Borscht attendait pendant que Chorune et Mérisiel pataugeait dans la boue. Il regarda quand même autour de lui au cas où ses deux coéquipières auraient louper quelque chose.

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Héléa observait les environs. Il y a quelques temps, elle aurait pu se satisfaire de ce genre de vie, quand elle n'avait pas toute sa tête mais maintenant... Elle aimait trop sa vie de combat pour revenir à ce qu'elle était avant. Même si elle a fortement réduit ses chances de vivre vieille mais ça, c'était vraiment le cadet de ses soucis...

Mais qu’est-ce qu…
Chorune eut un geste d’énervement face à ce cochon qui l’embêtait. Elle, elle était là pour inspecter la porcherie, et y trouver ce qui y serait anormal, pas pour nourrir des cochons trop gras. Me ferait bien une tête de cochon, moi.

Hélant l'adolescente, Mérisiel tenta de faire rire celle qu'elle appelait en son for intérieur la choupinette ...

« Dis Chorune, celui-là avec son petit groin fouineur, tu ne trouves pas qu'il nous ressemble ? Il cherche une miette de quelque chose au milieu de toute cette boue !
Mais lui ça à l'air de lui plaire, regarde comme il remue sa petite queue toute tordue, il est drôle, non ? » demanda-t-elle en faisant des grimace et en plissant son nez pour imiter le cochon visé.

Une colère sourde rugissait dans les entrailles de Chorune, contre cet importun à quatre pattes. (en abyssal) « Agl'akhi na na'shatum shis ! Tulonank ishishazglnak nagu'clulúbú ? » gronda-t'elle, les yeux furieux.
Presque sans qu'elle l'ait voulu, son poing partit pour s'enfoncer dans le groin trop curieux.

« C'est moche mais qu'est-ce que c'est bon, le cochon... »

La prêtresse éclata de rire en observant Chorune aux prises avec le porcin, avant qu'elle n'ajoute d'un ton badin:

« J'espère que quelqu'un a de l'argent pour dédommager le fermier parce que moi, j'ai plus un rond depuis mes achats. »

Se relevant, Héléa se dirigea vers l'enclos, sans toutefois y rentrer:

« Hé, gamine, calme-toi un peu... Chorune, qu'est-ce qui t'arrives? Après pourfendeuse de gobelin, tu veux qu'on ajoute le titre tueuse de cochon à ton épitaphe? »

« Hé, vous la laissez tranquille, c'est un conseil. Chorune, ça va? »

La prêtresse avait regardé le halfelin avec dédain avant de s'inquiéter de sa camarade. Elle pouvait bien massacrer tous les cochons qu'elle voulait, après ce qu'elle avait fait pour cette cité et Héléa ne laisserait pas un halfelin la traiter comme un rien...

Chorune resta un instant interloquée. Baignant dans la boue, reniflée par un cochon qu’elle n’avait su toucher, l’adolescente reprenait ses esprits, tentant d’analyser ce qu’il venait de se passer.
« Je … je ne sais pas… un brusque accès de colère… » Toujours à plat ventre, elle regarda Héléa fixement. Le sous-entendu était clair dans le ton qu’elle avait pris : Cet excès n’était pas de son fait.
Et il ne semblait pas « naturel » non plus à la jeune fille.

Chorune se redressa enfin.
« Olmur, non… je ne veux rien faire aux cochons. Tu pourrais expliquer à Héléa l’histoire de ce lieu ? C’était quoi, avant d’être une porcherie ? »
Sur ses gardes par rapport à d’autres attaques mentales, Chorune regarda autour d’elle : La structure du sol, des murs, les animaux présents…
Elle se demandait si la même manifestation magique avait pu toucher Nualia, à l’époque. Et si c’était le cas, que lui serait-elle advenue, soumise à ce régime pendant toute une nuit ?

Encore couverte de la boue, Chorune dut se rendre à l’évidence : Elles n’avaient rien trouvé de particulier dans la porcherie. Que cette sensation étrange qui l’avait étreint tout à l’heure. Mais qu’est-ce qui m’est arrivé ! Avec angoisse, elle se demandait si elle ne devenait pas dangereuse, comme Nualia. Saurait-elle vaincre le démon qui était en elle ?
En franchissant la cloture vers l’extérieur, elle s’adressa à ses compagnons autant qu’à elle-même, pour se convaincre : « Je vous assure ! Tout à l’heure, je ne sais pas ce qui m’a pris. J’aurais pu le tuer, si j’avais eu une arme ! »
Avec ses compagnons, elle se dirigerait ensuite vers la taverne, où elle prendrait une douche avant de se verser la grande rasade de fortifiant dont elle avait besoin.

« Bon, c'est bien beau tout ça mais on a fini et on peut aller se pinter tranquille? On ira fouiller les tunnels si tu veux mais demain. On emmenera Josephine avec nous, il pourra peut etre nous eclairer sur ce qui se passe dans ces tunnels avec ses tours de passe passe...

Toi aussi, Borscht... enfin, si t'as rien de mieux a faire.

Allez, dirdction l'auberge, je paye ma tournée! Sauf toi, Chorune. On a vu ce que ça donne quand tu bois... »

La pretresse etait enthousiaste. Trop enthousiaste pour quelqu'un qui allait payer une tournee... mais apres tout, lamairesse n'avait elle pas dit qu'elle couvrirait leurs frais de logement et de nourriture tant qu'ils seraient en ville?

C’était cela que Chorune recherchait : L’existence d’un tunnel. Même si elle pensait pouvoir trouver dans la porcherie une trappe y menant, ce qui n’avait pas été le cas, sa réflexion par rapport à la direction que prenaient les tunnels annexes partant de la verrerie était pertinente.
Quoi qu’il se passe dans ces tunnels, ce n’était pas net. Et c’était dangereux, comme Chorune venait de le ressentir. Elle imagina aisément Nualia passant lentement de jeune fille apeurée dans une porcherie à démone assoiffée de vengeance. L’explication de certains des évènements récents se trouvaient dans ces tunnels. Mais pas tous. A commencer par : Que font ces tunnels ici ? Qu’est-ce qu’il y a dedans ?

Héléa rappela qu’à chaque jour suffisait sa peine. Finalement, la prêtresse de Gorum avait plus de patience que l’adepte de Sarenrae. Comme si, pour chacune, le dieu permettait un équilibre.
« Ho bon ça va » répondit Chorune à Héléa, encore honteuse de son attitude d’il y avait deux nuits. « Et pis, on me laisse jouer avec des épées à deux mains et des gobelins, mais la bière, c’est trop dangereux ? » releva-t’elle. A la réflexion, elle aussi aurait bien besoin d’un remontant.
Elle s'engagea sur le chemin vers l'auberge avec ses compagnons.

« C'est pas tant la bière que ce qui se passera quand tu seras cuite. Si ça dégénère, tu tiens à te réveiller en cellule? Ou pire, dans le lit de quelqu'un dont tu te souviens pas?

Crois moi, je te le conseille pas... Enfin, d'après ce qu'on m'a raconté, hein... Ça m'est jamais arrivé. Bien sur, ah ah ah...

Misère... »

Et la prêtresse se dirigea vers la ville de plus belle...

Mérisiel était pour le moins contrariée.
Avoir pataugé dans la boue des cochons n'avait presque rien donné, à part un accès de colère inexpliqué de la part de la jeune Chorune.
Mais cette obstination d'Héléa à ne rien faire pour aujourd'hui, alors qu'il restait du temps dans la journée et que les gobelins risquaient de débarquer n'importe quand la perturbait au plus haut point.
Elle rejoignit donc Héléa en quelques vives enjambées pour lui demander : « Dis-moi, Héléa, c'est pour laisser les gob nous tomber dessus par surprise que tu veux rentrer te pinter à l'auberge ? »

« Nan, nan, c'est pas ça... Juste que là... »

Son regard se perdit sur la ville avant qu'elle n'enchaîne:

« On m'a entraîné ces dernières années pour faire face à ce genre de situations, les conflits, la guerre et la dévastation... Mais se dire que ça va arriver si on ne fait rien pour l'empêcher... Pas quelqu'un d'autres mais toi, personnellement... Que des gens comptent sur toi pour empêcher ça... Et que t'as pas le droit de te rater sous peine qu'il y ait des morts? Sympa comme responsabilité, non?

Alors ouais, j'ai envie d'oublier pour ce soir. Demain, je serai fraîche et dispo, prête à m'occuper de tous les gobelins du monde, mais ce soir... Je serai juste Héléa, une fille loin de chez elle qui a envie de penser à autre chose. Maintenant, si ça te défrise, je te rappelle qu'on est lié par rien alors fais ce que t'as à faire et me fais pas chier...

Merde, bordel, c'est trop demander?

J'ai même pas 22 ans et si ça se trouve, d'ici quelques jours, je me viderais de mon sang dans les rues alors j'ai bien le droit de m'amuser un peu, non? Espèce de... »

Ravalant le flot d'injures qui allait sortir, Héléa soupira avant de secouer la tête et de prendre un autre chemin, préférant aller se promener tranquille. Et seule, surtout.

Chorune ouvrit des yeux ronds face à la réaction d’Héléa. Etait-elle en pleine crise, comme celle qu’elle-même avait subi un peu plus tôt ? Ces lieux étaient vraiment très malsains.
La jeune fille courut derrière la guerrière. « Allez, Héléa, viens avec nous. Personne ne te demande rien. Et qui va m’empêcher de boire, hein, si t’es pas là ? Y a personne qui va oser… »
Chorune avait les même angoisses qu’Héléa. Elle avait tout juste seize ans, et sa vie avait déjà été mise en jeu de nombreuses fois. En plus, cela n’était pas près de s’arrêter, vu les circonstances.
Après les combats de la matinée, les achats et les recherches concernant Nualia en début d’après-midi, et la fouille minutieuse de la porcherie, Chorune était claquée. Elle aussi n’irait pas courir le démon dans les souterrains cette nuit. Elle avait fort besoin de ce remontant que la mairesse leur avait donné.