« Ce serait tellement merveilleux. »
L'espace d'un instant, William se laissa bercer par l'idée d'un monde de progrès également réparti entre tous. Ni maîtres, ni spéculateurs. Pour seule religion le souci d'autrui. Un monde simple et pourtant si loin. Le reporter poussa un profond soupir.
« Loin de moi l'idée de rejeter tout progrès, mais voyez vous ma chère, si mes voyages m'ont ouvert les yeux sur l'infinie beauté de notre monde, il m'ont aussi souvent offert une bien piètre image de la nature humaine. Toutes ces techniques et ce savoir, qui devraient être partagés par tous, trop souvent je les ai vu servir à terme, à mauvais escient ou être accaparés par un petit nombre de privilégiés. C'est ce que je dénonce chaque jour au fil de ma plume. Nationalismes, spéculation, égoïsmes, toutes ces mesquineries qui sont le ferment du mal. »
Tout en marchant, il fit claquer le bout ferré de sa canne. Sur le pommeau, la tête de loup avait un rictus narquois.
« Parfois, tel les anciens Cathares ou certaines sectes coptes prêchant la gnose, j'en viens à penser que ce monde n'est pas l’œuvre de Dieu mais bien celle du diable qui nous à fait chair pour éprouver notre véritable nature spirituelle et immortelle. Il me semble que le vrai dieu - ou déesse après tout - se trouve bien au delà de notre entendement et se désole de nous voir ainsi nous engluer dans nos propres travers. »
Il caressa du bout des doigts la joue de Rochelle, replaçant quelques mèches échappées au coin de ses sourcils.
« L'amour peut il alors sauver nos âmes égarées ? Et illuminer au firmament un nouveau céleste luminaire qui enflammerait l'éther et attirerait sur nous la bienveillance de l'univers. Non, je ne crois peut être pas au progrès après tout, mais je crois que seul compte l'amour, en toute chose, dans toutes nos actions. »
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