Un an après l'annonce de sa sortie j'en suis venu à étudier
ce nouvel univers Made in France suite à une aventure proposée par un MJ IRL. L'aventure a été depuis consommée. Le dépaysement est total et ce nouveau cadre apporte des nouveautés intéressantes. L'univers semble sympa et cohérent, ce n'est pas un fourre tout, il est bien particulier. Il s'agit en gros d'un
Water World à la sauce Med-Fan.
Suite à une grosse catastrophe apocalyptique tout est recouvert d'eau sauf deux continents d'une surface équivalente à l'Australie. L'un des deux est sauvage est mystérieux, l'autre (la DANKHÉLIE) est le siège principal des aventures qui attendent les PJ. Signature de cet univers, ce continent est fracturé en une poignée de gros morceaux retenus entre eux par les Arches, d'immenses ponts de création divine. Entre ces fractures circulent donc des fleuves larges de plusieurs kilomètres. Chargés de l'énergie divine en partie responsable de ces fractures, ces fleuves rendent la magie à proximité instable. Bref à priori j'aime bien et en bonus c'est un produit bien de chez nous.
Quelles sont les spécificités de
Broken World ? Citons entre autres :
*L’entropie et les lois « brisées » d’un monde abîmé, mais plein d’espoir.
*Sa magie aquamantique, qui permet de gérer, dans une moindre mesure ce chaos.
*Ses Arches, « véritables cataplasmes » du monde.
*Son panthéon unique et fouillé, apportant de nouveaux domaines et voies aux prêtres.
*Ses nouvelles races surprenantes, et les autres remaniées.
*Sa résurrection difficile, qui emmènera les héros à œuvrer souvent « sans filet ».
*Son axe Chaos/Loi (comme dans Elric) supplantant le Bien/Mal classique, et atténuant l’éventuel manichéisme que l’on retrouve dans les univers de fantasy.
*Ses Nuits grises, où les morts se relèvent et les nécromants voient leur pouvoir augmenter.
*La démesure de ses cités-états et de certains de ses peuples, nous plongeant dans les sources mêmes de la high fantasy.
*Le Serment de ses nains à leur dieu de ne pas user de magie profane.
*La richesse de l’histoire du Monde brisé et son côté évolutif.
*La possibilité d’être un univers prévu autant pour les aventures maritimes que terrestres,
*L’aspect immersif de ses ouvrages et une qualité toujours plus élevée dans les illustrations.
Je reprendrais ce qui a globalement déjà été dit sur d'autres sites :
Citer :
La magie : c'est un élément très important et très structurant de Broken World. Cependant son usage semble être rendu beaucoup plus difficile. Pour deux raisons : s'il est à proximité des "fleuves", le magicien a une probabilité non-négligeable de se faire exploser ainsi que son équipe s'il n'est pas prudent. La seconde raison : pour des raisons historiques relatives à une cabale de mages noirs (les Sorgaliens) ayant déclenché l'apocalypse en entrant en guerre contre les dieux eux-même, les magiciens ne sont pas tenus en odeur de sainteté par le reste de la population. Voir même une franche hostilité. Donc en tant que MJ, il faudra faire particulièrement attention à nos amis joueurs/magiciens. A priori, ce n'est pas un problème : ça limitera le syndrome "mago/lance-missile à papattes". D'ailleurs, d'un point de vue RP, il n'est pas mauvais que le joueur ait le sentiment que la magie est difficile à pratiquer. Toutefois l'ensorceleur a l'air d'avoir été chouchouté. Mystiques sauvages "connectés" aux fleuves grâce à l'art de l'aquamancie, ils en sont devenus les représentants et donc les seuls à pouvoir maîtriser la magie à proximité. Antithèse inculte mais écolo des mages urbains, dont les vastes connaissances leurs ont permis de faire un bras de fer avec les divinités, tout le monde les aimes ou ont besoin d'eux.
La résurrection : elle est visiblement dans le collimateur des concepteurs de Broken World : elle est plus compliquée. Mais tout ce qui peut rendre la résurrection difficile est BON. La résurrection supprime la peur et la réflexion chez les joueurs et du coup leur implication dans l'histoire et leur personnage.
La nécromancie : Dans la chevelure d’Octia, la déesse de la nuit et des mers, on peut voir deux lunes. Uranie est son oeil droit, Cendre, le dieu mortvivant, son oeil gauche. Parfois, ce dernier se déplace et occulte la première lune. Quand cette éclipse arrive, Cendre devient plus fort et la mort brille au-dessus du monde. Les nécromants voient leurs pouvoirs augmentés et tous les morts du monde se relèvent. Ces nuits particulières sont appelées Nuits Grises. C’est pour cela que, depuis la première d’entre elles, les peuples de la création n’enterrent plus leurs morts, mais les brûlent. Personne ne veut d’un monde infesté de goules, de squelettes et de zombis ! Les nécromanciens auront donc bien du mal à trouver de quoi justifier leurs pouvoirs, mais il suffit d'un seul cimetière oublié, une crypte que personne ne connaissait et voilà le retour de La nuit des morts-vivants pour ceux habitant à proximité. Autant dire que l'autre terre, appelé du coup Terre Grise, doit en être infestée.
La géographie : L'île principale contient plus d'une douzaine de royaumes. Chacun d'eux fait contraste avec son voisin. Les voyageurs pourront en effet s’extasier devant la grandeur des Cités-Lunes Sélénîs, dont on dit qu’elles sont élevées pour des dieux avec leurs folles constructions et leurs palais démesurés ; ou se perdre dans les connaissances fabuleuses de Grimoire, la cité dont les premières fondations, dit-on, remontent au deuxième Âge ; ou s’évader dans les parfums et les délices d’Extase, la ville où il est possible de connaître la félicité avant même de mourir ; ou bien assister et même participer aux combats démesurés des arènes de Neuf-Pétales, la dernière construction du mythique et disparu peuple des Alhens ; ou bien encore entrer à Cairn, la cité de la chair, et en ressortir plus forts, dotés d’attributs que la nature vous a refusés. Mais les plus sages d’entre les pèlerins voudront peut-être méditer à Aral-Fazir, la cité du désert, construite par les premières familles de nomades survivantes, ou parcourir nu-pieds les Allées de l’Équilibre à Justice afin de mesurer le poids de leurs péchés… Une abondance de matériel pour nous aider immerger nos joueurs dans ce monde et des idées de scénarios à la pelle.
Les ajustements de niveaux : un des points forts de Pathfinder c'est justement d'avoir pratiquement réussi à se débarrasser de ce boulet noir qui a encombré D&D pendant des années. De nombreux MJ le diront, les ajustements de niveau c'est le mal ! Toutes les races exotiques de Pathfinder ont été retravaillées dans ce but. C'est le gros point noir de BW (et peut être le seul), dans une inconscience collective ils ont rétabli les ajustements de niveau. Pire encore, des races de base en font les frais, ce qui est intolérable !
Les Nains : ils sont anti-magie profane, un pacte et une malédiction les empêche d'en user. Mais du coup en revanche ils bénéficient d'une RM. Malheureusement ils le paient cher car ils font désormais parti des races à ajustement de niveau.
Tous les aspects positifs ayant été évoqués je m'attarderais sur les quelques éléments sur lesquels le groupe a tiqué. Rien de grave je pense mais là où nous sommes tombé d'accord c'est qu'
un nouvel univers qui se veut compatible avec les règles Pathfinder ne devrait surtout pas modifier les mécaniques des races de base tel quelles étaient à l'origine dans les règles de base, bien qu'il soit normal de modifier leur BG afin qu'il s'accorde avec l'univers en question (comme interdire la magie aux nains, dire qu'une race ou une classe est aimée ou détestée).
Au pire on peut apporter de nouveaux traits alternatifs tout en suggérant fortement de les utiliser, mais
une déco se doit de rester une déco et ne peut se permettre de modifier autre chose que la mécanique qui est directement en rapport avec elle même (comme les lieux où la magie se déglingue). Créer une variante de race comme les
Elfes des étoiles, pourquoi pas. C'est mieux accepté que de "remasteriser" les races dont on s'est familiarisé (sinon à force de jouer dans des univers différents on finit par s'y perdre). Et encore à bien y réfléchir d'ailleurs, les elfes des étoiles ressemblent un peu trop aux Aquatiques.
Créer de nouvelles races pour rendre un univers plus attrayant est généralement bien vu,
à condition d'éviter les homonymes. Les créateurs auraient pu faire un minimum de recherches (ou simplement visiter
Pathfinder-fr et cliquer sur le bestiaire) avant de nommer leurs créatures, histoire de ne pas utiliser un nom déjà pris par un monstre.
Ainsi, si les
Serkans tranchent avec les autres races d'hommes-lézards (hommes-lézards, troglodytes, asabis, vertécailles) en se rapprochant davantage de l'héloderme avec sa taille
P et ses glandes empoisonnées, devenant ainsi LA race typique de
Broken World, les autres races ne semblent pas avoir eu la chance d'un peaufinage aussi soigné.
On a donc une race inspirée des
Gianes (fées protectrices de Sardaigne affiliées aux génies), qui semble être un croisement entre une océanide et un djinn, nommée grossièrement :
Djinn ?!... en zappant totalement que c'était déjà le nom d'une créature connue du bestiaire. Ou bien une race d'
Ogres Nains née des manipulations des sorgaliens sur les ogres, qui s'appelle aussi :
Ogre ?! Ce dernier est aussi malheureusement affublé d'un ajustement de niveau qui n'est pas justifié (20 PR). Il est précisé à son sujet que
« bien que de taille M, l’ogre est considéré comme de taille G en ce qui concerne le maniement des armes et les objets qu’il peut porter, les bonus contre le croc-en-jambe ou la bousculade ainsi que pour son allonge et son espace occupé ». Je sais pas vous mais moi j'appelle ça tout bonnement une créature de taille
G, faut pas être hypocrite. C'est vraiment dommage de s'être planté sur le plus facile après avoir réussi à sortir deux races originales.
Les
Orkanans auraient pu s'appeler Asgardiens ou Goliaths (
Faerune) que cela n'aurait surpris personne. Autant ce côté vikings
Made in Astérix les rend un brin exotiques, autant passé quelques niveaux plus rien ne les différencie d'un viking humain normal, en apparence ou dans les stats.
Dans l'aventure qui nous attendait nous avons croisé des djinns, des orgres et des ogrelins (le MJ utilise les bestiaires
Pathfinder, logique). Du coup quand l'un a parlé de jouer un ogre (la version
Broken World) ou moi quand je me suis intéressé à la race des djinns (la version
Broken World), tout de suite le cerveau du MJ s'est mis à fumer et il est resté perplexe. Si les créateurs me lisent : n'est-il pas possible de renommer ces races et modifier leurs BG en conséquence ? Ne serait-ce que légèrement comme Ogre nain et demi-Djinn ? Ogrillon et Giane ? Ogre gris et Djinn bleu ou Maritin (Djinn d'eau) ? Cela permettrait aussi de pouvoir les jouer dans d'autres mondes (maison ou non) peuplés de tous les monstres des bestiaires classiques.
Pour les monstres, si des joueurs peuvent investir dans un nouvel univers, rare sont ceux qui investiront dans une nouvelle catégorie parallèle de bestiaires (donc heureusement que pour l’instant les créateurs de BW n’ont pas encore édité les leurs malgré leur annonce d'il y a un an, ça aurait été une terrible erreur). Toutefois il est d'usage lorsqu'on sort un supplément sur un lieu d'y introduire de nouveaux monstres habitants ce lieu. Rien de plus normal à ce moment là d'en profiter pour en glisser quelques uns et même éventuellement de nouvelles classes. Mais j'ai remarqué qu'il est assez mal vu d'aller au-delà.
En résumé je dirais que le décor est très sympa et immersif mais les races jouables "classiques" avec leurs bugs un peu moins. Je conseillerais donc de l'utiliser avec les races de
Pathfinder en y distillant les cinq nouvelles races de
Broken World : ajoutant les serkans, personnalisant quelque peu les orkanans ainsi que les elfes des étoiles et en renommant les deux autres. Sinon à moins de ne faire que du BW, on risque de noyer les joueurs dans les variantes.
Et vous qu'en pensez vous ? Avez vous un avis sur ce phénomène ?