Mérisiel se tenait à proximité... trop éloignée pour encombrer le duo de duettistes, mais suffisamment proche pour n'avoir rien perdu des derniers échanges...
C'est donc en roulant les yeux vers Héléa qu'elle lui répondit à la place de Laurel : « Très chère Héléa, ce jeune homme m'a accostée plus avant dans la soirée, car il souhaitait t'être présenté. Il cherche « les Héros de Pointesable » pour leur apporter son concours... » dit-elle avant d'ajouter avec un sourire complice :
« Figure-toi qu'un papillon s'est chargé de le mener jusqu'à toi ... »

« Un papillon? Voyez-vous ça?

Hmmm... »

Héléa n'était pas confiante. Plusieurs hypothèses s'ouvraient a elle.

Soit l'homme était un envoyé de Desna et ça ne ferait pas de mal d'avoir un peu d'aide.

Soit il bossait pour l'ennemi, après tout, ils avaient mis deux fois de suite a mal les plans de la garce qui avait manipulé le frère d'Ameiko et l'avait fait participer au meurtre de son propre père, après avoir visiblement fait cramer le sien... Donc manipuler un homme de plus ne la gênerait surement pas.

Soit il était aussi jeté qu'Helea et ça pourrait être drôle, en plus d'ajouter un sac de chair a interposer entre elle et une lame.

Finalement, après un long monologue interieur, Héléa opina du chef et demanda:

« Comment ça, jusqu'à moi? »

Nakan secoua la tête.

« Non, pas vous en particulier. Ou plutôt .. laissez-moi vous raconter. Je suis un Lyryne-Quah, un shoanti et également un varisien. Il y a peu, alors que j'accompagnais le chamane de la tribu pour prier Desna, dans la fumée du feu, un drôle de songe m'apparut. Une cathédrale, des gens qui dansent, des milliers de papillons qui s'envolent. Puis .. les ténèbres. Les papillons, les gens disparaissent peu à peu, engloutis. Un monstrueux chacal, que le père Zantus pense être La Monstrueuse, ou comme on l'appelle par ici Lamashtu.

On me tira alors du rêve ! Ou en sortis-je par moi-même ? Les membres de la tribu se tenaient à côté de moi. M'informant que j'aurais joué un air de plus en plus sinistre, sans répondre aux appels. Sans m'en rendre compte.
Mais avant que je ne puisse répondre, ce rêve s'avéra être un présage. Un magnifique papillon bleu, posé sur mon archet, s'envola pour froler mes oreilles. Et du battement de ses ailes, ressortit comme un son. "Pointesable". »

Nakan sourit, écarta les paumes de ses mains, exprimant son incertitude.

« Le papillon n'est-il pas le messager de Desna ?
Suite à un tel présage, je me résolus à venir ici. Et si je pense avoir été envoyé pour vous prêter main forte, je reconnais ne pas en avoir la certitude. Néanmoins, au regard des récents événements que l'on m'a raconté ...
Je suis un chasseur accompli, un musicien raisonnablement doué, mais surtout, je suis magicien et soigneur. Mon potentiel n'est certes pas illimité, mais je suis plutôt polyvalent.
Si ces gobelins reviennent, vous aurez sûrement besoin de toutes les mains disponibles.
Et je suis là pour ça. »

« Un soigneur ? Ah bah ça, ça tombe bien justement! Ce qu'on perd nous revient sous une autre forme. »

L'exclamation d'Héléa ne dura qu'un instant avant qu'elle n'ajoute:

« Mouais, je ne suis pas la meilleure placée pour juger des intentions des dieux et des présages... »

Ce genre de phrase, dans la bouche d'une prêtresse, n'était pas vraiment le genre de choses qu'on s'attendait à entendre mais elle enchaîna vite fait pour ne pas laisser aux gens le temps de réfléchir à ce qu'elle venait de dire:

« Mais si vous voulez filer un coup de main, vous êtes le bienvenu. Enfin, je suis d'accord, personnellement. Mais en parlant de Shoanti, faudra aussi que Chorune vous rencontre. C'est notre blondinette timide avec de gros bras, elle est chez sa mère pour le moment.

Bon, c'est pas tout ça mais moi, j'ai un bain a prendre.

Elle est partie les tisser elle même, ces serviettes ou quoi? »

Mérisiel se pinça les levres et se détourna pour masquer le fou rire qu'elle retenait et qui lui montait les larmes aux yeux.
Le « sport à plusieurs, façon Héléa » n'avait pas toujours la connotation sensuelle communément admise ...
cela pouvait prendre une tournure bien surprenante pour ses éventuels partenaires

Nakan réfléchit, avant de hausser les épaules.
« Comment est l'eau ? Je descend tout juste d'un chariot, je n'ai rien contre l'idée de gratter la poussière. »

« Froide, probablement. C'est ce qu'il y a de meilleur quand on a des bleus.

T'inquiètes, Amy, je ferai pas ça, hein. C'est un établissement respectable, ici. Même si Joséphine y pionce... Et il va pas faire qu'y pioncer, vu son succès au violon, il va surement ramener quelques admiratrices dans sa chambre.

J'vais tellement lui pourrir sa soirée, oh, ça va être génial... »

Héléa se frottait les mains avec anticipation. Bien sur, Laurel était là et avait surement tout entendu mais elle s'en moquait. Elle ne vivait que pour deux choses: la bagarre, la fête et emmerder les gens. Oui, ça faisait trois choses et il y en avait bien d'autres mais Héléa n'était pas connu pour son intellect, ce qui lui apportait un gros avantage: de fait, sa tête n'était pas un organe vital.

« Simplement froide, c'est bien. »

Se tournant vers Héléa, le shoanti couvert de tatouages demanda poliment :
« Si cela ne heurte pas votre pudeur. Je peux m'écarter plus loin sur la plage, sinon. »

Il ajouta, curieux :
« Qui est Joséphine ? Une amie à vous ? »

« Ma pudeur? »

Héléa observa le Shoanti avec surprise avant d'éclater de rire:

« Il me plait. T'inquiètes pas pour moi, je ne suis pas equipee en terme de pudeur. Quand à Joséphine... Demande à Laurel. Allez, je file! A plus tard »

Héléa attrapa ses serviettes puis partit donc en direction de la plage.

C'est plus qu'il ne lui en fallait, Mérisiel ne parvint pas à retenir son fou-rire plus de quelques seconde après que la prêtresse de Gorum n'eut franchi la porte de l'auberge.

Nakan allait sortir à la suite d'Héléa, mais les éclats de rire lui paraissent incongrus. Étonné, il se tourne vers Mérisiel et lui demande :
« Qu'y a t-il de drôle ? »

Herk'lachner se dirigea vers le comptoir. Le demi-roc avançait d'un pas déterminé. Il n'était pas contaminé par l'ambiance festive, sa vie n'offrait peu de place aux loisirs. Son armure de cuir présentait de nombreuses traces de coups, son sac à dos semblait des plus pratique, son fouet, qui claquait sur sa cuisse, présentait des excroissances métalliques qui devaient laisser des traces sur la peau de ses ennemis. Son propre visage présentait de nombreuses cicatrices et son regard noir ne laissait guère de place à la plaisanterie.

« Bonjour, je cherche ceux qui ont combattus les gobelins, on m'a dit que je les trouverais ici. »

Mérisiel allait répondre à Nakan quand Laurel lui coupa la parole.
Elle approuva ses dires d'un geste de la main signifiant qu'il y avait « matière à développement »
l'arrivée du demi-ork coupant court à ses manifestations gestuelles, elle trouva fort opportun de laisser Laurel jouer le rôle de « poseur de questions » et d'« intermédiaire »en la matière ...
C'est donc avec une très feinte et soudaine indifférence affichée qu'elle laissa la suite se dérouler ...
Je m'en mêlerai « quand je veux »,« si je veux » et « comme je veux » décida-t-elle en son for intérieur, toute hilarité évaporée

L'inquisiteur se tourna vers le barde qui venait de lui adresser la parole. Bien qu'il ne semblait pas marin, Laurel avait le besoin de faire des phrases. Le demi-orc n'était pas de cette école.

« Herk'lachner.
Les gobelins ont tué un ami lors du raid et lui volé des affaires de notre guilde.
Je cherche à le venger et à récupérer ce qui nous appartient.
Où sont-ces "héros" ? »

Ce dernier mot avait été prononcé avec un certains mépris. Il n'aimait guère ces aventuriers qui se la jouaient, lui prenait la route par devoir, pas pour un quelconque "héroïsme".

Nakan hocha la tête en réponse à Laurel. Avec l'arrivée de l'homme en armure, il hésita et décida de retarder sa sortie piscine.
S'il n'oserait probablement rien déclencher avec ce monde dans l'auberge, le demi-orque avait tout de même l'air suffisamment hargneux pour décider de poser un problème quelconque s'il ne trouvait pas ce qu'il cherchait.
Aussi le shoanti affectait un air dégagé, mais ne quittait pas le guerrier des yeux.