Reprise presque intégrale de notre rencontre à Ceylan:
Regardez et écoutez! Vous avez de choisis pour vous opposer aux sombres desseins d'une secte diabolique. Concentrez-vous sur les images que vous verrez défiler. Vous serez l'instrument de la lutte, opposant les partisans d'un monde débarrassé de tous les vices engendrés par l'animalité suprême et les sectateurs de Kâli la Noire, dernière représentation de la bestialité inhérente à chaque culte rendu à la Terre nourricière. Méfiez-vous car ils sont animés d'une haine féroce et poussés par une soif débordante de richesse et de puissance. Ne vous laissez pas enivrer par leurs belles promesses, concentrez-vous sur votre mission que nous, les neufs sages immortels, allons vous confier.
Voilà maintenant plusieurs semaines que vous transportez dans vos bagages une statuette brûle-parfum représentant la déesse Kâli. Cet objet vous a été confié à Paris par Paul D'Estremont, chef du service de contre-espionnage de la République Française. Cet homme, en déclenchant ce formidable voyage à travers les mers, ne savait pas ce qu'il faisait. Il a mené cette jeune nation fière et autoritaire au bord du déclenchement d'un cataclysme mondial qui verra le mal régner sur une terre dévastée.
Les cultistes ont tout mis en œuvre pour récupérer la statuette de Kâli. En Égypte, ils ont bien failli y arriver. Ils ont lâché à vos trousses l'un de leurs serviteurs les plus dévoués : Zia Sârkhan. Cet Iranien, de par sa profession de commerçant, est amené à beaucoup voyager. Ils l'utilisent pour surveiller tous leurs réseaux. C'est ainsi qu'il vous a rencontrés à bord du "Cyrus". La secte recherchait activement la statuette de Kâli. Comme elle dégage une aura maléfique spéciale, Zia Sârkhan l'a sentie et a surpris l'espionne allemande lorsqu'elle fouillait vos affaires. Depuis ce jour, ils n'ont pas cessé de vous suivre, tentant dès que l'occasion le permettait de s'emparer du brûle-parfum.
Toutefois, ils ne peuvent pas encore agir au grand jour et doivent être prudents lorsqu'ils décident de passer à l'action. Le pouvoir impérial britannique a l'habitude de trouver et détruire les sectes.
Nous avons manipulé les Français et les Anglais pour leur inspirer la fable que vous avez été empoisonnés par les Allemands, plus précisément a Sainte Vehme, confrérie militaire au service de l'Empire Allemand. Les sectateurs de Kâli ont infiltré les services secrets allemands.
Boudart, le chimiste, n'a pu terminer ses travaux sur ce gaz de combat. En leurrant l'Allemagne, D'Estremont voulait gagner du temps et pousser les partisans de La vieille Prusse à sortir de l'ombre. L'Angleterre lui a prêté main-forte et vous a emmenés jusqu'en Égypte. Pour Paul D'Estremont, la statuette, Le voile de Kâli, le temple de Pandu-Lena ne sont que supercheries d'espions. Il fallait coûte que coûte que vous arriviez jusqu'à Philae en Égypte et que Cheikh Ahmed vous envoie à nous.
Mais grâce à votre courage et votre opiniâtreté, vous avez réussi à venir jusqu'ici, sous la tombe de Parakrama, l'un des rois les plus prestigieux de Ceylan. Nous sommes l'essence divine de neuf sages ayant vécu au cours des siècles passés. Chacun d'entre eux nous a protégé, éduqué et enseveli un glorieux personnage qui a œuvré pour le bien de l'Humanité. Vous ne devez pas connaître nos noms car vous êtes de simples mortels et les serviteurs de Kâli, s'ils vous capturent, pourraient l'apprendre et dans ce cas, plus rien ne les arrêterait. Nous vous irradions de notre lumière, votre cœur s'emplit de chaleur, votre corps retrouve sa vigueur et votre âme se fortifie. »
La scène se précise. Un soldat, habillé en croisé, poursuit un adolescent dans une ville orientale. L'adolescent est revêtu d'une armure de cuir et porte une lance. Il le rattrape, lui arrache sa lance et s’apprête à le transpercer de son épée.
Vous avez la certitude de pouvoir agir directement. Mais comment ?
Le croisé est convaincu d'épargner l'adolescent, à la lumière de la lune et des incendies des synagogues.
Il lui arrache ses armes, son armure et lui déclare
« Tu es mon prisonnier ! Je vais pouvoir tirer un bon prix de toi auprès des marchands d'esclave !
Je ne sais pourquoi, nous avons tous vu rouge et tué sans distinction ceux qui souillaient la ville du Christ, en ce 14 juillet de l'an du Seigneur 1099.
Je vais aller voir mon suzerain Raymond de Toulouse pour faire arrêter ce massacre ! »
La scène devient alors floue et vous vous retrouvez dans un autre décor...
Puis, le tourbillon effréné de l'Histoire vous entraîne de nouveau dans sa course folle. Plus de crimes, plus de scènes de batailles, des monstres, des laissés pour compte, tous ceux que la nature a défavorisé, des êtres grossiers et disgracieux vont et viennent sur la scène du passé, grotesque parade d'infortunés infirmes. Boiteux, mutilés, estropiés, aveugles, lépreux, galeux, mendiants, débiles et scrofuleux exhibent leurs plaies et leurs différences sous le nez de passants scandalisés. La lie de l'humanité ose s'exposer au grand jour. Cette frange du peuple rejetée par la société secoue votre conscience. La cathédrale Notre-Dame se profile près de cette cour des Miracles.
Enfin, c'est au tour des êtres maléfiques d'apparaître. Vampires, loups-garous. sorciers, goules et autres créatures démoniaques se joignent à la farandole infernale. Souvent, ils se confondent avec ces miséreux. Rejetés eux-aussi par ces gens "normatifs', on comprend aisément qu'ils se soient réfugiés dans leurs vices ou leurs handicaps comme pour affirmer et assumer une différence monstrueuse. Enfin, ces bonnes gens les qualifient comme tel...
Rejetés par tous, ces êtres égarés trouvent dans le crime une place et une fonction sociales. Rongés par la rancœur, l'ivresse et la volupté du crime les gagnent quand ils peuvent se venger de leurs difformités sur d'innocentes victimes.
De nouveau, l'image est plus nette, plus réelle. Un homme en haillons est poursuivi par une bande de paysans armés. La forêt est dense et les rayons de la lune ont du mal à percer l'épais feuillage. Un prêtre vociférant conduit la chasse. De sa voix puissante, il excite les chiens. Bientôt, à bout de souffle, la victime s'écroule lourdement dans un buisson tout proche. Cet homme paraît la soixantaine. Blême, il respire avec peine.
Vous voyez une jeune fille, charbonnière de son état, entrer dans le buisson pendant que des chiens foncent sur l'homme de l'autre côté. Malheureusement, vous n'avez pas l'usage de vos jambes. Cris de frayeur et de douleur de l'adolescente, grognements des chiens, hurlement d'un vieil homme, hors de votre vue... Vous reprenez contrôle de vos corps pour vous joindre aux paysans et entrer dans le bosquet. La jeune fille est morte, lacérée. Le vieil homme, couteau à la main, se bat contre les 2 chiens.
Un paysan, peut-être le maître des chiens, crie :
« Vil loup-garou ! Tu as tué la jeune Pernelle ! Sois maudit ! »
Tuer son ou ses agresseurs ne ramènera malheureusement pas la jeune fille à la vie, mais les paysans semblent vouloir en découdre. Que faites-vous ?
« Je suis Charlotte, Marquise de Trencavel ! »
Les paysans s'inclinent devant la dame, qui subtilement acquiert des vêtements de voyage de qualité, ainsi que sa suite.
Décidemment, ce rêve est ... féerique.
Chastel rétorque :
« Oc, je vais obéir à la suzeraine de mon maître. La naissance prime sur tout le reste en ce bas monde ! »
Vous remarquez une petite pointe de dépit. Dans 35 ans, sera-t-il de ceux qui brûleront châteaux ?
L'aristocratie bourgeoise dont vous faîtes tous partie va-t-elle également disparaître un jour dans les brumes de l'Histoire comme les perruques poudrées aux mains des Sans Culottes ?
Ces fameuses brumes du temps pour ramènent alors en ce bon vieux 1900...
Les voix vous demandent
« Quels enseignements gardez-vous de vos aventures à Jérusalem en 1099 et en Gévaudan en 1766 ? »
Adrien se tourne vers les autres, perdus dans leurs réflexions et, avec pas mal d'hésitations :
« "La permanence du fanatisme ? Les dégâts qu'il provoque ? La peur comme moteur et danger ? La nécessité de lutter contre l'injustice ? " »
Charlotte : « La Bienveillance et la Pitié ont souvent eu besoin d'être rappelées pour pouvoir s'appliquer et s'exprimer ...
Leurs défenseurs ne doivent jamais rester muets, c'est un rempart efficace contre la sauvagerie. »
Les voix sont satisfaites.
« Vous êtes les nouveaux Maîtres du Monde. Auto-proclamés ou pas, cela vous donne des responsabilités.
Certains colonialistes appellent cela 'Le Fardeau de l'Homme Blanc'.
Usez de vos nouveaux pouvoirs à bon escient, en vous souvenant que les apparences sont parfois trompeuses et que vos actions peuvent avoir des incidences sur le futur ! »
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