« Votre chat? Mais il n'y a pas de chat ici. »

« Ah bah ça alors! »

Un chat fantôme se matérialisa alors à travers la porte et dévisagea Vitam un instant:

« Vitam? J'arrive pas à en croire mes sens supra-naturel. Ton aura ne ment pas, même si quelque chose semble... différent... Mais... T'as piqué le corps de qui? »

« Vitam? »

L'ex-fantôme entendit la porte se déverrouiller puis s'ouvrir en grand, traversant le chat de nouveau, pour laisser percevoir les enfants de sa voisine qui l'observèrent avec de grands yeux ronds en mode "wouaaah" tandis que le félimpossible restait coi devant le corps bien vivant. Théo ajouta alors:

« Vous avez l'air de vous connaître. Je te laisse gérer ça, je serai au bar du coin, si tu me cherches, mi querida. »

Vitam avait joint ses deux mains devant sa bouche, comme si sa prière venait d'être exaucée.

« Oh CURLY, si tu savais... si tu savais à quel point je suis presque pas mécontente de te revoir ! »

Au cas où que le chat surnaturel aurait encore un doute sur son identité, pour sûr que cette gentille pique à son attention les dissiperait prestement. Cela maintenant dit, elle avait tourné sur regard sur Rosa, un sourire spontané aux lèvres.

« Et vous les enfants, Lupe, si vous savez à quel point je suis heureuse de vous retrouver ! On peut entrer ou bien on continue à rester planté là devant la porte ? »

Elle avait commencé à avancer ses bras en vue d'enlacer Rosa (à moins que ce soit CURLY ?) , mais fut retenue par son collègue qui cherchait à se faire la malle. D'une air mi-étonnée, mi-déçue, la nouvelle vivante lui avait demandé :

« Boh t'es sur Théo ? »

A peine avait-elle dit cela que son regard s'était brièvement tourné vers Lupe d'un air interrogateur avant de revenir sur le Baron.

« Kaïdo n'est pas avec toi? »

Lupe avait eu l'air d'espérer la présence de l'epeiste puis finalement fut déçue de le savoir absent. Elle haussa les épaules quand a la présence de Théo mais ce dernier refusa poliment:

« Non, non, j'insiste. J'ai une mauvaise influence sur les enfants. »

Et déjà, l'homme repartait par là où il était venu. Curly observa Vitam avec attention avant d'ecarquiller les yeux:

« Wow, C'est donc a ça que tu ressemblais? Bah rentre, rentre. Reste pas a la porte.

Les enfants, laissez la respirer! »

Les 3 enfants repartirent alors vers le salon tandis que le chat félin enchaînait:

« Je me suis dit que tu repasserai par ici... Et puis, comme ça, je peux surveiller et aider les petits, avec leurs petits problèmes... »

« Oh... Ok. A tout à l'heure alors ! »

Saluant une dernière fois le Baron avant de se retourner vers Lupe, la nouvelle vivante avait déclaré, non sans une certaine désinvolture :

« Bon bah... c'était Théo. » Avec une voix davantage neutre, elle avait ajouté : « Non il est pas avec moi mais tu sais comment il est depuis le temps, il part et revient comme il l'entend, un peu comme un chat, tiens. »

Et puisqu'on parlait de félins, son regard s'était tourné vers CURLY tandis qu'elle rentrait dans l'appartement.

« Hey mais comment tu sais qu'il s'agir de mon co... ah ouais c'est vrai la télépathie, j'avais presque oubliée. Faut dire que j'ai l'impression d'être partie une éternité... Tiens d'ailleurs c'est vrai ça, je suis parti depuis combien de temps ? Assez longtemps pour que tu te mettes à courir les rues en hurlant mon nom à en faire paniquer le voisinage, apparemment. »

Prenant place sur le canapé, ou plus exactement s'étant effondrée sur le canapé sans grande grâce, Vitam observait chacun des membres de la pièce avec un sourire satisfait.

« En tout cas, ça change rien au fait que je suis ravie de vous revoir ! Quoi de neuf au fait ?
...
Oh au fait, si le problème des petits est par rapport à l'école qu'ils ne s'en fassent pas, je crois que je viens de régler ça avant de venir ici ! »

Ou l'art de passer du coq à l'âne dans toute sa splendeur.

« Mouais... Faut vraiment que je lui parle à ce cabrón! »

La femme se raffaissa dans son siège et maugréa dans son coin pendant que Curly reprenait la main:

« Nan, c'est juste que je t'ai plus senti. Et c'est chelou comme sensation... Alors je me suis dit que peut-être tu te planquais. Et je suis venu chez toi parce que je me suis dit que ça serait le dernier endroit où on penserait à te chercher, si tu te planquais. Puis je suis tombé sur les mioches, avec leurs problèmes, et tu me connais, j'peux jamais dire non à une petite boule de peau. J'ai le coeur sur la patte...

Et non, leur souci ne vient pas de l'école. Enfin, pas que... Les enfants? »

Les garçons se regardèrent un instant avant de se tourner vers leur petite soeur qui soupira:

« C'est toujours moi... »

Achevant de soupirer une nouvelle fois, la petite fille sembla se concentrer puis se transforma en volute d'air, laissant tomber ses vêtements au sol. Rapidement, Rodrigo les récupéra et les disposa dans la pièce d'à coté. Vitam se retrouva donc face à une élémentaire d'air, de petite taille, qui parlait avec la voix de Rosa:

« C'est ça, notre problème... On a tous un truc différent et Rodrigo, c'est le feu... Et il s'est fâché à l'école et... »

Le petit frère grogna:

« Oh, ça va, c'est bon... »

« Cabrón ? Je ne sais pas ce que Kaido a encore fait mais... non je ne veux même pas savoir en fait, surtout que ça ne me regarde pas. »

Était-ce dû à un sursaut de maturité de la part de l'ex-fantôme ? Pas du tout : Vitam s'était promise depuis le dernier départ à durée indéterminée du rônin de ne plus se faire des cheveux blancs pour lui. D'autant plus que maintenant qu'elle était vivante, elle était à présent sujette aux cheveux blancs alors... il valait mieux éviter.
Laissant la mère de famille continuer à l'insulter de tous les noms pour peu que ça l'aide à passer de quelques manières que ce soit, Vitam se pencha alors sur le cas des enfants élémentaires.

« Oui, j'ai appris ce qu'il s’est passé. Mais autant vous devriez ne plus êtes embêtés par vos camarades d'école à l'avenir, autant ce n'est pas une excuse pour recommencer. Que ce soit volontaire ou non, peu importe : Ce qui me semble important dans l'immédiat, c'est qu'on trouve un moyen que pour que vous contrôliez vos capacités. »

Et à regarder l'une des filles se transformer en volutes d'air, il semblerait que certains parvenaient à mieux avoir conscience de leurs pouvoirs que d'autres. Cela dit, l'âge aidait sans doute en ce sens.

« Donc toi » elle désigna Rosa « c'est l'air. Rodrigo c'est le feu, puis Gabriella... c'est l'eau, c'est ça ? »

Le récapitulatif était certes peu utile, mais aidait l'immortelle à réfléchir... avant de se rendre compte qu'il serait difficile de trouver une salle d'entrainement capable de supporter le déchaînement de ces trois éléments. Mais si un tel lieu n'existait pas, pourquoi ne pas... mais oui, c'est tellement débile que ça pourrait marcher !

« Je sais ! Et si moi, je vous entraînais ?
Je sais ce que c'est que d'avoir des pouvoirs et en plus je connais les vôtres, alors je devrais ne pas les craindre et dans le cas contraire... ce n'est pas grave puisque je suis déjà morte ! Enfin morte... immortelle, si vous préférez.
Alors, vous en dites quoi ? Ce serait pas les cours les plus cool de l'univers ? »

« Grave. »

La réponse du garçon ne laissait pas de place au doute mais la mère posa tout de suite son veto:

« Hola, hola, hola, on va pas mettre la charrue avant les bœufs. On sait même pas si ça va rester... J'ai contacté la MMC mais ils sont surchargés avec l'apparition de tous les nouveaux... Bizarres. »

« Mais Mama! »
« Mais Mama! »
« Mais Mama! »

« Pas de mais qui tienne. Et puis, vous avez entendu Vitam, elle n'a pas d'endroit où elle pourrait vous aider à vous entraîner... Pas vrai, Vitam? »

Pas besoin d'être une fantôme doué de super-sens extra-sensoriels pour sentir l'inquiétude chez la mère de famille.

Vitam ne partageait pas les mêmes inquiétudes de Lupe, et tenait à le faire savoir parce que se taire n'était définitivement pas dans sa nature !

« Et si ça reste ? Et si la MMC ne vient pas, on fait qui ? On reste les bras croisés en attendant le prochain incendie, tsunami ou cyclone de force 5 ? Moi je dis qu'il vaut mieux prévenir que guérir, mais c'est vrai que pour trouver un lieu d'entrainement pas risqué dans le coin... »

Au plus grand dam de la mère de famille l'ex-fantôme afficha un sourire, prélude habituelle d'une solution aussi fugace que foireuse.

« ...sinon on peut toujours voyager entre les plans. En cherchant un peu, on trouve toujours ce qu'on veut au sein des plans. Au pire, un demi-plan fera tout aussi bien l'affaire ! »

En entendant le drôle de plan de Vitam, la mère s'était redressée:

« Entre les plans? Mais tu es folle! Oh... »

La femme s'était rassise précipitamment, se tenant le ventre, les enfants visiblement inquiets pour leur mère allèrent l'entourer. Ce fut Curly qui enchaîna:

« C'est pour ça qu'elle voulait voir Kaïdo... La p'tite graîne germe et faut croire qu'elle a choppé l'élément qui manquait à ses frères et sœurs... Enfin, c'est ce que j'ai cru voir. C'est chelou de traverser quelqu'un. Enfin, un humain, quoi...  »

En réaction des indications de CURLY, Vitam ne put s'empêcher de laisser échapper entre ses dents : « Han l'espèce de [cette partie des propos de l'ex-fantôme est aimablement censurée par Censure-Man, le méta politiquement correct de l'Amérique du futur. Censure-Man, c'est pas moins d'1m80 de super-héros au service de votre confort de lecteur. Là où Censure-Man passe, les mauvaises paroles trépassent !] Mais je vais le tuer et le re-tuer jusqu'à ce qu'il soit mort ! »

D'autant plus que si le rônin passait son temps à caser des polichinelles dans les tiroirs de chaque femme croisant sa route, cela n'allait pas aider la nouvelle vivante à l'oublier. En tout cas, qu'il ne compte plus sur elle pour lui annoncer sa nouvelle paternité. Ou plutôt supposée paternité, puisque les dires du chat spectral étaient pour ainsi dire préoccupants...

« Donc la terre ?
Euh... ça fait combien de temps ? Je suis loin d'être une spécialiste en la matière mais... là on devrait aller à l'hosto, non ? »

...car aux dernières nouvelles, les humaines supportent assez mal de mettre au monde un tas de graviers de la taille d'un bébé. Y compris prématuré.

« L'envie est là mais elle a pas de mutuelle pour couvrir ce genre de choses. Quand à savoir de quand ça date, si j'ai bien compris, elle est sortie un soir avec des amies à elle, Kaïdo a gardé les gosses, elle est rentrée passablement joyeuse et...

Je vais pas te faire un dessin sur ce qu'il a pu se produire après... »

Le chat attendit un instant avant d'ajouter:

« C'est pas un caillou en permanence mais tu sais, les autres ont déjà du mal à contrôler leurs pouvoirs... Alors un foetus... Bref, que du bonheur, quoi.

Sinon, tu crèches où, maintenant? »

« Ah merde... » déclara Vitam, parce que ça résumait bien le tout et qu'il était de toute façon inutile de rajouter davantage d'insultes sur celles qu'elle avait déjà proférées. « Je vais voir ce que je peux faire et essayer de trouver une solution. »

A la question de CURLY concernant son domicile, l'ex-fantôme n'avait pas tellement envie de lui avouer avoir passé quelques nuits chez une famille de chasseurs de morts-vivants, aussi statua t-elle, à défaut de complètement lui mentir, que de lui donner sa version de la vérité.

« Euh... pour l'instant je squatte, mais j'ai des pistes pour me trouver quelque chose de plus... disons définitif » répond Vitam, en faisant allusion au "tuyau donné par sa voix intérieure" . « Faut juste que je mette la main sur un téléphone, ce qui ne devrait pas être dur ! »

« Comment ça un lapin ??? Mais qu'il aille s'empaler sur une croix rouillée, en plus je ne sais même pas de qui tu... »

Et bien sur, ce fut le moment qu’avait choisi CURLY pour faire une disparition ninja. Après avoir grommelé quelques instants contre ce fieffé chat diabolique, Vitam demanda à la famille :

« Je peux piquer votre tel deux minutes ? »

A la suite de quoi, l'ex-morte composa le numéro soufflé par Mérénith afin de trouver un logement. Puis pourquoi pas une solution aux soucis financiers de Lupe, aussi. Toutefois, elle grommelait toujours car elle s'attendait à tomber sur son golden boy de "frère" à l'autre bout du fil... et ça aussi, ça ne la mettait pas vraiment en joie.

Evidemment qu'elle allait directement tomber sur lui... évidemment !
Mais ne connaissant pas -encore- de solutions rapides et efficaces pour obtenir de l'argent, Vitam avait opté pour ce qui lui semblait être la solution la moins pire parmi celles qu'elle avait en tête... Puis surtout, Lupe faisait parti des rares personnes pour qui la nouvelle vivante était prête à mettre sa fierté temporairement en veilleuse. Et puisque le golden boy, sans doute fidèle à l'adage stipulant que le temps c'est de l'argent, faisait dans le laconique en allant à l’essentiel, l'ex-fantôme ne se fit guère prier pour faire de même.

« Merenith m'a conseillée de t’appeler. Je dois acheter un immeuble et une mutuelle en béton. Et pour ça on doit bien avoir un compte, une banque en Suisse ou un truc comme ça, non ? »

De loin, on pouvait voir Vitam faire les quatre cents pas et parler tout en levant les yeux au ciel car faute de pouvoir se permettre de soupirer depuis le combiné, elle n'en pensait pas moins : Moins cette conversation durerait, mieux elle se porterait !

« Oh, nous avons un tas d'immeubles, dans notre portefeuille immobilier. Comme celui où tu vivais avant, a LA. Mais nous pouvons en acheter d'autres, au besoin.

Dis moi, de quoi as tu besoin? Où ? Quel niveau de sécurité ? Pour la mutuelle, il va falloir te recréer une identité, vu que la précédente doit sûrement être portée disparue a Barrow. Mais nous pouvons faire ça, en attendant, on réglera ça en cash si besoin était, petite soeur. »

La voix était cordiale, limite sympathique.

Son frère qui se montrait cordial ? Limite sympathique ? Ça cachait surement quelque chose de déplaisant par la suite, mais Vitam avait-elle d'autres choix que de s'en remettre à lui ? Pas vraiment.
Jouant néanmoins le jeu, elle tente néanmoins de faire l'effort de rester polie. En plus c'était dans sa nature d'être courtoise, alors ce n'est pas comme si elle devait -trop- se forcer.

« Oh, l'immeuble où je créchais à Pasadena est très bien, pas besoin de plus. Il te faut l'adresse ?
Et pas besoin de gardes du corps non plus : Pour ça, je me débrouille très bien toute seule... et tu ne dois pas être sans savoir que je suis du genre à tenir à ma tranquillité. »

Nul message à caractère passif/agressif derrière cette dernière déclaration, car ce serait prêter de mesquines intentions à Vitam. Et autant elle fait souvent dans la moquerie, autant elle ne fais jamais dans la méchanceté (ou alors sans faire exprès).
En tout cas son pas commence à être moins nerveux, ne serait-ce que parce que ce départ de conversation se passe un peu mieux que prévu. A moins que la nouvelle vivante ne soit déjà en train de songer au nom ou à l'apparence de sa future identité ?

« Va pour le cash, ce sera plus pratique en attendant que je me trouve un nouveau moi. »

Est-ce que cela allait être aussi simple ? Certainement pas car même en ayant foi en l'espèce humaine, la nouvelle vivante avait suffisamment vécue dans ce monde pour savoir que rien n'est jamais vraiment gratuit.

Evidemment qu'il allait demander quelque chose en échange, car son frère aussi est très bien placé pour savoir que rien n'est jamais gratuit dans ce monde !

Et alors que ses yeux se froncent et que sa voix s'assombrit quelque peu, Vitam, se retranche derrière une certaine méfiance.

« ...Si tu la veux, pourquoi tu ne m'as pas empêchée de partir avec ?
Et pourquoi je ne peux pas la garder ? T'as peur que je fasse des conneries avec ?
Puis que je le veuille ou non, cette boite représente une partie de moi-même... donc j'espère qu'il y a une raison en béton armée derrière pour que je consente à te la laisser. »