« Oui. » répondit l'elfe en souriant, les yeux -qu'elle avait bleu-gris, légèrement en amande et malicieux- pétillants « je suis de ces gens-là. »
Prenant de sa main libre la main offerte, elle ajouta : « Je suis Mérisiel, selon les moments jongleuse de lames ou lanceuse de couteau, déjoueuse d'embuche ou passe-murailles » se calant sur la présentation de son interlocuteur.
« Pourquoi vouliez-vous me rencontrer ? »

« Un petit papillon m'a dit de venir à Pointesable », expliqua Nakan amusé.
« Je ne suis pas tout à fait certain de savoir pourquoi, ce que je fais ici ou mes raisons de vous parler, mais je souhaiterais rencontrer tous vos compagnons, si telle chose m'était permise.

Accepteriez-vous déjà de me raconter vos aventures ? Vous avez chassé des gobelins hors de la ville et c'est en l'honneur de votre courage que les gens vous appellent héros, me semble t-il ? »

Nul sarcasme ou ironie dans le ton de l'humain, ses questions et son ton étaient sincères.

« Oui. » répondit l'elfe souriante « C'est assez bien résumé. »
« Nous avons chassé des gobelins qui tentaient d'envahir la ville. Malheureusement nous avons de sérieuses raisons de craindre qu'ils ne représentaient que la première vague et que les suivantes ne tarderont pas. » dit-elle très sérieusement « Ce qui explique aussi pourquoi il est difficile de nous rencontrer tous ensemble : Nous œuvrons à présent au renforcement des défenses et les fronts sont nombreux ... »

Nakan hocha la tête après avoir digéré les réponses de Mérisiel. Il ne souriait plus, ces nouvelles étaient sérieuses.

« Je comprends. Le nom de Lamashtu vous évoque t-il quelque chose ? Peut-être prononcé par un des gobelins ?
Qu'est-ce qui vous fait croire que d'autres reviendront ? »

Se rencognant sur le dossier de sa chaise, Mérisiel répondit à voix basse : « Ce nom ne m'est pas inconnu, et nous avons effectivement trouvé de tangibles indications qui portent cette signature.
Plus matériellement solides qu'un vague phonème dans un râle de gobelin. »

L'homme face à Mérisiel cligna des yeux et se pencha à son tour, optant lui aussi pour le murmure.
« C'est à dire ? Qu'est-ce qu'un phonème ? Et tangibles à quel point, ces indications ? »
En disant cela, Nakan sonnait plutôt inquiet. Il en avait l'expression, d'ailleurs, les yeux légèrement écarquillés et son discours devenu un brin plus vif.

« Un phonème, c'est un son articulé. » répondit l'elfe avant de secouer la tête « Je ne suis pas certaine de pouvoir vous en dire plus au sujet de ce que nous avons trouvé. Nous ne nous connaissons guère, vous et moi. Malgré le baiser de Desna. »
En soupirant, elle s'excusa : « Je préfèrerais laisser un autre membre du groupe choisir quelle informations partager ou non. »
reprenant sa position initiale: menton sur le dos des phalanges (soutenues par la main, soutenue par le poignet, par l'avant-bras, coude sur la table) et regard clair et franc cherchant les yeux de son interlocuteur, elle reprit son écoute attentive « Mais que cela ne vous empêche pas de poursuivre ... Pourquoi cherchez-vous les Héros de Pointesable ? »

Nakan leva légèrement les mains en l'air avant de les laisser retomber.
Le baiser de Desna ? Encore une idée de citadins ?

« J'aurais plaisir à rencontrer vos compagnons d'arme, oui.
Je n'en suis pas encore certain, mais je pense que si mes pas m'ont conduit jusqu'ici, c'est que la Grande Voyageuse souhaite que je vous prête main-forte contre ses ennemis. Surtout contre les serviteurs de La Dévoreuse.
Sans me vanter, je suis plutôt bon magicien, et toutes ces autres choses que je racontais plus tôt. »
Le métis souriait, d'un air qui se voulait honnête. Appuyé contre le dossier de sa chaise, il parlait tranquillement.

« Oui ... » fit l'elfe pensive qui attendait son repas « Il faudrait vous présenter à Chorune et Helea ... »

Nakan hocha la tête.
« S'il vous plaît, oui. »
Puis il reprit son repas avec l'intention de le finir, qu'il aurait été bête d'oublier.

« Je pense qu'elles sont du côté de la plage » remarqua l'elfe « et si elles ne s'y trouvent pas, maintenant que vous avez leurs noms, il vous sera plus facile de demander après elles. »

Nakan haussa les épaules.
« Elles ne comptent pas passer par ici ? Ces chaises sont confortables, après les cahots de la route. Je les abandonnerais à regret quand viendra le temps de m'en lever. »

Plus sérieusement, Nakan n'était pas pressé. Il pouvait attendre.
Attente suspendue par l'arrivée d'un plat pour Mérisiel, salué d'un signe de tête par le shoanti. « Bon appétit. »

Coupée à nouveau par l'arrivée d'un nouvel arrivant.
« Enchanté Laurel, je suis Nakan. Violoniste, pour vous servir également. »
La main tendue, avec un grand sourire, il accueillit le barde à leur table.
« Mademoiselle me racontait les exploits des héros de Pointesable. »

« Des gobelins sont arrivés ... » résuma Mérisiel en accueillant le « Bon appétit » de Nathan d'un signe de tête et en déchirant un morceau de pain pour attaquer son plat « ... et comme ils sont tous morts, ils n'auront même pas l'occasion d'informer leurs commanditaires de l'organisation des défenses de Pinntesable ». Elle entreprit alors de manger, consciencieusement, tout ce qui se trouvait dans son assiette.

Non sans manquer, entre chaque bouchée, d'assassiner de son regard courroucé
le pique-assiette sans gêne qui s'incrustait ainsi à la table et dans la conversation ....

« Ameiko est certes une divine cuisinière, mais je ne me souviens pas vous avoir invité à ma table ... » lâcha Mérisiel entre deux bouchées.

« Je viens après, je suis curieux de ce que vous aurez à me raconter », dit Nakan à Laurel alors que celui-ci changeait de place. Le Lyryne-Quah était intrigué par ce musicien, mais étant en train de discuter avec l'elfe, Nakan ne trouvait guère poli de l'abandonner aussi vite.

Aussi, alors que Laurel s'était replié, le shoanti s'adressa à Mérisiel lorsqu'il demanda :
« Qui est Héléa ? Une de vos amies ?
Vous n'avez pas l'air d'aimer le barde Barnandi, vous a t-il causé quelque mal ? »

« Chorune et Helea ... » commença Mérisiel en réfléchissant à la suite de sa phrase
« ... sont d'habiles combattantes qui méritent pleinement cette appellation de « Héros de Pointesable » qui vous a conduit à moi.
Elles le méritent encore plus que moi, puisqu'elles sont originaires d'ici. »
Elle reprit une bouchée, qu'elle prit le temps d'avaler correctement avant de poursuivre
« Ce barde nous a suivis de loin lors de la bataille.
Une fois les gobelins tous occis, sans aucune participation de sa part, il est ressorti avec nous du bâtiment. »
Elle se resservit tranquillement en concluant « Mais je crois que ce qui me dérange le plus chez cet individu, c'est son sans-gêne.
S'il avait demandé s'il dérangeait avant de s'assoir, s'il avait demandé s'il pouvait se servir dans le plat avant de tendre la main, ...
Mais non. Il s'incruste, se sert, et semble trouver cela naturel .... »