Cela fait maintenant 5 mois que j'ai quitté mes amis, et voyager seul manque cruellement de divertissement, murmura-t-il pour lui même. Et voilà qu'une poignée de personnes vient à bout d'un raid gobelin au beau milieu d'un festival. Si ce n'est pas là Shélyn qui m'indique le chemin à prendre, je ne m'appelle plus Barnandi !

Arrivé à Pointesable, Laurel commença par chercher une auberge où dormir, avec un peu de chance, ses talents lui permettraient aussi de profiter d'une tranche de pain et d'une délicieuse confiture le lendemain matin. Il secoua son visage pour se concentrer de nouveau sur les paroles de la jeune femme. Ces "héros", comme elle les avait appelé, ne resteraient pas à Pointesable indéfiniment et il faudra donc les trouver d'ici là. De toute façon, des gens capable de repousser des gobelins ne doivent pas être monnaie courante par ici, et connaissant les moeurs des paysans, il y a fort à parier que bon nombre d'entre eux seront ravi de m'indiquer où ils se trouvent pour quelques pièces de cuivre.

Sur ces mots, Laurel se mit en quête d'une auberge où passer la nuit, comptant sur sa musique et sa voix pour régler ses dépenses.

Sans plus de renseignement que le nom des auberges, Laurel entreprit de se faire loger au Dragon Rouillé d'Ameiko. Avec un peu de chance, il réussirait même à attirer l’œil d'un des dit "héros", sans quoi, il ferai usage de ses autres atouts afin de piquer leur curiosité. Après tout, il devait bien connaître une histoire qui pourrait leur conter, une légende qui, si les héros venait à prouver son existence et vaincre quelques ennemis maléfiques, serait chanter par les bardes pour les siècles à venir. Avec toutes ces idées en tête, on pouvait voir un air béat sur son visage, accompagné par le son de sa voix qui commencer à chantonner une mélodie entrainante.

Arrivé devant ladite auberge, Laurel se rendit face au tavernier(ère) :
« Bonjour mon cher, je me présente, Laurel Barnandi, Barde de cœur et de profession. Mes bourses sont pauvres en ces temps et j'aurai apprécié que nous trouvions un arrangement. Le travail ne m'effraie guère et je peux chanter, danser, conter ou jouer du violon pour vos clients jusqu'à l'aube s'il le faut. En échange je ne demande qu'un toit pour la nuit et de quoi manger. Bien entendu, je ne vous demande pas de croire les paroles d'un parfait inconnu et je peux faire une démonstration de mes talents sans délais. »

Un sourire non dissimulé se dessina autour des lèvres de Laurel. Visiblement il avait choisi la bonne auberge, rien n'est plus satisfaisant que de jouer pour un public qui comprend votre art et sait en apprécier le sens.

Il commença par déclamer :
« Si vous saviez ma Dame
Comme je suis heureux
De rencontrer une âme
Dont les vers sont radieux.

Je vous prie d'écouter
L'histoire d'un bel homme
Qui quitta son foyer
Pour courir le royaume. »

S'éloignant légèrement du comptoir, il sortit son violon, essaya quelques notes puis s'arrêta. L'assistance pouvait le voir bouger son archer, sans qu'il touche les cordes pour finalement entendre une douce mélodie.
« Mesdames et messieurs, voici l'histoire d'un homme qui, ne trouvant pas sa place parmi les siens, décida de partir la trouver sur les routes. »
Quelques secondes plus tard, sa voix rejoignit l'instrument et il débuta sa chanson.

« Dans une contrée dont le nom m'échappe,
Où les maux et crimes sont inconnus,
Les lois sont justes, l'ordre maintenu.

Seulement chaque jour notre homme attrape
Sa grande épée, son arc et quelques flèches
Pour toujours s'entrainer sur l'herbe sèche.

Mais voilà que notre jeune garçon
Commence à rêver d'une belle vie
Une où il pourrait jouer jours et nuits.

Un matin, il dévoila sa passion
Pour le violon, pour la danse et le chant
Chose qui ne plut pas à ses parents

Rabaissé et charrié par ses pairs
Le cœur lourd mais la volonté intacte
Refusant d'eux le plus petit contact

Il se réfugia alors dans les vers
Cherchant l'inspiration loin du village
Qui lui permettra de traverser les âges »

Sa chanson finie, il ne manqua pas de se courber devant la tenancière et de se retourner afin de saluer également la salle.

« Laurel Barnandi en effet. » Dit-il en appuyant bien sur son nom. La dernière chose dont j'ai besoin serait d'être reconnu ici.
« Je serais ravi de manger un peu plus tard dans la soirée, si ma performance peut faire honneur à votre auberge, ma voix et ma musique sont à votre disposition et seront toutes deux ravies de se faire entendre. » Sur ces mots, il empoigna son violon une nouvelle fois, fit quelques pas, puis se retourna vers la tenancière. « Je viens d'arriver en ville et suis bien seul. Si vous acceptiez de vous joindre à moi pour dîner, je suis sur que le repas n'en serait que meilleur. » Et avec ces belles paroles, Laurel lui servit un de ses plus beaux regards.

Tournant les talons et s'avançant dans la salle, archet en main, Laurel joua plusieurs morceaux de son répertoire en tachant bien de garder les meilleurs pour une autre occasion. Il parcoura la salle à la recherche des dits héros, censés être présent parmis les tables. Avec un peu de chance, ce numéro suffira à leur faire accepter l'idée de rester ensemble et surtout de me compter parmi eux.

« Je ne peux refuser une telle demande », dit-il en attrapant un verre. « D'ailleurs, il se fait assez tard pour dîner, mais je suppose que si vous êtes là c'est que vous avez réfléchie à ma proposition. » Laurel pris alors les devants pour trouver une table libre. S'y installant, il invita Ameiko à en faire de même. Je n'en vois aucun qui sorte réellement du lot, les informations que j'ai récolté seraient-elles fausses ? La tenancière doit bien avoir des précisions à apporter, ce repas sera l'occasion d'en apprendre un peu plus.

Alors qu'il engageait la discussion, parlant de banalités, comptant certains passages de sa vie (modifiés pour la plupart) et n'oubliant pas d'adresser quelques belles paroles à la jeune femme, Laurel entreprit d'en savoir plus sur lesdits héros. « ... et voyez-vous, j'ai comme projet d'écrire une épopée qui traversera les âges. Une épopée à laquelle je prendrais part afin de retranscrire les exploits réalisés par un groupe de héros et moi-même. Tant que j'y pense, j'ai entendu dire qu'un groupe de jeune gens avait mis en déroute un raid gobelin, j'aimerai beaucoup discuter avec eux. Sauriez-vous où je peux les trouver ? »

Bien qu'il pensait être capable de jouer n'importe quel rôle et de s'y tenir de la plus parfaite des façons, Laurel ne réussi pas à masquer totalement la frayeur qui passa devant son visage. Il avait visiblement sous estimé la réputation de sa famille, ou la connaissance des bardes. Même loin de chez lui, quelqu'un était capable de le reconnaître d'après un récit modifier de toute part.

Arborant de nouveau un visage serein et jovial, comme s'il n'avait jamais eu qu'une discussion courtoise avec une charmante dame, il attrapa le poignet d'Ameiko. « Puis-je penser que mon secret sera bien gardé ? Et aussi espérer que ce repas n'était pas que simple farce à mon égard ? » Quelques secondes de réflexions suffirent pour qu'il retrouve confiance en lui. Si elle avait eu une quelconque intention de le vendre, Ameiko n'aurait jamais souligné ce point, cela serait le meilleur moyen de le faire fuir et par conséquent de perdre ses chances d'empocher la récompense. Non, si la tenancière lui tient ce discours, c'est ou pour le prévenir, ou parce qu'elle aimerait un service, dans les deux cas, rien de trop dangereux.

Lâchant son poignet, il se leva pour aller rencontrer Beorn.

« Bien sur. Je pense que nous ne serons pas trop de deux pour s'occuper d'Ameiko. Trois si l'on compte la serveuse qui tient l'auberge en ce moment.
D'ailleurs quand on sera arrivé il faudra lui demander si elle connait quelqu'un qui puisse aider à l'auberge. Et on se relaiera pour lui donner un coup de main nous aussi. »

Laurel passa devant la jeune fille et pris la direction de l'auberge.

Et ça sera une bonne occasion de nous rapprocher. Je me demande quel est son genre d'homme .?

Devant les yeux larmoyant de la serveuse Laurel fit ce qu'il put pour la réconforter.
« Allons allons, ce n'est pas comme si nous étions de parfaits inconnus non plus. Et je ferai de bien piètre récit si nous venions à fermer les yeux sur tous les problèmes qui passent à notre portée. »

Il quitta vite son air chaleureux pour reprendre une expression un peu plus commune.
« Elle a parlé d'autre chose avant de partir pour le manoir ? »
Le barde se tourna vers Ashley.
« Je pense que nous devrions aller y jeter un œil aussi. Peut-être aura-t-elle besoin d'aide. »

« Bien le bonjour à vous aussi.
Je souhaiterai voir mademoiselle Ameiko je vous prie. »

Voir un tel étalement de richesse rappela au barde des souvenirs dérangeants.
Je me demande comment va Raphaëlle. J'aimerai beaucoup voir comment elle a grandit et si elle a réussie à sortir du joug de nos parents.
Laurel était perdu dans ses pensées, un sourire légèrement attristé sur le visage mais au moins il ne regrettait pas son choix.
Seule la réponse du majordome le ramena dans le temps présent.