|
Chapitre 1 : Rencontre à Everlund
Mercredi 15 Alturiak, mois des griffes du froid de l'an 1367 DR
À Everlund, dans les Marches argentées
Les rues d'Everlund étaient désertes en ce froid mois d'Alturiak. Il faut dire qu'en ces longs mois d'hiver, la ville semblait s'arrêter, le temps de la saison froide. C'est aussi le froid et le manque de vivres qui avaient amené Tarham dans la bourgade. En effet, bien qu'il s’accommode plutôt bien de la vie de solitaire dans les montagnes de Néther, l'hiver de 1367 DR était un des plus rudes qu'il n'avait jamais vu et, même pour quelqu'un d'expérimenté comme lui, la nourriture se faisait rare dans les forêts rocailleuses environnantes à Everlund.
L'homme passa une des grandes portes du côté nord de la ville, puis après une vérification sommaire, les gardes le laissèrent passer sans faire d'histoire. Il faut dire que les peaux qu'il transportaient étaient recherchées par les marchands et les tailleurs de la ville, particulièrement pendant la saison froide.
Tarham était chaudement habillé, à la manière des montagnards, portant une épaisse cape dotée d'un capuchon et des vêtements en peau d'ours et de loup. Son habillement rustique lui donnait un air un peu rustre à comparer à celui des habitants d'Everlund. Les habitants de cette cité marchande étaient toutefois habituées à ce que des étrangers viennent du nord pour y commercer. Aussi, il n'attira que peu l'attention.
L'homme avait un contact à qui il venait de temps à autres porter ses peaux. Il les échangeait contre des pièces de monnaie qu'il pouvait ensuite ré-échanger contre de la nourriture et du nouvel équipement de suivie. Il n'eut pas trop de mal à trouver l'endroit qui s’appelait Les bottes d'Hethmeir. Malgré son nom, l'endroit proposait un choix de vêtement beaucoup plus polyvalent que de simples chaussures.
Tarham marchanda un peu, puis réussit à échanger ses peaux contre un paquet de pièces d'or. Il avait du loup, du vison et même la peau presque complète d'un ours des cavernes qu'il avait traqué pendant des jours. C'était une belle consolation pour tant de travail. Ravi, le demi-elfe se surprit à vouloir passer la nuit dans un lit confortable, au chaud dans une auberge. Soit, il ne se gâtait que rarement et le soleil allait se coucher dans quelques heures.
«Le Cerf traqué fera l'affaire pour cette nuit!» pensa le demi-elfe qui prit le chemin de l'auberge allégé de sa lourde cargaison de peaux, mais plus riche de bien des écus.
***
Cela faisait désormais une semaine que Léia était arrivée à Everlund. Originaire du Cormyr, elle avait traversé les steppes du désert d'Anauroch avec l'espoir de rejoindre les montagnes de Néther. La femme était une pieuse religieuse dévouée à Helm, dit le Vigilent qui poursuivait une carrière religieuse conditionnée par une foi qui semblait sans bornes et par la pression de sa famille, une riche famille de nobles d'Arabel, dans le Cormyr.
La jeune femme ne savait pas trop ce qu'elle était venue chercher dans ces contrées glacées, mais une chose était sure, elle n'entendait pas repartir avant d'avoir trouvé ce qu'elle cherchait. À l'origine de son périple était une trouvaille qu'elle avait faite en fouillant dans de vieux écrits au temple d'Helm à Arabel. On y mentionnait un ancien complexe dédié à la divinité qui contiendrait les reliques de saints combattants. Le fait qu'on lui connaissait une grande sagesse surprit plus d'une personne de son entourage lorsqu'elle leur annonça qu'elle partait à la recherche de ses ruines avec rien d'autre qu'une vague mention d'un ancien temple perdu dans les hauteurs glacées des Monts Néther. Léia était toutefois déterminée à trouver et à rapatrier ces reliques dans un temple de Helm.
Depuis son arrivée, il y a une semaine, la jeune femme logeait au grand temple de Helm d'Everlund, mais son insistance à vouloir trouver cet endroit irrita rapidement les autorités cléricales qui ne voyaient dans sa quête qu'un caprice de citadine. Pis encore, les rapports avec le reste du corps clérical s'étaient grandement détériorés ces deux derniers jours alors qu'elle avait tenté de recruter des recrues pour une expédition. Les prêtres lui avaient fait comprendre qu'elle n'avait pas l'autorité nécessaire pour prendre de telles décisions et encore moins pour mettre la vie de profanes en danger dans des expéditions en plein hiver.
Aussi, Léia avait-elle préféré s'éloigner du temple et logeait depuis la veille à l'Auberge du Dragon Rêveur. L'endroit était confortable et principalement fréquenté par des elfes et des hafelins. On y présentait chaque soir des récits et des contes d'aventure qui faisaient courir les foules. L'auberge se trouvait près d'une porte à l'est qu'on appelait la porte Rivière-basse, en raison de la Rauvine, une rivière qui coupait la ville en deux, d'est en ouest.
Comprenant qu'elle devrait se débrouiller seule pour mener son projet d'expédition à terme, Léia en conclut qu'elle devrait elle-même lever un groupe d'aventuriers intrépides qui l'accompagneraient dans son périple. Par contre, les seules personnes qu'elle croisait au Dragon rêveur étaient des badauds sans histoires, trop habitués à leur confort pour même envisager de s'aventurer dans les Monts Néther qu'on disait infestés d'orcs et d'hobgobelins.
Aussi, en cette fin d'après-midi la jeune femme eut l'idée de demander à l'aubergiste, un elfe très poli du nom d'Enoriel, où elle pourrait bien trouver des mercenaires à Everlund.
-« Ah! », s'exclama Enoriel, « c'est pas ici que vous allez trouver des aventuriers prêts à vous suivre! »
-«Et où donc, alors?» demanda Léia, découragée.
-« Bah je sais pas moi... » répondit l'elfe avec un grand sourire. Enoriel était vraisemblablement embarrassé par les questions de la clerc et doutait fort qu'elle ne trouve des gens pour l'accompagner, surtout par du temps si froid. « Essayez donc à l'auberge du Cerf cerné. » finit par répondre l'aubergiste. « C'est un endroit un peu moins bien tenu qu'ici et fréquenté par des aventuriers de toutes sortes... Si quelqu'un peut vous aider à Everlund, c'est là que vous le trouverez. »
-«Oh! Merci Enoriel!» s'exclama la femme dont les yeux bleus s'étaient remis à briller d'optimisme.
***
C'est assit bien confortablement dans un sofa d'un des petits salons du Cerf cerné que Gueril fumait sa pipe. Il laissa un mince filet de fumer s'échapper de sa bouche, puis ramassa un livre qu'il avait laissé sur une petite table devant lui. Le gnome ouvrit le bouquin, puis se remis à lire, absorbé par tant d'information. Malgré son âge peu avancé, il avait le crâne dégarni et le bleu foncé de l'iris de ses grands yeux globuleux se mariait parfaitement avec les tons cyans de sa toge de velours.
Au loin, des cris et des rires provenant de la grande salle venaient de temps à autre troubler sa quiétude, mais Gueril restait concentré, buvant chacune des paroles de son livre. Seules quelques bouffées de pipe venaient ponctuer cette activité. Une serveuse se risqua finalement à l'aborder, voyant que sa tasse était vide.
-« Alors, je vous sert autre chose? » demanda la femme au décolleté plongeant et à l'épaisse chevelure rousse.
-«Oh...! Heu, oui. Une autre infusion s'il vous plait.» demanda le gnome.
La femme n'engagea pas d'avantage la conversation puis repartit en direction du bar.
Dérangé le temps d'un instant, Gueril s'était surpris à repenser à la raison de sa venue à Everlund. À priori, lui qui était originaire d'Eauprofonde n'avait rien à faire dans ces contrées gelées, surtout pas pendant le mois d'Alturiak. C'est toutefois sa conditions qui l'avait menée ici, en quête d'un remède. On lui avait toujours dit qu'il n'était pas malade, qu'il n'avait simplement pas de force, qu'il était fait comme ça. Comme de fait, il pouvait à peine soulever une épée pour se battre.
Ainsi, les moqueries n'avaient jamais cessé et toute sa vie on s'était moqué de lui à l'école arcanique, mais aussi chez lui, ses frères l'appelant «le faiblard». C'en était assez pour lui pour chercher par tous les moyens une solution à son problème. Doté d'une grande intelligence, il s'était toujours abreuvé de récits de voyages et avait finit par lire qu'il existait des objets magiques capables d'augmenter certaines propriétés physiques, dont la force.
C'est donc sans réel objectif qu'il déambulait sur les routes du continent de Faerûn en quête d'un objet quelconque qui pourrait lui donner la force à laquelle il s'estimait avoir le droit. Pour l'heure, son ouvrage sur l'histoire des monts Néther absorbait toute son attention. L'aventure attendrait.
***
-« Ferme ta gueule, Lando! » s'écria, fou de rage, l'homme borgne.
-«Non, mais attends, Rick!» s'écria Lando, attaché sur une table et à la merci de ses geôliers.
-« Quoi? » s'écria ensuite le borgne tout ne éloignant sa dague de l’œil du pauvre homme.
-«Je peux trouver ton fric! Je te le jure! Je... Je sais où le trouver!» supplia le voleur.
-« Ah ouais? Tu m'as pourtant dit ça la semaine dernière, et celle d'avant aussi. » répondit Rick, alors que ses laquais gloussaient de rire, indifférents au sort du pauvre Lando.
-«Non! Mais je te jure que cette fois-ci j'ai un plan!» s'écria le voleur. «Tu vas avoir ton argent dans les temps de le dire!»
-Le dénommé Rick soupira, puis reprit la parole. « Et dis-moi, mon cher Lando, comment vas-tu t'y prendre cette fois-ci? C'est une sacrée somme que tu me dois! »
-«Il y a une femme! Une Cormyrienne! Elle cherche des aventuriers pour une mission dans les montagnes. Elle est blindée de fric!» pleurnicha le voleur. «Je l'ai écoutée parler au Dragon rêver hier soir. Elle est pleine aux as et paiera grassement quiconque voudra bien la suivre.»
-« Tu me prends pour un idiot? C'est ça ton plan? » se fâcha l'homme borgne alors que ses hommes de main s'étaient remis à rire. « Tu crois que je vais t'attendre ici pendant que tu te fais tailler en pièces par des orcs dans les montagnes? Je préfère le faire moi-même! »
-«Non! Attends, tu ne comprends pas!» répondit Lando sur un ton suppliant. «Je vais pas aller dans les montagnes, voyons! Je vais l'escroquer en me faisant passer pour un gentil aventurier et te ramener le fric! Elle... Elle offre 100 pièces d'or par tête! C'est beaucoup plus que ce que je te dois.»
Les bandits se turent et Rick le borgne se prit le menton, songeur. « Je vois... 100 pièces d'or, ça couvrirait aussi les intérêts que tu me dois. »
-«Quoi? Les intérêts?» s'exclama Lando qui n'était pourtant pas dans une position de marchander.
L'homme rapprocha son couteau de l'iris noisette du voleur puis répliqua. « Oui! Les intérêts! » dit-il, insistant. « Très bien, détachez-le! » s'exclama-t-il alors que ses hommes s’affairèrent à défaire ses liens.
-«Oh! Merci Rick, tu ne le regretteras pas!» s'exclama Lando, un grand sourire estampé au visage et les yeux pleins d'eau.
Le borgne s'approcha et le saisit au collet. « Écoutes-moi bien, mon petit merdeux, cette fois est la dernière. Ou tu m'apportes mes 100 pièces d'or demain avant le coucher du soleil, ou on te retrouvera dans la Rauvine... Me suis-je bien fait comprendre? »
-«Ou... Oui, Rick, ne t'inquiète pas, tout est sous contrôle, tu auras ton argent demain!»
Lorsqu'on le jeta dehors du petit entrepôt ou on l'avait amené pour l'estropier, Lando se retrouva dans une rue enneigée d'Everlund. Il lui fallut quelques temps pour comprendre où il était, puis il se remit en route. Le voleur l'avait vraiment échappé belle!
«Quel idiot, s'il croit vraiment que je vais lui donner ses 100 pièces d'or! Il aurait mieux fait de me tuer. pensa Lando. L'homme se remit en marche en direction du Dragon rêveur, c'est là qu'il comptait y trouver la femme qui recrutait des aventuriers.
Après une bonne quinzaine de minutes de marche, Lando arriva finalement à l'auberge. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque l'aubergiste, Enoriel, lui annonça qu'il quelle était partie en direction du Cerf traqué pour trouver des aventuriers. Le cœur du voleur manqua de s'arrêter et il repartit au pas de course en direction de l'auberge.
«Si elle a déjà trouvé ses aventuriers, je suis cuit!» pensa Lando alors qu'il dévalait les rues d'Everlund en direction du Cerf cerné.
***
Le Cerf traqué était une de ces auberges agréables où régnaient toujours bonne ambiance et réconfort. L'endroit devait son nom à une grande tapisserie qui montrait la partie de chasse d'un groupe de chasseurs elfes. La scène mettait en évidence la proie de ces chasseurs qui se trouvait dans ses derniers retranchements. Étonnamment, on sentait une réelle noblesse dans cette tapisserie et le sacrifice de l'animal était présenté comme un don de la nature.
Il y avait une bonne vingtaine de personnes dans la salle principale lorsque Tarham entra. Il fut soudainement enveloppé par une réconfortante chaleur et le délicieux fumet des plats qui trainaient sur les tables. Cela fit drôle au rôdeur de voir tant de gens ainsi réunis au même endroit, lui qui était habitué à une vie d'errance et de solitude.
L'homme s'avança vers le bar en contournant les tables et les clients du Cerf traqué. La grande salle était typique des auberges de Fearûn; l'endroit était tout de bois à l'exception d'un grand foyer dont la chaleur chauffait les convives de l'auberge. La majeure partie de la clientèle était composée d'humains. Il y avait néanmoins quelques elfes, hafelins et même une bande de nains, sans doute des voyageurs. En effet, le Cerf traqué avait la réputation d'accueillir les aventuriers de toutes sortes qui s'y rencontraient pour préparer leur expédition dans les Terres sauvages.
Tarham atteint finalement le bar. Il trouva un tabouret esseulé et s'y assit, déposant son paquetage tout près. À première vue, l'endroit avait bien peu changé depuis sa dernière visite il y avait plus d'un an de ça. À sa droite, deux hafelins riaient bruyamment tandis qu'à sa gauche, un vieil homme était endormi, probablement d'ivresse, la tête sur le comptoir.
Alors que le rôdeur cherchait qui il pourrait bien le servir, un hafelin sembla surgir de nul part, alors qu'il monta sur une marche derrière le comptoir. Il portait une petite barbe poire et sel et fumait la pipe.
-« Bonjour! bienvenue au Cerf traqué, qu'est-ce que je peux faire pour vous? » lança le petit homme sur un ton enjoué.
-«Servez-moi une de vos bières locales, mon brave.» répondit Tarham.
-« Ça vient tout de suite! » renchérit l'hafelin. « Oh, et avant que j'oublie, on vous prépare une chambre pour la nuit? »
-«J'aimerais, oui. Je crois que je vais rester un ou deux jours à Everlund, le temps d'acheter tout ce qu'il me faut.»
« Bien! J'envoie une ménagère vous préparer un lit dans une chambre commune! »
-«Non!» répondit le rôdeur d'un ton désintéressé. «Je veux une chambre privée...» répondit Tahram en jetant sa bourse sur le comptoir.
-« Ah... D'accord... » répondit l'aubergiste, manifestement surpris de voir un être si rustre avec tant d'argent.
L'hafelin descendit ensuite, puis disparut derrière une porte qui se trouvait derrière le bar.
Pendant la conversation entre Tarham et l'aubergiste, une vague de froid était momentanément venue se fondre dans la chaleur ambiante. Une femme avait ouvert la porte et était entré dans le Cerf traqué. C'était Léia. On la reconnaissait à sa cape mauve à l'effigie de Helm qui couvrait sa cotte de maille. La femme était assez jolie et elle ne manqua pas d'attirer les regards des clients de l'auberge.
Ne sachant pas trop comment s'y prendre pour recruter la femme décida de simplement passer tout droit dans la grande salle et d'aller dans un des deux petits salons de l'auberge. Léia se fraya un chemin à travers les tables, puis arriva finalement dans le petit salon qui se trouvait à l'ouest de la grande salle.
En arrivant, la femme put voir que l'endroit était beaucoup plus petit et qu'il comprenait un escalier qui montait à l'étage. Quelques sofas étaient répartis dans la petite salle et un foyer brûlait, réchauffant et éclairant l'endroit. Il y avait aussi quelques petites tables qui étaient pour la plupart des tables de chevet.
Étonnement, il n'y avait qu'un seul occupant dans le petit salon, un gnome qui était si absorbé par ses lectures qu'il ne vit pas Léia rentrer. La femme soupira, elle s'attendait à trouver plus de gens ici, et surtout des aventuriers et non un frêle gnome occupé à fumer sa pipe. La clerc poussa un soupir, puis fit demi-tour pour retourner dans la grande salle.
-«Que se passe-t-il, gente dame?» raisonna alors dans pièce.
Léia s'arrêta net et se retourna vers le gnome, qui n'avait toujours pas levé les yeux du livre qu'il était en train de lire.
-«Je... Ben... En fait j’espérais trouver des gens ici...» répondit la femme, incertaine.
-«Mais vous m'avez pourtant trouvé.» fit remarquer Gueril.
-«Oui... Mais vous n'êtes pas exactement le genre de personne que je recherche.»
-«Et que genre de personne cherchez-vous exactement?»
-«Je... Et bien des gens qui pourraient m'aider...»
-«Et je ne pourrais pas être cette personne?»
-«Et bien si, mais c'est que je cherche des guerriers pour m'accompagner dans une mission périlleuse...»
La femme resta alors songeuse un instant. De son côté, le gnome referma son livre, puis le posa devant lui sur une petite table en bois.
-«Venez donc vous assoir... Je vous en prie...» dit Gueril, les yeux pleins d'empathie.
-«Très bien...» répondit la femme en s'assoyant maladroitement à cause de sa cotte de mailles.
-Dîtes-moi, maintenant ce que vous cherchez. Peut-être que je pourrais vous être utile, ne sait-on jamais. proposa le gnome, entre deux bouffées de pipe.
Soit, la femme entreprit d'expliquer à ce drôle de personnage quel genre de personne elle cherchait et surtout pour l'accompagner dans quelle périlleuse mission.
***
Lando soufflait sur ses mains pour les réchauffer alors qui marchait en direction de l'auberge du Cerf traqué. Si son plan ne fonctionnait pas, il pensait déjà à comment il devrait quitter Everlund...
Finalement, il arriva devant le bâtiment. Il poussa péniblement la grande porte en bois qui le mènerait dans le Cerf traqué puis pénétra dans l'auberge. Lando referma la porte derrière lui, puis s'avança dans la salle à la recherche de celle qu'il avait entendu proposer d'embaucher des aventuriers la veille.
-«Merde...» rouspéta le voleur, ne voyant pas la femme dans la grande salle commune. Il s'avança, jetant des regards de droite à gauche. Il n'y avait toutefois rien à faire, la Cormyrienne n'était pas là!
Le voleur qui connaissait assez bien l'endroit eut donc l'idée de vérifier à l'un des petits salons si elle ne s'y trouverait pas. Rapidement, il traversa la grande salle, jetant des regards tout autour. «Quel drôle d'allure...» pensa Lando en voyant un grand montagnard à l'allure rustre accoté seul au bar. Il n'en fit toutefois pas plus de cas et se dirigea vers le salon à l'ouest du bar duquel émanaient des airs musicaux. En entrant, le voleur eut la fâcheuse surprise d'y découvrir une dense foule qui s'y était massé pour entendre jouer des troubadours venus du sud.
Pas de chance, l'homme retourna presque immédiatement dans la grande salle, prenant le chemin de l'autre petit salon qu'il savait généralement moins fréquenté. D'autres clients avaient fait leur entrée dans l'auberge et il y avait désormais une bonne trentaine de clients, seulement dans la grande salle. On se marchait carrément sur les pieds, mais c'était compréhensible; avec le froid qu'il faisait dehors, tous voulaient être au chaud.
Au passage, deux homme qui se chamaillaient bousculèrent Lando qui fut projeté sur le rôdeur qui était toujours assit au bar. Le voleur leur envoya une réprimande qui fut presque ignorée par les deux hommes ivres, puis se retourna vers celui qu'il venait de bousculer. C'était l'homme rustre qu'il avait remarqué plus tôt. Le roublard voulu dire quelque chose, mais Tarham s'était retourné et fixait Lando d'un regard noir.
-«Ouais... Bon heum c'est eux qui m'ont poussé...» se contenta de dire Lando.
Il repartit ensuite vers le petit salon alors que le rôdeur retourna à sa consommation. Manifestement, aucun des deux hommes n'en fit de cas et le voleur finit par atteindre le petit salon dans lequel il retrouva Leia et Gueril en train de discuter. Il n'y avait d'ailleurs personne d'autre. À prime abord, le Lando ne voulut par trahir la raison de sa présence et il alla simplement s'asseoir sur un des sofas qui se trouvait à l'autre extrémité de la salle.
La femme et le gnome s’interrompirent un instant, le temps que le nouvel arrivant s'installe, puis il reprirent sans trop faire de cas de sa présence.
-«Alors si je comprends bien, vous êtes à la recherche d'un ancien temple dédié à Helm qui se trouverait quelque part dans les montagne...» lança le gnome en tirant une traite sur sa pipe.
-«C'est bien ça.» répliqua la femme d'un ton sûr.
-«Voila qui est assez intéressant... Je dois dire que je suis, moi aussi, à la recherche de quelque chose.»
-«Et qu'est-ce donc?» demanda Leia, incertaine de sa réponse.
-«En fait, comme vous, je ne sais pas exactement ce que je recherche. Vous voyez, je suis né avec une dégénérescence quelconque qui fait que je suis très faible. Or, il se trouve que j'ai entendu parler de certains objets dans Faerûn qui peuvent donner une force surhumaine. N'ayant jamais pu mettre la main sur l'un d'eux, j'ai décidé de quitter Eauprofonde pour en trouver un et ainsi pallier à mon handicap.»
-«Je vois...» répondit la clerc suite aux révélations du gnome.
«Je sais, je sais.» répondit Gueril, un sourire en coin. «Tous trouvent mes motivations assez étranges. Par contre, vous devez comprendre que le simple fait de tenir cette pipe constitue pour moi un effort.»
De son côté, Lando avait tout entendu et voulait rire, mais il se retint de peur de fâcher la femme.
-«Sachez par contre que si je ne suis pas fort, je suis doté de capacités magiques hors du commun.» continua Gueril.
-«Je comprends.» répondit Leia, amusée. «Si vous le désirez, je serais ravie de vous compter parmi mon groupe d'aventuriers! Au point où j'en suis, n'importe quelle aide sera la bienvenue!»
-«Excellent!» lança le gnome, ravi. Il tendit ensuite sa petite main à la femme.
Lorsque Leia la saisit pour la serrer, elle réalisa qu'il disait vrai. Son interlocuteur arrivait à peine à serrer sa main tellement il était dépourvu de force. Le regard de la femme changea et elle serra la mâcheoire, incertaine d'avoir fait le bon choix.
-«Marché conclut...» finit-elle par dire.
«Merde! Elle a déjà trouvé des gens pour son expédition!» pensa Lando, au bord de la crise de nerfs. Il se leva alors d'un bond du sofa et s'interposa.
-«Je veux venir aussi!» s'écria alors le voleur.
Gueril et Leia se retournèrent alors vers l'homme, ne comprenant pas trop ce qu'il voulait.
«Vous voulez venir où?» demanda alors la clerc, non trop sûre d'avoir compris.
«Ben dans les monts Néther!» répliqua le voleur, derechef.
Gueril éclata de rire alors que Leia semblait abasourdie.
«Et comment vous savez ça, vous?» fit la femme, en croisant les bras.
«Je vous ai entendu hier, à l'auberge du Dragon rêveur.» répondit Lando. «Heu vous cherchez toujours des aventuriers pour vous accompagner dans les montagnes, non?»
«Heu, oui, c'est bien le cas, mais savez-vous dans quoi vous vous aventurez vraiment?»
«Oh! Absolument! Je connais ces montagnes comme le fond de ma poche. Je pourrais vous servir de guide sans problème!»
«Vrai... Vraiment?» se surpris la religieuse, soudainement intéressée.
«Mon nom est Lando, de Caer Callidyrr, dans les Moonshaes. Pour vous servir madame!»
Si la femme semblait intéressée à la candidature du voleur, c'était différent pour Gueril qui semblait se méfier de cet homme qui, à priori, était sorti de nul part.
«Nous servir de guide, hein?»
«Oui m'sieur! Je connais ces montagnes comme si je les avais faites moi-même!» menti Lando.
«Je vois...» soupira finalement le gnome en prenant une bouffée de sa pipe et en roulant les yeux.
Leia s'approcha alors de Lando qui devait avoir la même grandeur qu'elle, puis lui sourit.
«Très bien, Lando. Bienvenue dans l'équipe!» dit elle, tout sourire.
«Vous ne le regretterez pas!» s'écria le voleur.
L'homme et la femme s'échangèrent ensuite une vive poignée de main sous le regard sceptique du gnome qui se méfiait grandement de ce beau parleur.
-«Donc...» dit avidement Lando, «J'ai cru vous entendre mentionner un cachet de 100 pièces d'or pour quiconque vous aiderait...»
-«Ha!» s'écria alors Gueril. «Je le savais! Il n'est là que pour le fric!»
-Non, mais ça va pas... J'suis là pour... pour l'honneur! répondit le voleur du tac au tac.
-«Menteur!» répliqua aussitôt le gnome.
Le gnome se leva du sofa alors que le voleur s'approcha de lui, comme s'ils s'apprétaient à en découdre. Certes, l’illusionniste n'était pas doté d'une grande force, mais il ne donnait pas non plus sa place.
-«Allons, calmez-vous!» s'écria alors Leia qui peinait à s'imaginer que les deux puissent coexister le temps de l'expédition. «En effet, j'avais promis 100 pièces d'or à quiconque m'accompagnerait dans mon périple, et je vous les ai proposées aussi, Gueril.»
-«Oui, mais certaines autres motivations motivent clairement le fait que je vous accompagne. Ces 100 pièces d'or ne sont rien pour moi! Je pourrais tout aussi bien y renoncer, tant que je trouve ce que je cherche, il n'y a pas de différence!»
Lando restait silencieux. Il était heureux que la femme ait aussi bien réagit, mais ce gnome se montrerait une réelle épine à son pied.
-«Bon, c'est pas grave... Je faisais que demander...» déclara ensuite Lando sur un ton miteux.
-«Ne vous inquiétez pas, je comprends que l'argent est une de vos préoccupations.» dit la clerc. [color=#BF00FF]«Vous aurez sans doute aussi besoin d'argent pour vous équiper, alors voici vingt pièces d'or pour vous équiper et vous aurez le reste à notre retour.»
«N... Non, quoi?» s'effondra le voleur, «Non, mais vous ne comprenez pas, il me faut absolument ces 100 pièces d'or pour demain sinon...»
«Sinon quoi?» intervint sèchement le gnome.
«Sinon... Ben... Rien, c'est qu'il me les faut...» s'impatienta Lando.
«Ce doit être une autre de vos escroqueries! Je connais les types dans votre genre! Ceux qui proposent leur aide et qui se barrent avec le fric avant que le service n'ait été rendu!»
«Pardon?» s'exclama alors celui qui venait des Moonshaes, furieux. «Je peux aussi me barrer et na pas vous aider! Je vous rappelle que vous n'avez pas de guide et que trouver quelqu'un qui acceptera de vous guider dans les montagne risque d'être une tâche des plus ardues par les temps glaciaux que l'on connait.»
Encore, la femme sembla s'impatienter de tant d'échanges houleux entre ses deux futurs compagnons de voyage.
-«Mais enfin, vous allez finir par vous calmer! On n'est même pas partis que vous vous chamaillez déjà comme de vrais enfants!» soupira Leia. Monsieur Lando, je craint de ne pas disposer d'assez d'argent pour l'instant... Ma famille a envoyé une lettre de change par convoi d'Arabel, mais elle ne devrait arriver que d'ici une semaine... J'aurai alors accès à l'or que je vous ai promis, mais pas avant...
-«Non... C'est pas vrai...» faillit s'évanouir Lando en s'effondrant dans un des sofas.
-«Je... Est... Est-ce que ça va?» s'inquiéta la clerc de Helm. «J'aurais certes aimé vous donner plus, mais pour l'instant c'est tout ce que je peux vous donner... En fait, c'est tout ce que j'ai...»
Lando ne répondit pas tout de suite. Lui qui était désormais acculé au pied du mur voyait sa dernière chance de repayer sa dette à Rick le borgne s'envoler. De son côté, Gueril s'était calmé et il avait rallumé sa pipe. Le gnome lançait toutefois toujours des regards noirs en direction de l'homme désespéré.
-«Lando... Êtes-vous bien sûr de toujours vouloir vous embarquer dans cette expédition?» demanda la femme, incertaine.
-«Non... En fait, oui... En fait, je ne sais plus...» soupira le voleur qui se tenait la tête à deux mains.
-«Y a-t-il quelque chose que nous devrions savoir à votre sujet, Lando?» demanda alors le gnome, tout en en exhalant un fin filet de fumée.
-Je... Je ne sais pas si... dit Lando, les larmes aux yeux.
-Vous... Vous pouvez tout nous dire. lança alors Leia.
Le voleur fut d'abord réticent à dévoiler ses motivations, mais il finit par le faire, au bord du désespoir. De plus, l'homme dut se rendre à l'évidence; il avait bien du mal à s'imaginer dérober de l'argent à cette femme qui lui faisait pleinement confiance. Il n'y avait certes pas d'honneur parmi les voleurs, mais ces gens n'en étaient pas.
-«Je comprends à présent.» s’émut Léia. «Une dette est une dette, je le conçois, mais si nous allions expliquer à ce Rick et à ses hommes que vous les rembourserez dans une semaine, peut être qu'ils comprendraient.»
-«Non... Vous ne comprenez pas... Ce ne sont pas des chics types... Il ne me reste plus qu'à fuir la ville.»
-«Vous n'aurez qu'à le rembourser lorsqu'on sera revenus. Tôt ou tard, de toute façon, il nous faudra bien revenir chercher de la nourriture à Everlund.» proposa alors le gnome.
-Je vais simplement foutre le camp d'ici et vous suivre. Lorsqu'on sera de retour je le rembourserai et si ça ne fait pas, je quitterai Everlund pour de bon... conclut Lando.
-«Si c'est ce que vous désirez...» sourit Leia. «Je serais honorée que vous veniez avec nous!»
«Ouais, mais on vous a à l’œil!» s'exclama Gueril, toujours bougon.
La serveuse au décolleté plongeant et aux manières rustres refit alors irruption dans le petit salon.
« Dites-donc! Vous en faites une tête! » s'écria la femme en sentant l'air chargé d'émotion. « Alors, on vous sert quelque chose? »
***
Au bar, Tarham était toujours assis seul. Une bonne heure était déjà passée depuis son arrivée et déjà il avait bu six ou sept pintes de bière. C'était malheureusement là un de ses points faibles; chaque fois qu'il arrivait dans un lieu habité et qu'il avait accès à de l'alcool, il ne pouvait s'empêcher d'en abuser. Heureusement, l'aubergiste avait pris soin de lui faire payer sa chambre avant qu'il ne se mette à picoler, mais les quelques pièces d'or qu'il avait obtenues pour ses peaux étaient rapidement dépensées.
À suivre...
|
FAQ
Publié : 15 Octobre 2014, 05:20
