Le demi-orque rejoignit sa chambre avec son loup

« Ça me va. Faudra prévoir des trajets, voir les bourgades aux environs, ce genre de chose... »

Le chevalier étouffa un baillement:

« Bon, c'est pas tout ça mais il y a une grosse journée qui nous attend, demain. Bonne nuit. »

« Je me joindrais à ceux qui se rendent à la bibliothèque, si cela peut aider. » déclara la déva. « Je ne pense pas que les préparatifs du voyage requièrent beaucoup d'attention de notre part, tandis qu'une personne de plus à fouiller parmi les livres pourrait se révéler utile. »

Elle garda pour elle les sentiments mêlés que lui inspirait le plus souvent ce genre d'immersion dans les archives. En tant que témoin vivant de périodes parfois fort reculées, elle jouissait d'un avantage pour s'orienter dans ce type de recherches, étant plus capable que d'autres de saisir au vol une allusion qui resterait obscure à d'autres. Mais cet avantage tendait à être un peu contrebalancé par le temps perdu en réactions aux différences parfois fort grandes entre la mise en récit "historique" et la réalité des faits auxquels elle avait assisté - un décalage qui, selon les cas, l'irritait ou l'amusait, la laissait songeuse ou tout simplement perplexe.

Pour la première fois depuis fort longtemps, le sommeil des héros ne fut pas perturbé par d'oniriques messages divins. Et si certains rêvèrent encore de Dyrnaël, c'est probablement que les charmes et la gentillesse de la jeune femme rencontrée la veille ne les avait pas laissés indifférents...

Berul, Iahn et Kayah se levèrent avant l'aube, rappelèrent leur intention de se rendre à la bibliothèque de Cennuroth, et laissèrent l'opportunité aux autres de les accompagner s'ils le souhaitaient. Certains moines matinaux étaient déjà levés, mais ils ne croisèrent pas Dyrnaël en descendant dans la cour. Le petit groupe des studieux quitta finalement le monastère.

Ils traversèrent le quartier des cultes mineures et remontèrent vers les hauteurs de la ville. Le niveau de vie semblait progresser avec l'altitude. Plus ils s'éloignaient des docks et quartiers pauvres, et plus la misère s'estompait au profit de signes extérieurs de prospérité.

Le Prince dragon, le vizir Largos, et un certain nombre de privilégiés habitaient le Palais de Cennuroth. Le Palais et le quartier qui l’abritait constituaient le paroxysme de la richesse et du pouvoir. Mais les héros n'auraient pas besoin de s'aventurer jusque-là pour trouver la Grande Bibliothèque. Elle était accessible au public et située dans le quartier administratif de la ville.

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Précisez-moi si qui quelqu'un d'autre accompagne Berul, Iahn et Kayak. Ceux qui veulent peuvent lancer un jet de Perception. Sinon j'utiliserai votre Perception passive.
Les autres, si vous avez des choses particulières à faire pour les préparatifs, manifestez-vous également.

Alors qu'ils remontaient vers les hauts quartiers de la ville, Kayah ne pouvait s'empêcher de regarder autour d'elle. Elle craignait en particulier de retomber sur les mêmes gardes qu'ils avaient croisés, la veille, à peu près en même temps que la bande de brigands, avant de laisser les corps de ces derniers dans une ruelle un peu plus loin, où ils avaient forcément dû être retrouvés depuis. Certes, dans l'improbable éventualité où les autorités corrompues de Cennuroth se seraient assez souciées du sort de quelques malfrats pour diligenter une enquête, la présence de Magold parmi eux aurait probablement suffit à les conduire jusqu'au temple d'Ilmater. La chose n'ayant pas eu lieu, le risque ne semblait pas bien grand. Néanmoins, la déva se tenait sur ses gardes, toute complication pouvant se révéler problématique pour un emploi du temps qui s'annonçait assez serré dans les semaines à venir. Et la cité avait prouvé qu'elle pouvait être une source de complications de bien des sortes.

Iahn avait les yeux cernés lorsqu'il se réveilla. Il avait passé quelques heures la veille à consigner par écrit les faits saillants de cette extraordinaire journée. Avec l'anticipation d'un réveil hâtif, son anxiété n'avait pas contribué à un sommeil profond.

Dans le calme du matin, il grimpait en silence les côtes de la ville vers la bibliothèque. Il aurait bien avalé quelque chose et il trouva dans les replis de son manteau, quelques biscuits secs qu'il fit passer avec un peu de vin dilué.

Arrasto passa la nuit à méditer pendant sa transe. Il profita de la fraîcheur du matin pour s’entraîner aux mouvement des heures avec son épée. Il décrivit des cercles de combat gracieux tout en travaillant sa souplesse.

Il salua ses nouveaux compagnons qui allaient à la bibliothèque.

« Évitez les ennuis et que les Arcanes vous protègent. Ne vous inquiétez pas je resterai près de Dynaël dés qu'elle se présentera. »

Arrasto fini son entrainement puis allât se purifier aux bains. Il attendit Dynaël pour aller manger avec elle et assurer sa protection rapproché.

En traversant la ville, Berul, Iahn et Kayah restèrent attentifs à l'activité matinale qui démarrait avec les premières lueurs du soleil.

Sur la place d'un petit marché où les stands commençaient à s'installer, ils entendirent quelques ragots. Il était notamment question d'un combat violent et de plusieurs morts pendant la nuit, près de l'auberge de l'Idole qui danse. On racontait que des étrangers seraient responsables. On se demandait s'ils servaient la cause d'un Prince dragon rival de Cennoruth. On conjecturait que la Garde allait rechercher les responsables...

Les trois aventuriers redoublèrent de prudence. Ils étaient assez reconnaissables, surtout en présence de Kayah : ce n'était pas tous les jour qu'on pouvait croiser une déva à Cennuroth.
Cette dernière était encore davantage sur le qui-vive et à l’affût de toute menace. A deux reprises, elle crut apercevoir du coin l'oeil la silhouette d'un homme vêtu de gris, qui semblait les suivre à bonne distance. Mais sitôt qu'elle se retournait ou revenait sur ses pas pour confirmer ses soupçons, la silhouette disparaissait immédiatement dans les méandres des ruelles...

Puis, ils atteignirent la Grande Bibliothèque. Il s'agissait d'un ensemble de bâtiments juxtaposés, en pierre blanche, d'allure plutôt austère, n'ayant que très peu d'ouvertures. Des hallebardiers de la Garde de Cennuroth était déjà en faction.

Trois membres de la Guilde des Scribes se tenaient devant les portes principales. Ils étaient sans doute arrivés quelques instants auparavant à peine. L'un des scribes était un gnome. Il faisait tourner une grosse clé dans les serrures des grandes portes. Le second scribe, un homme grand, portait un masque sur le visage. Il poussa à deux mains le lourd battant dès que son collègue l'eut déverrouillé. Le troisième scribe était un vieil homme à la longue barbe blanche. Il attendait simplement avant d'entrer que les deux autres lui ouvrent le passage.

Berul resta quelques instants en contemplation devant la façade du bâtiment.

« Magnifique, n'est ce pas ? »

Ses yeux courraient sur les gravures ornant la porte tandis qu'il attendait patiemment que les trois scribes finissent l'ouverture.

« Oui. Splendide. » ajouta Iahn d'un ton plutôt détaché. Il leva ensuite les yeux vers la facade que contemplait Berul.

« Ces murs pourraient certainement raconter de bien intrigantes histoires, mais pour l'heure, il faudra se contenter des écrits protégés par ces pierres. »

Au temple.

Rasan avait profité de sa nuit pleinement et était resté au lit une fois les autres partis vers la bibliothèque. Finissant finalement par se lever, il alla dans la cour pour y pratiquer quelques exercices physiques avant d'aller s'occuper de sa monture et proposer son aide dans le choix de bons chevaux pour le voyage qui les attendait.

Au temple

Lorsque la porte de la chambre du rodeur s'ouvrit, cela laissa place à... deux loups.
Les deux loups allèrent dehors pour prendre l'air, et s'allongèrent devant la porte

A la Grande Bibliothèque.

Les grandes portes étaient à présent ouvertes. Seul le scribe gnome était resté à l'extérieur. Les deux autres étaient déjà entrés dans les bâtiments qui composaient la Grande Bibliothèque.

Un groupe d'habittants de Cennuroth désireux de profiter des livres avaient rejoint ce qui s'apparentait de plus en plus à une sorte de file d'attente. Il s'agissait d'une famille marchande dont la richesse ne faisait guère de doute à juger par l’opulence de leurs vêtements et le ton pincé et emprunté de leur langage. A en croire les discussions entre le chef de famille et sa matrone, il semblait être question d'héritage et de généalogie, une histoire embrouillée que les connaissances amassées dans les livres devaient contribuer à démêler...

Puis, le gnome scribe fit signe à tout ce petit monde rassemblé là qu'ils pouvaient enfin entrer.
« La raison de votre visite, je vous pris? » était la question rituelle qu'il posait à chaque visiteur.
Et si la réponse lui paraissait constituer une raison valable, le dialogue était alors systématiquement suivi d'un :
« Une pièce d'or par personne... pour le droit d'entrée. »
Cela sous-entendait que les autres prestations seraient à l'avenant. Un prix pour obtenir l'aide des scribes pour la recherche d'un ouvrage particulier. Un prix pour la consultation du dit ouvrage. Et un prix pour le service de copiste. Il était interdit de recopier soi-même des textes. Et tout à fait impensable d'emprunter quelque ouvrage que ce fut...

Tout cela se déroulait sous les regards attentifs des hallebardiers de la Garde, qui restaient sur le qui vive, au cas où ils dussent écarter quelque fauteur de trouble.

Au temple.

Pendant ce temps-là, l'activité matinale reprenait au monastère d'Illmater. Rasan, Keyris et Arrasto s'afféraient aux préparatifs du voyage.

Quelques instants plus tard, Dyrnaël arriva finalement dans la cour. La jeune femme avait troqué sa robe de bure contre une armure de cuir très ajustée, une tenue plus adaptée au voyage.
Cela ne nuisait aucunement à ses charmes, et bien au contraire mettait sa silhouette en valeur. A peine sortie de l'adolescence, et ainsi vêtue à la garçonne, elle avait quelque chose d'une nymphette.

Elle tenait un magnifique cheval blanc par la bride. La région du Murghôm était autrefois célèbre pour son peuple de cavaliers. Si la population était aujourd'hui plus métissée et davantage sédentaire, les chevaux en revanche avaient tout gardé de leur noblesse d’antan. Des purs-sangs dont l'élégance et le galbe rivalisaient avec leur endurance et leur performance. C'était définitivement le cas de celui-là.
Attaché par une corde, derrière la femme et sa monture, une mule portait deux petits coffres, un contre chacun de ses flancs.

« Bonjour messieurs... Rasan et Arrasto... » lança-t-elle aux deux hommes se rappelant des présentations de la veille.
« Oh... Est-il seulement convenable que je vous appelle par vos prénoms? » se reprit-elle embarrassé d'avoir peut-être manqué de convenance.

« Avez-vous bien dormi? Etes-vous fin prêts pour notre pèlerinage?
J'ai aussi trouvé des chevaux pour vous. Vous pourrez choisir celui qui vous convient le mieux. »

« Votre compagnon Keyris... » (elle s'était entre temps enquéri de son nom) « ... Est-il encore contrarié?
J'aimerai lui dire combien j'apprécie d'autant plus son soutien que les motivations de notre périple semblent aller à l'encontre de ses convictions... »

L'un des loups leva la tête à la mention du nom "Keyris", mais il se rallongea bien vite

À la Grande Bibliothèque.

« Je ne suis pas sûre qu'on ne nous ait pas suivis. » chuchota la déva à l'oreille de ses compagnons, alors qu'ils se plaçaient dans la file pour accéder au bâtiment. « Pendant que vous commencerez vos recherches, je propose de rester un peu en arrière une fois que nous aurons payé le droit d'entrée. Si quelqu'un est après nous, voyons s'il est prêt à débourser une pièce d'or pour cela, et à se présenter dans une file d'admission où il ne pourra pas se cacher. »

À la Grande Bibliothèque.

« Très bien. » répondit le mage à Kayah. Iahn partageait les inquiétudes de l'Immortelle et il ne pouvait aller à l'encontre de sa volonté.

À son tour, Iahn paya le scribe à l'entrée. À sa question, il répondit : « Moi et mes collègues avons longuement voyagé pour avoir le privilège de visiter la sublime bibliothèque de Cennuroth. Nous sommes particulièrement intéressé par l'histoire récente et lointaine de la région. Si vous pouviez nous orienter vers la section des recueils historiques et des biographies de personnages qui ont marqué la destinée du Murghôm. »

Iahn jugea qu'il ne faillait pas trop en dire sur l'objectif de leur visite. Cependant, il ne pouvait prendre le risque d'improviser un mensonge. Par expérience, il savait qu'il était rarement crédible.

Au temple

« Si il avait été vraiment contrarié, il serait reparti. Ne vous en faites donc pas pour ça, Dyrnaël. »

En l'appelant par son prénom également, il indiquait ainsi son assentiment à avoir des relations courtoises. Il observa le cheval un instant avant d'être rappelé à l'ordre par sa propre monture d'un hennissement:

« Hein? Oui, bon, ça va, je t'oublie pas... »

Adressant un sourire à la jeune femme, il ajouta à voix basse:

« Désolé, elle est très jalouse et n'aime pas que je regarde d'autres chevaux... »

Revenant à ses affaires, il continua donc à s'occuper de sa monture...

A la Grande Bibliothèque.

Les explications parussent suffisantes au gnome. Les héros entrèrent, appauvris d'une pièce d'or chacun. L'intérieur de la bibliothèque était tout aussi impressionnant que l'extérieur. Des dizaines d'employés, membres de la Guilde des Scribes pour la plupart, faisaient tourner l'établissement. L'affaire semblait bien orchestrée, et ce qui aurait du être un lieu de libre partage et de recueillement prenait ici des airs mercantiles de souk aux livres.

On guida Iahn et Bérul vers le « Pavillon de l'Histoire ». Un petit bâtiment était tout dédié à cette discipline. De nombreux rayonnages tapissaient les murs des deux salles qui le composaient. Au centre de chacune étaient placées des tables de lecture. Le mage d'Imaskar reconnut le scribe en charge du pavillon, il s'agissait du vieil homme à la barbe blanche aperçu devant l'entrée, qui avait finalement regagné son poste.
« Bonjour étranger... » dit-il d'une voix chevrotante.
« Puissiez-vous trouver ce que vous cherchez parmi les connaissances du Pavillon de l'Histoire. Les livres historiques présents ici sont classés chronologiquement. Au sein de chaque période, les traités d'histoire régionale précèdent les ouvrages plus généraux... »
« Si vous cherchez quelque chose de précis, n'hésitez pas à faire appel à mes modestes services. »

Kayah, restée en retrait, s'était trouvé un poste d'observation idéal dans la cour intérieur qu'encerclaient les différents bâtiments. De là, elle pouvait notamment surveiller les allers et venus, et avait même une ligne de vue sur le parvis extérieur.

Après quelques minutes, la silhouette de l'homme qui les avait suivis dans les rues de la ville fit de nouveau son apparition. A l'extérieur, il ne se mêla pas à la file d'attente. Il fit simplement un signe au gnome scribe, puis s'adressa directement aux Gardes. Ces derniers baissèrent leurs hallebardes et le laissèrent passer.
L'individu était vêtu d'un ample habit gris. A en juger par son teint mate et ses cheveux noirs, il s'agissait sans doute d'un Mûrghain. Son visage inquiétant était enlaidi par une balafre que ne parvenait pas à dissimuler une barbe mal taillée. Il devait avoir la trentaine, peut-être un peu plus.

Au Temple.

Pendant ce temps-là, au monastère d'Illmater, les préparatifs du voyage et autres discussions plus légères furent bientôt interrompus.
Un groupe de Gardes tambourinait sur les portes du monastère à grands coups de butoir. Ils vociféraient et sommaient qu'on leur ouvre.

Dyrnaël chuchota à l'intention de Rasan et Arrasto « Ne restons pas ici... » La jeune femme les entraîna un peu à l'écart.

Les miliciens firent bientôt irruption dans la cour. Un homme les accompagnait. Il était accoutré en grande pompe et portait les armoiries officielles du Cennuroth: un dragon vert sombre stylisé sur fond turquoise plus clair.
« Au nom du Vizir, allez me chercher le responsable ! » exigea-t-il. « Où est ce fichu prêtre ? Qu'on me l'amène ! »

On interrompit donc la prière matinale du vénérable Dorim, qui se présenta devant l'autorité.

« On me rapporte qu'un membre de votre "secte" serait impliqué dans une affaire de meurtre. Il aurait agi avec la complicité d'étrangers », expliqua l'enquêteur.
« Mon temps est précieux, et cette enquête tout à fait banale m’ennuie au plus au haut point. Je vous prierais donc d'être conciliant. A moins que vous de préfériez risquer une justice plus expéditive ?
Ce moine meurtrier, donnez-nous son nom ! Ces étrangers, que savez-vous ? Sont-ils venus ici ? »

La Garde semblait ne pas avoir perdu de temps. Après tout, l'Auberge de Idôle Danse était bondée le veille, et les témoignages et délations n'avaient pas dues être très difficiles à obtenir.
Même la serveuse Clara connaissait Magold, et on pouvait penser que le moine était un habitué. Remonter la piste jusqu'au monastère d'Illmater avait du être un jeu d'enfant...

À la Grande Bibliothèque

Kayah resta à son poste d'observation, suivant des yeux le patibulaire inconnu. Elle espérait être suffisamment en retrait pour qu'il ne la remarque pas, mais elle ne pouvait guère se lancer dans une filature et espérer être discrète...

À la Grande Bibliothèque

Iahn se laissa guider jusqu'au Pavillon de l'Histoire. Les hautes salles de Cléciel étaient remarquables de par leur conception, mais l'élégance de la bibliothèque de Cennuroth était sans égale. Il aurait passé quelques années à fouiller ses secrets.

Devant le vieil érudit, Iahn décida de prendre la voie de l'honnêteté. Les rayons étaient vastes et le temps était une ressource limitée. Ainsi, il demanda directement à trouver ce qu'ils cherchaient.

« Nous nous intéressons à une région bien particulière du Murghôm. Il s'agit d'Ombregrise. La période qui nous intéresse est celle où Malvai y fut actif. Sauriez-vous faciliter notre recherche ? »

Pour l'instant, Iahn estimait qu'il n'était pas utile de mentionner les motifs de leur recherche. Il espérait que ce fusse suffisant pour recevoir l'aide du vieux scribe.