Ce n'est pas dans mes habitudes de publier mes backgrounds, dans la mesure où je les réutilise souvent pour des PNJ quand le PJ n'a pas eu le temps de faire long feu. Mais comme je joue jamais en ligne...
Celui-ci a été écrit à la va vite pour combler un trou dans une partie pour un MJ débutant, très motivé, mais qui ne connaissait pas du tout l'univers des Royaumes Oubliés, et l'a découvert au fur et à mesure qu'il maîtrisait sa campagne. Donc, comme j'ai la flemme de le relire pour virer les annotations, je préviens, y'a du spoil sur l'histoire des Royaumes Oubliés.
Le but était de faire de mon personnage l'un des Enfants de Bhaal, pour ceux à qui ça parle, afin de lui permettre d'exploiter mon histoire et de lui fournir des amorces de scénarios, voire de campagnes. Le personnage est un mage spé invoc/beguiler (on joue avec des personnages gémellaires).
Dernier détail, certains noms propres sont empruntés à d'autres univers. J'avais pensé les modifier plus tard, mais j'ai jamais trouvé le temps de le faire. Pas la peine de crier au plagiat, donc. :)
Histoire Nathyrra
Petites notes. J’ai voulu faire une histoire qui soit assez complète pour te donner de la matière dans tes scénarios, qui justifie certains éléments de sa condition actuelle (notamment son défaut) et, surtout, qui en profite aussi pour te donner des indications sur des éléments majeurs de l’Histoire de Féérune, que j’utilise dans mes propres parties. Cette fois, on va se concentrer sur le Temps des Troubles. C’est l’événement majeur et fondateur de la seconde édition de d&d, qui a toujours des répercussions sur les éditions suivantes.
D’abord, Ao. C’est le dieu suprême du Toril (la planète qui abrite Féérune, son continent principal). Une poignée de gens seulement, à travers les plans, sont au courant de son existence. Il ne se manifeste pas, n’intervient jamais directement, n’a pas de prêtres et n’accorde ni sorts, ni pouvoirs, ni miracles. Avant le Temps de Troubles, il avait consigné les pouvoirs et attributions de chaque dieu sur ce que l’on appelle les Tables du Destin. Détenir une table signifiait détenir les pouvoirs qui allaient avec.
Trois dieux ont décidé de former une alliance afin de les dérober et accroître leur pouvoir. Il s’agissait de Baine, dieu de la tyrannie et de la duperie, Myrkul, le dieu des morts et très grand fan de morts vivants et en enfin, Bhaal, le dieu du meurtre et des assassins. Quand cela arriva, Ao décida, en guise de punition, de bannir l’ensemble des dieux sur Toril, à l’exception de Heaume (ou Helm en VO), le dieu des gardiens et sentinelles, qui fut choisi pour garder l’accès aux plans divins et empêcher les bannis de revenir.
Cela eut trois conséquences majeures. La premières, les prêtres cessèrent de recevoir leurs sorts. La seconde, Mystra, déesse de la magie, ayant été bannie, la magie devient parfaitement aléatoire et très dangereuse à utiliser. Des zones de magie morte et de magie sauvage apparurent. Enfin, la troisième, la plus importante, les dieux se retrouvèrent au beau milieu des mortels, extrêmement puissants mais on ne peut plus mortels eux aussi.
Un groupe d’aventuriers (ce sont les trois premiers bouquins de la série des Royaumes Oubliés), partit à l’aventure afin de découvrir ce qui se passait. Il était composé de Minuit, une magicienne, Kelemvor, un guerrier, Cyric, un roublard et assassin et un prêtre de Sunie dont j’ai oublié le nom tant il est transparent dans l’aventure. Je te passe les détails, mais au cours de leur enquête, Baine, Myrkul et Bhaal trouvèrent la mort… autant que puisse mourir un dieu. Les dieux récupérèrent leur place. Minuit devint la nouvelle déesse de la magie, Mystra ayant été tuée par Helm alors qu’elle tentait de rejoindre les plans divins. Cyric fit un carton plein et récupéra les attributions de Baine et Bhaal à la fois, devenant un dieu aussi important que puissant. Un peu plus tard (une autre série de bouquins), Kelemvor récupéra les attributions de Myrkul, à la différence près que lui essaie d’être impartial envers les défunts et ne peut pas blairer les morts vivants.
Seulement voilà, un dieu ne meurt pas si facilement. Quand on détruit sa forme physique, son essence divine demeure. C’est ainsi que Myrkul déversa sa conscience et sa puissance dans un artefact que l’on appelle la couronne de cornes (tu le trouveras dans je ne sais plus quel manuel), continuant à vivre ainsi. Bhaal mourut près d’un fleuve qui depuis lors est souillé.
Ces éléments en tête, l’histoire de Nathyrra peut commencer.
Sa vie débuta dans la cité drow d’Eryndlyn. Cette dernière est réputée en raison du nombre incroyables de portails la reliant à l’ensemble de Féérune. Pour cette même raison, bien que sa taille et sa puissance demeurent modestes, Eryndlyn reste une cité de premier plan dans le monde drow, fondant sa prospérité sur le commerce, facilité par les déplacements accélérés que permettent les portails, et la mise à disposition de contacts, d’informations et de point de chute à travers tous les Royaumes. Comme toute cité drow, elle est dirigée par un matriarcat puissant. Les 47 maisons nobles se livrent une guerre permanente pour gagner en puissance et en prestige, les Mères Matrones des six premières maisons formant le Conseil régnant. Nathyrra naquit au sein de la maison Dalshy’yn, huitième maison d’Eryndlyn. Sixième fille de la Mère Matrone Danisha, il était peu probable qu’elle accède un jour au trône de son clan. Consciente que sa lignée était suffisamment nombreuse pour assurer la pérennité de sa maison en dépit des intrigues, complots et coups de poignard dans le dos, Danisha forma d’autres projets pour sa fille cadette.
A l’instar de toutes les filles nobles des villes elfes noires, elle fut envoyée suivre les 50 années d’enseignement que dure la formation d’une prêtresse de Lloth, la principale et redoutable déesse araignée des drow. Danisha ne prévint pas sa fille qu’elle n’avait aucune intention de lui laisser achever sa formation. Au cours d’une des nombreuses cérémonies qui servent de tests, éliminant les plus faibles, indignes de servir la Reine Araignée, elle soudoya les prêtresses chargées de l’examen afin d’orchestrer l’échec de sa fille qui, dès qu’elle entonna sa prière, disparut dans un geyser de flammes plus noires que le Chaos. Tous ceux qui assistèrent à la scène ne virent que le courroux de Lloth et personne ne trouva rien à redire lorsque Danisha proclama qu’elle n’avait jamais eu que cinq filles.
Les flammes invoquées ne servirent qu’à masquer la disparition de sa fille via un sort de téléportation. A tout juste 17 ans, Nathyrra se réveilla dans une cellule froide et nue, lorsqu’une autre elfe noire ouvrit la porte à la volée. Celle-ci l’informa qu’elle était désormais morte et que son nom n’avait jamais existé. Elle lui apprit également que ceci était du fait de sa mère qui souhait la voir intégrer les Sœurs Noires. Un sourire de satisfaction s’est alors étalé sur les lèvres de la jeune elfe. Les Sœurs Noires était une légende à Eryndlyn, une secte d’assassins au service des plus puissantes matrones et, parfois, de ceux suffisamment fortunés pour s’offrir leurs services. Leurs crimes étaient si parfaits que leurs activités étaient toujours sujettes à caution, personne ne croyant réellement en leur existence.
Débutèrent alors les plus dures années de Nathyrra. L’entraînement des Sœurs Noires était impitoyable. Celles qui échouaient étaient éliminées, servant parfois de cibles pour les épreuves des candidates restantes. La concurrence entre candidates était poussée jusqu’à encourager les assassinats pour éliminer les rivales trop prometteuses. Nathyrra comprit rapidement que si la discrétion lui serait vitale, comme à tout assassin, cela ne serait jamais suffisant pour surclasser ses rivales, notamment au sein d’un centre de formation que tout un chacun pouvait parcourir librement, protégé de surcroit par d’innombrables sorts de surveillances et de vigies magiques. Elle développa alors un talent certain pour les intrigues et la manipulation, usant d’un subtil mélange de séduction et de charmes, physiques et magiques, montrant un véritable don pour ces derniers qui lui venaient naturellement, ce qui lui permit en parallèle de se concentrer sur d’autres branches de la magie. Elle réalisa le double exploit de monter dans la hiérarchie des élèves, ne se faisant que rarement soupçonner grâce à ses enchantements et ses subtiles manipulations contre une race dont deux des caractéristiques principales sont une méfiance, justifiée, proche de la paranoïa et une formidable résistance à la magie.
Vingt années plus tard, son corps et son esprit parfaitement affutés, Nathyrra apprit qu’il ne restait plus des trente-huit candidates initiales que les deux plus prometteuses. Le premier sourire depuis celui de son arrivée chez les Sœurs Noires s’étala sur visage de Nathyrra, un sourire de prédatrice qui voit la fin de la piste de l’animal qu’elle traque depuis longtemps. Son sourire se fit encore plus large lorsqu’elle apprit l’identité de dernière rivale : Sobel. Depuis les premiers jours, les deux femmes s’étaient mortellement opposées l’une à l’autre, chacune de leurs tentatives d’assassinat respectives se soldant par des échecs. La puissance et la force brute de Sobel s’étaient révélées trop solides et trop… basiques pour se laisser manipuler par les sorts et la subtilité de Nathyrra qui, de son côté, avait toujours pu se protéger des grossières approches de celle qui se rapprochait davantage d’une guerrière que d’une assassin. Une autre évidence s’imposa à Nathyrra : la dernière épreuve étant un combat singulier, face à face, elle n’avait strictement aucune chance contre Sobel, ses capacités étant trop inférieures et ses sorts n’étant pas du tout destinés au combat. On la laissa plantée dans sa cellule avec pour instruction d’attendre le lendemain sans tenter de s’en prendre à sa rivale d’ici là.
La nuit fût agitée pour Nathyrra, tiraillée entre la certitude d’être tuée le lendemain, que ce soit face à Sobel ou à ses instructeurs si elle tentait quoi que ce soit avant l’épreuve. Un froid calcul la mena à une conclusion évidente : si elle affrontait Saobel, elle mourrait, alors que sa mort ne serait que probable si elle désobéissait à ses maîtres. Elle quitta donc sa chambre, usant de tout son art et de sa connaissance des lieux pour rejoindre la cellule de Sobel sans se faire repérer par les patrouilles, les vigies magiques, les alarmes et les sorts de scrutation que ses supérieurs avaient sans doute placés sur elle. Il lui fallut deux bonnes heures pour y parvenir, bien que leurs logements ne soient distants que de quelques centaines de mètres. Arrivée devant la porte de la cellule, elle soupira de mépris tdevant les pitoyables sorts de protection dont Sobel avait affublé sa porte étaient risibles, se reprochant aussitôt le bruit inutile que provoquait son soupir. Avec une aisance déconcertante, elle contourna les pièges et ouvrit la porte sans bruit, découvrant sa rivale haïe, assise en tailleur contre un mur, entièrement nue, plongée dans la transe méditative qui sert de sommeil aux elfes. C’est dans cette même position que ses instructeurs la retrouvèrent le lendemain, immobile, la gorge ouverte, son corps nu souillé de sang écarlate.
Le Conclave dirigeant les Sœurs Noirs se réunit aussitôt. Il ne leur fallut que quelques minutes pour statuer du sort de Nathyrra : elle reçut les félicitations de tous, personne ne pouvant contester qu’elle était la dernière en lice, donc la lauréate de sa promotion. Un soulagement parcourut l’assassin, qui riait intérieurement en songeant qu’après vingt années d’intrigues, de manipulation, de corruption, de vices et de sévices, c’était finalement un assaut direct frontal qui lui avait ouvert les portes de la victoire.
Elle reçut des mains des Sœurs Aînées une rapière magnifiquement ouvragée, un superbe rubis sculpté en une goutte de sang si réaliste qu’on l’eut dit tirée d’une quelconque énorme créature incrusté dans le pommeau, la coquille figurant une discrète et élégante tête de mort, les quillons délicatement ciselés en deux jeunes elfes tenant une épée se croisant à la base de la lame, symbole des Sœurs Noires.
Sans plus de cérémonie, elle fut renvoyée auprès de sa mère, dans le plus grand secret, qui fut ravie de voir son arme enfin prête. Dans les dizaines qui suivirent, on retrouva les corps des prêtresses soudoyées vingt ans plus tôt pour faire disparaître Nathyrra, effaçant ainsi quelques-unes des rares preuves que la jeune assassin était encore en vie.
Quelques années plus tard, les activités d’Eryndlyn amenèrent suffisamment d’argent dans les caisses du Conseil pour qu’il décidât d’investir dans un projet commun. Au terme d’âpres discussions et quelques meurtres plus tard, il fut décidé de ne pas s’en prendre à une cité voisine en Ombre Terre mais de se diriger vers la surface. L’idée fut critiquée dès le début, d’aucuns craignant que la surface ne représente un trop grand danger pour les elfes noirs, créatures faites par et pour les ténèbres d’Ombre Terre.
Toutefois, le projet vit le jour et une expédition d’une centaine d’individus fut envoyée à la surface pour fonder une colonie et évaluer les intérêts potentiels de cette nouvelle extension du pouvoir d’Eryndlyn. Sous la direction d’Eclavdra, une prêtresse de Lloth issue de la première maison, l’expédition s’établit dans les ruines d’un quartier d’une ancienne cité elfique du Bois de Yuir, Nathyrra les accompagnant sous l’identité d’une excentrique éclaireuse de la maison Dalshy’yn (ce genre de tâche étant d’ordinaire dévolue aux vulgaires mâles). La zone présentait un double avantage. En premier lieu, les ruines furent extrêmement faciles à aménager pour bâtir un avant-poste qui se fondait parfaitement dans le décor. Un observateur non avertie n’aurait vu, en regardant l’avant-poste, qu’une série de ruines inoccupées. Dans un second temps, les mages de l’expédition décelèrent que la forêt entière semblait protégé de toute forme de scrutation et de divination (propriété du Bois de Yuir que tu trouveras dans le manuel de Féérune).L’ambitieuse Eclavdra comprit aussitôt l’intérêt qu’elle pourrait retirer de cet avantage : organiser la colonie et ses activités, ainsi que ses profits, sans avoir à se soucier d’être surveillée par ses supérieures, qui devraient se fier aux seuls rapports qu’elle leur enverrait.
Ainsi fut fondée la colonie de Gil’Ead.
Rapidement, les premières explorations eurent lieu, les drows ne sortant que de nuit, l’éclat du soleil blessant leurs yeux hyper sensibles et prenant garde à ne pas se faire remarquer par les surfacins (nom donné aux habitants de la surface).
Au cours d’une de ses explorations, Nathyrra, partie en solitaire, à son habitude, entendit, provenant du cœur de la clairière, une psalmodie, sombre, rythmée, entêtante, attirante, presque hypnotique. Curieuse, l’elfe s’approcha et découvrit un spectacle étrange. Au cœur d’une clairière, sur un autel en forme de crâne, était sanglée une elfe de la lune, le torse découvert. La surplombait un humain portant une sombre robe d’un rouge si profond qu’il en paraissait noir. Son visage grossier était orné, sur son front, d’un tatouage figurant un crâne entouré de larmes tournant en cercles concentriques. Autour de lui se tenaient en cercle une douzaine d’autres personnes, vêtues à l’identique. Nathyrra comprit qu’ils se tenaient de façon à imiter le symbole tatoué sur le prêtre, l’autel servant de point central.
Nathyrra resta longtemps, immobile, à écouter la psalmodie du prêtre qui semblait ne jamais finir. Son esprit était ailleurs, embrumé par la puissance mystique du cantique. Inconsciemment, les paroles s’implantèrent dans son esprit et elle se mit à murmurer le chant à l’unisson du prêtre, sans s’en apercevoir. Lentement mais inexorablement, elle sentit monter en elle une présence, comme si une autre conscience essayait de toucher la sienne. Cela s’imposa à elle comme une évidence. Elevée comme toute drow, dans la seule connaissance du panthéon elfe noir et de la vénération de Lloth, elle n’avait jamais entendu parler de Bhaal, elle ignorait qui il était, ce qu’il était : le dieu du meurtre et des assassins.
Avant qu’elle comprenne ce qu’elle faisait, elle jaillit de sa cachette, en silence, foulant l’herbe sèche sans émettre le moindre craquement, le moindre bruit. Plus elle avançait, plus l’aura de puissance émanant du prêtre l’écrasait. Pourtant, elle avança, encore et encore, mue par une force supérieure à sa volonté. Les adorateurs n’esquissèrent pas le moindre geste lorsqu’elle pénétra le cercle, traversant le rang pour s’approcher du prêtre et de l’autel. L’ayant remarqué, le prêtre lui indiqua l’elfe attachée sur l’autel sans cesser de chanter. Nathyrra était à présent complètement enveloppée par cette aura, soumise à sa volonté, parfaitement consciente de ce qu’elle devait faire. Son regard plongea dans celui de la fragile créature, y lisant une peur indicible, des larmes roulant sur ses joues, percevant à peine ses hurlements de terreur, ses suppliques entrecoupées de sanglots.
Sans la moindre hésitation, elle dégaina sa dague et la posa sur la poitrine de l’elfe, puis l’enfonça d’un coup sec, les cris et les pleurs cessant aussitôt. Nathyrra vit s’évaporer des lèvres du corps encore chaud un mince filet de brume violette, filant vers le prêtre qui l’absorba. Une infime partie de cette brume se dirigea vers Nathyrra qui sentit une imperceptible chaleur l’envahir. Sans savoir pourquoi, elle comprit désormais que chacun de ses meurtres produirait le même effet et que chaque âme qu’elle arracherait à la vie serait offerte à Bhaal. Une autre évidence s’imposa à elle, comme un coup de marteau, l’emplissant de terreur. Ce n’était pas un prêtre qui se tenait devant elle : c’était l’avatar de Bhaal lui-même. Tombant à genoux, elle murmura instinctivement : « du sang, pour le trône de sang. »
Avec un sourire mauvais, l’avatar l’invita à se relever puis, d’un geste impérieux, la congédia, sans lui adresser la parole. Tête basse, l’assassin tourna les talons et s’éloigna de celui qui était désormais, elle le savait, sa divinité tutélaire, le modèle qu’elle s’efforcerait d’atteindre.
A compter de ce jour, Nathyrra reçut l’instruction des adorateurs de Bhaal, s’éclipsant de Gil’Ead chaque fois qu’elle le pouvait. L’instruction fût rapide. Nathyrra étant déjà une tueuse accomplie, l’essentiel de son apprentissage se concentra sur l’histoire locale, tout ce qu’elle avait besoin de savoir pour mener à bien les missions qu’on lui confierait dans cette partie du monde. Ainsi, elle apprit que Bhaal ne cherchait pas à tout prix le meurtre pour le meurtre. Pour qu’un assassin ait du travail, il fallait que la situation géopolitique soit stable. Une guerre ouverte tombait dans le domaine de Tempus, le dieu des batailles. Maintenir l’équilibre des pouvoirs assurait que chaque camp chercherait à prendre l’avantage par des moyens détournés, dont l’assassinat.
Alors que son instruction de la situation géopolitique locale touchait à sa fin, un déchirement se produisit. Bhaal, qui avait disparu, continuant de former ses sbires à travers tout Féérune, abandonnant chacun à son sort une fois l’assassin recruté et formé, venait de mourir, transpercé par Fléau des Dieux, l’épée de Cyric (Fléau des Dieux étant la forme que prit temporairement Mask, dieu des voleurs). Le contrecoup psychique de la mort de leur divinité extermina la plupart des adorateurs de Bhaal. Une chute brutale du taux d’assassinat fut constatée partout en Féérune.
Nathyrra ne vénérait pas Bhaal depuis suffisamment longtemps, ni avec assez d’ardeur, pour être affectée. Du moins était-ce ce qu’elle pensa en constatant la mort des autres adorateurs de Bhaal et non la sienne. La secte qui l’abritait fut réduite de douze à 4 membres. L’un des survivants prit la tête la secte, qu’il baptisa « les Larmes de Sang. » Il prit lui-même le titre de « Crâne Sanglant » et fit de chacun des sectateurs restant, Nathyrra y compris, une « Larme. » Celle-ci sourit en songeant que sa rapière était décidément un signe divin, le rubis taillé en forme de larme du pommeau et la coquille en forme de crâne pouvant parfaitement convenir à sa nouvelle divinité.
Ce que Nathyrra ignorait, c’est que Bhaal avait prévu sa mort et avait semé les graines qui permettraient sa renaissance. En chacun des adorateurs nouvellement formés par ses soins depuis sa chute sur Toril, il avait implanté une infime partie de son essence. L’âme de chacun était souillée par l’essence de Bhaal et, à la mort de chacun d’entre eux, sa souillure partait nourrir le Trône de Bhaal qui, mort après mort, se remplissait inexorablement, attendant avec impatience qu’il ne reste plus qu’un seul enfant de Bhaal pour venir réclamer son Trône et permettre sa renaissance.
Ignorante de ce fait, comme tous les Enfants de Bhaal, Nathyrra n’eut de cesse que de poursuivre la mission que lui fournit Crâne Sanglant : préserver à travers ses meurtres l’équilibre des pouvoirs entre l’Aglarond, Thay et la Rashéménie. Peu de temps après, le Crâne reçut en songe une vision envoyée par Bhaal : il devait permettre sa renaissance en incitant Nathyrra à traquer et éliminer ses autres enfants, sans lui révéler la nature de ses cibles. Si un Enfant de Bhaal devait découvrir la vérité, il fallait que ce soit par lui-même.
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