Chorune ouvrit de grands yeux quand Héléa parla de plusieurs hommes, mais se rassura lorsqu’elle comprit que la prêtresse plaisantait… comme depuis qu’elle était réveillée. « Brouf. Va falloir que je m’excuse auprès de ce barde… Laurel… Je suis chez Ameiko, c’est ça ? »
L’adolescente tenta de se lever. « Oulà… Ca tourne… z’avez pas un remontant ? » dit-elle d’une petite voix, montrant qu’elle n’avait pas perdu son sens de l’humour. Malgré sa bravade, Chorune se sentait mal. Honteuse. Sale. En passant devant le miroir d’Ameiko, elle reconnut la tête qu’elle faisait à l’annonce de la mort de Salfon. Pas terrible… en conclut-elle, même si d’habitude, la couturière n’était pas particulièrement attentive à son apparence extérieure. Chorune n’avait pas l’habitude de boire, en tout cas, pas autant. Etait-ce l’ambiance qui avait provoqué ce comportement ? La robe qu’elle portait, et qui lui avait attiré des regards masculins envieux ? En tout cas, le lendemain de ses exploits, la jeune fille n’était pas bien fière, et les blagues d’Héléa n’arrangeaient pas son sentiment de solitude.
Il était déjà heureux qu’elle ne se soit pas « énervée », la veille au soir. Cette perspective lui fit subitement peur, à postériori. La voix de son grand-père, étrangement essoufflée, lui vint opportunément à l’esprit : Ma petite chérie, tu m’as donné du fil à retordre, cette nuit…
Etait-ce elle qui avait vraiment pensé cela ? Chorune secoua la tête en soupirant. Décidément, l’alcool menait à des idées étranges.
« Vais rentrer me mettre une tenue, et prendre un bain, et manger, et dormir… Verrai Laurel plus tard… » annonça-t’elle comme programme pour la matinée. A mi-chemin vers la porte, elle se retourna : « Heu… ben… merci de m’avoir ... heu... couchée… » Sentiment de solitude. « Ameiko, je te dois combien ... heu... j'ai rien cassé ? » Y'a plus qu'à espérer que personne ne m'ait vu...
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