mon second ? » tente le Commandant
« Il me dit souvent que les Ombres sont plus de son domaine que du mien.
Même si je ne suis pas certain de comprendre ce que cela signifie .... »

« Oui, oui, oui, ... bien sûr ... je vous l'appelle tout de suite ... »
il passe la tête par la porte et appelle son second à voix forte :

« Iñaki ! Urgent ! »

« Oui, Commandant ? » demande le second en entrant dans la pièce.

Le commandant fait les présentations :
« Votre Excellence, voici mon second, le Capitaine Iñaki Albiñana. »
« Capitaine, voici notre Grand Commandeur, le sieur Martou dy Jironal en personne. »
Il ajoute, plus hésitant « Il répond aussi au nom de .... « Natzari dy Rinal, un courtisan de Cardegoss en mission dans les terres du nord » ... heu ... si j'ai bien compris ? »

« ... »
Le Capitaine en reste bouche bée, sans voix, les yeux exorbités ...
Il dévisage son Commandant comme si le face-palm le démangeait assez abasourdi,
puis se tourne vers l'encapuchonné avec circonspection et respect.
« Je comprends la nécessité de voyager incognito. »
Il reprend une contenance plus neutre « En quoi puis-je vous être utile ? »

Le Commandant acquiesce ... mais avec plus d'hésitations que de conviction_ ...

« Il eut été plus judicieux d'en discuter avec moi avant d'en importuner le Commandant ...
Mais vous l'ignoriez certainement ... » murmure le second

« Je suis au regret de devoir désapprouver votre plan, Messire.
Si « détails » il y a, à discuter avant de clore cet entretien ...
Il me semble plus pertinent d'en discuter « après », et aussi « ailleurs » ...
Surtout si vous souhaitez qu'un tel stratagème soit mené à bien ... »

« J'y veillerai. » répondit le Capitaine avec un sourire torve.
« Mais ce ne sera pas facile ... »

Martou sort de la caserne et informe ses trois hommes que le commandant est un homme incapable de ruse et qu'il pourrait bien, par pure maladresse, révéler leur présence et gâcher tout espoir de surprendre l'ennemi.
« Heureusement, il est secondé par un homme plus apte à agir avec doigté. »
Mais dans quelle mesure pourrait-il me trahir... Je n'en sais encore rien.
L'intendant cogita à plusieurs stratagèmes pour brouiller les pistes mais estima qu'à trop remuer la vase cela pourrait s'avérer plus néfaste que bénéfique à ses projets.
Bah, s'il est aussi perspicace qu'il semble le revendiquer, il saura venir à moi.
Ils regagnèrent le campement pour se restaurer.
Martou avait moins de deux jours pour être prêt et si Albiñana, ne l'avait pas contacté dans l'après midi, il faudrait aviser

Moins de 2h après son retour au campement, Martou est informé de l'arrivée d'un visiteur secret.
Le voyageur semble équipé pour un long trajet : mule de bât chargée et fontes de selle rebondies, cape de voyage imperméabilisée et capuchon de cuir tanné par le temps ...

« Messire dy Rinal voudra me rencontrer ...
Il me semble » annonce-t-il à son arrivée, en se découvrant.

L'intendant ne se fit pas trop attendre car il n'avait pas vraiment le temps de marquer son ascendance sur le capitaine.
Sans autres préambules, il proposa :
« Marchons un peu si vous voulez bien. »
Joignant le geste à la parole, il enchaîna :
« Que vous a dit votre commandant de mes intentions et pensez vous qu'il saura tenir sa langue ? »

Et je n'oublie pas que j'ai sa fiche à faire...

Le Capitaine marche aux côtés de Martou en alignant son pas sur celui de son interlocuteur :
« Pardonnez ma franchise, « Votre Excellence »,
mais vous avez « expérimenté » Notre Bien-Aimé Commandant ... » dit-il, sur le ton de la confidence
« Je ne vous le reproche aucunement, mais vous lui avez bien trop dévoilé vos « plans secrets »
et vous avez pu constater par vous-même qu'il est parfaitement incapable de comprendre
ce que « secret » ou « dissimulé » peut impliquer ... »
« J'ai donc paré au plus prudent et au plus urgent :
le mettre hors d'état de parler « à qui que ce soit », et surtout « de quoi que ce soit » durant une petite semaine.
Il vous suffira de lui décerner n'importe quel insigne de pacotille pour avoir vaillamment gardé le lit pendant ce laps de temps
et il pourrait même parvenir à oublier dans quelles circonstances il a été contraint de garder sa chambre .... »

« Bien » lâcha Martou en hochant la tête.