Encore une aide de jeu de l'excellent Scap !
Citer :
INTERPRÉTER UN PNJ
SPÉCIFICITÉS DU JEU DE RÔLE
Les échanges sont une chose et sont clairement une composante agréable d’une session de jeu. Mais souvent, les interactions débouchent sur des conflits, fussent-ils relativement anodins. Les PJ vont-ils parvenir à convaincre leur interlocuteur ? Vont-ils obtenir l’information ? Vont-ils séduire ce PNJ ? Normalement, ces points sont couverts par le système de jeu. Mais une grosse problématique du jdr est bien entendu que l’on a souvent une opposition entre le système, qui prévoit des compétences sociales (avec plein de règles), et le fait que les règles tacites de l’interprétation reposent sur… la faculté de chacun de bien présenter ses idées et ses arguments. Bref, on est vite coincé entre des chiffres et du roleplay. C’est d’autant plus vrai que les règles décrivent à force de tableaux, combien il faut faire pour convaincre tel type de personnage et s’en faire un copain-de-la-vie-de-toujours. Pour compliquer la chose, comment en sus faire pour prendre en compte les particularités de votre PNJ alors que jusqu’alors, il ne s’agissait que d’aspects purement rp ?
Il convient de rappeler que dans un monde parfait, à l’instar de ce que vous êtes censés faire en interprétant vos PNJ, les joueurs devraient jouer de telle sorte à refléter leurs capacités statistiques. En somme, un barbare avec un très gros score en intimidation et rien du tout en diplomatie devrait faire un roleplay agressif et brutal, là où un magicien spécialiste du sous-entendu et de la lecture des réactions, va manipuler sournoisement ses vis-à-vis. Ce roleplay représenterait en fait le « test » de compétence et, quelque part, le dispenserait. Mais la réalité est différente. Déjà parce que les joueurs ont souvent un objectif lorsqu’ils échangent avec un PNJ, et n’ont donc aucune raison de se tirer une balle dans le pied en agissant de manière évidemment contre-productive (le plus souvent, si par exemple il apparait évident que menacer le roi ne fera guère avancer les choses, vous constaterez que le barbare se taira, tout simplement). Ensuite, cette technique est particulièrement injuste, car si l’on ne demande pas au joueur interprétant le barbare de savoir manier « en vrai » sa hache à deux mains lors des situations de combat, on demande néanmoins aux joueurs de « convaincre » les PNJ sans pouvoir bénéficier des points placés chèrement dans leurs compétences sociales. Sans oublier le fait que sans tests, c’est le maître de jeu qui juge si son PNJ est convaincu par la diatribe d’un joueur, ce qui peut également être source de frustrations.
Plusieurs possibilités s’offrent aux maîtres de jeu. Les premières sont simples et souvent bien connues, d'autres plus exotiques ou rares. Ces dernières sont mises en exergue pour bien les expliciter mais le meilleur système est celui avec lequel vous êtes à l'aise ou vous avez des affinités.
-Stipuler clairement qu’il n’y aura pas de jets sociaux : même si cela ne résout pas le problème stricto-sensu, cela a au moins le mérite de clarifier les choses et d’éviter des dépenses inutiles de points.
Demander aux joueurs de faire leur intervention, puis sanctionner le discours d’un jet de dé, ajusté en fonction de la pertinence des arguments du joueur : méthode palliative, qui prend en compte les valeurs en compétences des joueurs. Encore faut-il que le bonus soit proportionné (le plus souvent, le bonus ou malus est tel qu’au final le test réussi ou rate immanquablement, quel que soit le score du joueur). Cette technique avantage clairement les meilleurs interprètes et ne prend que rarement en compte le « concept » du personnage en lui-même (un excellent discours sera récompensé alors qu’il n’est pas forcément roleplay, dans le sens où le joueur peut ignorer certains traits de caractère, notamment les défauts, de son personnage).
-Jouer toutes les relations sociales comme des combats : autre extrême qui conduit à réduire les interactions à des affrontements sociaux. Les systèmes employés peuvent par ailleurs devenir extrêmement sophistiqués, avec dons, attaques spéciales et tout ce qui peut bien aller. L’avantage immédiat est que n’importe qui peut ainsi jouer un orateur hors-pair, même si socialement parlant, il est incapable de sortir trois mots alignés. L’inconvénient est bien sûr la perte totale d’interprétation, laissant souvent au maître de jeu le soin de résumer les répliques et arguments, à l’instar de ce qu’il fait lorsqu’il gère un combat. Notez cependant que cette méthode, devrait, par simple justice par rapport à un rôle de combattant ou de magicien, être celle employée en jdr (je sens que je vais avoir des commentaires sur cette phrase.
-Jouer à l’inverse : méthode consistant à faire un jet social, puis, en fonction de sa réussite ou de son échec, demander au joueur de faire un discours adapté (donc, réussi ou raté). Reprenons notre parallèle avec le combat. Normalement, le joueur décrit son coup et fait un jet d’attaque. Le maitre de jeu interprète les scores et annonce une résultante (ce qui peut être embêtant, notamment si le joueur annonce un truc de la mort et se plante totalement). En fonctionnant à l’inverse, cela reviendrait à procéder ainsi : le joueur fait son jet d’attaque et le maître de jeu détermine son effet (touche, dommages éventuels). Puis, une fois la résultante quantifiée (chiffrée), au lieu de la qualifier pour la table, il laisse cette tâche au joueur qui aura tout loisir de décrire son attaque en sachant ce qu’elle a donné. En social, cela reviendrait à demander au joueur de balancer une bonne réplique s’il « réussit » et à dire « de la m… » s’il rate. Bon, il faut admettre que ce mécanisme demande beaucoup d’efforts pour être viable tout comme il faut des joueurs d’une maturité suffisante pour bien gérer les résultats.
NOTE
On voit immédiatement qu’il existe une limite, puisqu’il s’agira pour le maître de jeu de statuer sur le rp, que ce soit par son contenu ou la manière dont il est présenté (selon ses propres critères d’appréciation, donc soumis à possible dérive).
Méthode par arguments : un dérivé de la méthode 2. Il s’agit d’autoriser un jet si l’argument est valide, en somme, s’il fait mouche. En fait, conceptuellement, on part du principe qu’un expert en rhétorique lancera des arguments plus puissamment, sur un ton plus juste, qu’un timide mal dégrossi (euh, ici, je parle bien des personnages, pas des joueurs ; en toute logique, un personnage avec 400 en convaincre doit faire plus « mal » en situation qu’un autre avec 3). Du coup, on ne se dispense pas du test de compétence, puisqu’il va déterminer l’effet de l’argument. Mais par contre, c’est le rp qui va déclencher ou non le droit d’obtenir un jet. Si le rp semble convenable pour le maître de jeu, il autorisera un test. Si le rp est mal adapté, pas de jet.
Souvent, ce type de mécanisme est assujetti d’un délai, c'est-à-dire le nombre de tentatives pour décrocher un argument, souvent qualifié de patience. Exemple bateau : le méchant veut tuer les personnages qu’il vient de capturer. Il leur donne à chacun une chance de s’exprimer avant qu’il ne les balance dans un précipice. Ou le roi leur a accordé audience mais veut absolument être présent à la partie de croquet qui se tiendra d’ici un quart d’heure dans ses jardins.
La méthode par estimation : méthode utilisée par un pote qui a trouvé moyen de prendre en considération la problématique et d’y apporter une solution assez efficace. Rien de révolutionnaire, mais il fallait y penser (dit comme ça, c’est pas très sympa ; mais je vous assure, ça marche bien). L’idée est de demander aux joueurs de faire leur rp, comme habituellement. Pendant ce temps, le maître de jeu vérifie le score du personnage dans telle ou telle compétence sociale. En fonction des arguments déployés mais également de la valeur en compétence du PJ, le maître se « laisse » convaincre ou pas. En somme, cela veut dire que si Burt, avec 27 en intimidation, lance un « bouge et t’es mort », cela a plus de chance de fonctionner que si c’est Twitty, avec son pauvre 5. Ou inversement, si Burt avec son 3 en séduction lance un « t’es bonne », il a de fortes chances de se prendre un aller-retour là où Twitty, avec 41, va provoquer une hilarité quant à son trait d’humour particulièrement fin. Pour que cette méthode fonctionne de manière adéquate, il convient de cibler, probablement en s’appuyant sur le système social de votre jdr, les difficultés moyennes des tests. Ainsi, par ce biais, vous pouvez estimer l’effort d’argumentation que devra faire un personnage donné, en vous disant, de manière caricaturale « un argument moisi = jet pourri, argument normal = jet moyen et super-argument = jet max ».
Méthode "en cas de doute" : cette méthode est un mélange de plusieurs techniques, se rapprochant assez de la précédente. On part, comme pour la méthode par estimation, de sa propre représentation des savoir-faire sociaux des personnages - au besoin, par récupération des valeurs associées au moment opportun. Pour un personnage ayant un bon score, ou dans des conditions favorables (par exemple, PJ d'une race donnée en train de négocier avec ceux de sa race), on affecte à la tentative un A priori favorable. La requête aura de grande chances d'aboutir, sauf demande extravagante ou arguments à contre-sens de la personnalité du PNJ. En revanche, pour un personnage ayant un mauvais score, l'A priori sera défavorable, et même si la performance d'acteur est excellente, sanctionnée par un jet de dé. Le jet de dé symbolise ici l'idée que le joueur pousse les capacités ou exigences de son personnage un peu loin. Cela permet de mettre le rôle en premier lieu, et de ne faire jouer les dés qu'en cas de doute du MD sur le succès de l'action, le seuil de doute variant selon les capacités des personnages - et en tout arbitraire, bien entendu.
Méthode empathie : là encore, je n’ai rien inventé et cette méthode correspond plus à des habitudes de maitrise qu’autre chose (non, non, je ne raconte pas l’historique de cette dernière). L’idée est de ne pas faire de tests pour convaincre un PNJ. Mais que les compétences sociales servent à quelque chose tout en continuant à faire du rp. Lors d’une interaction, la question la plus fréquente de joueurs est souvent « est-ce qu’il ment ? ». Lorsque cette question (ou un dérivé) est posée, on oppose les compétences sociales adéquates (renseignements si les joueurs cherchent une information, diplomatie s’ils cherchent à convaincre…). On détermine ainsi une marge de réussite ou d’échec qui se traduira par combien d’informations vont être données aux joueurs. Plus la marge est importante, meilleure sera l’information. Les personnages n’obtiennent que des informations dites primaires. Il s’agit d’éléments ou traits universels qui animent visages ou gestes, trahissant les vraies « intentions » véhiculées par l’interlocuteur et que moi, maître de jeu, ait du mal à retranscrire avec exactitude.
Imaginons que les personnages soient devant un roi. Ils viennent de lui révéler que le baron Morkus est en fait un traitre, servant les intérêts de la nation de Plucsim. Le roi, interprété par le maître de jeu, répond à leur révélation par « Vous portez ici des accusations graves. Êtes-vous sûrs de vos conclusions ? » Les joueurs ne captent pas le calme apparent du roi face à cette gravissime confidence, aussi ils font un test.
• Marge faible : Primaire : en général, les émotions dites primaires sont les suivants : colère, concentration, confusion, contentement, désir, dédain, doute, excitation, empathie, frustration, joie, haine, peur, séduction, surprise, tristesse. Dans le cas où un personnage obtiendrait une information primaire, il apprendrait que le roi est animé par la peur au moment de sa réplique.
• Marge correcte : Primaire avec exclusion : donne une information supplémentaire au personnage, excluant une possibilité d’interprétation. Pour notre exemple, le roi serait animé par la peur, mais pas en rapport à l’adversité que représente Plucsim ou le traître.
• Marge forte : Primaire détaillée : les joueurs reçoivent une information précise du mot ou du geste qui alerte leur interlocuteur. Le roi a manifesté de la peur lorsqu’il a entendu le nom du traître et a regardé à sa droite un bref instant, en doutant.
• Marge très forte : Primaire interprétée : les joueurs ont cette fois-ci une explication précise de leur intuition. Le roi a peur en entendant le nom du traître : il doit détenir des éléments compromettants le roi ou a eu accès à des informations très importantes pour le roi. Habituellement, à sa droite se tient son conseiller (ici absent pour l’entrevue) ou des nobles d’importance.
• Marge outrancière : Analyse totale : l’ultime étape permet au maître de jeu de clarifier, sans l’ombre d’un doute, les gestes de l’objet de leur attention. Le roi a peur du baron car ce dernier a servi d’intermédiaire pour présenter le roi à son actuelle maîtresse, la duchesse de Barry. Il craint que cette dernière soit également une traîtresse.
Bon, encore une fois, l’exemple vaut ce qu’il vaut et reflète assez mal ce que l’on peut faire via cette méthode. Je vais pas défendre outre mesure le truc, rien ne vous empêche de tester à l’occasion.
Évidemment, d’autres méthodes existent pour régler cette dichotomie règles/interprétation.
Les esprits taquins remarqueront que je n’ai pas évoqué la résolution des interactions dans le sens inverse, c'est-à-dire lorsqu’un PNJ tente d’obtenir quelque chose de PJ. Pour moi, même s’il pourrait être fair-play de pousser les joueurs à subir d’éventuelles conséquences de « duels » sociaux, la coercition comportementale ou d’affinité n’en fait pas partie. Je préfère laisser à mes joueurs leur libre-arbitre sur ce point. Je n’ai jamais forcé un joueur à apprécier un bonhomme donné ou à tomber amoureux d’un PNJ. Dans l’absolu, cela n’est pas forcément cohérent avec ce qui a été exposé précédemment, mais, j’assume parfaitement. Donc, non, il n’y aura pas de trucs sur ce point. Mon PNJ reste donc purement et simplement une entité rp et si je dois faire quelque chose avec, ce sera avec mes "talents" d'acteur. D'où l’importance que j’accorde à leur conception.
ASTUCES
La majorité des trucs et astuces des autres AdJ s’appliquent.
GÉNÉRALITÉS
Servez vous des manuels : si la tâche peut sembler d’ampleur, rappelez-vous que beaucoup de scénarii commerciaux mâchent votre travail (normalement, les PNJ y sont développés). Mais également que les manuels décrivant l’univers vous offre une foule de stéréotypes pour camper les quidams classiques, ce qui devrait vous éviter bien des brainstormings. Il ne vous restera alors qu’à chercher ce qui différencie, si besoin et dans la mesure, votre PNJ d’un autre membre de la communauté.
Listes : encore une fois, on ne le dira jamais assez, mais une liste de noms tout fait pour nommer un PNJ à la volée, c’est quand même pratique. Vous pouvez organiser vos listes en « noms du cru », « noms telle race », « noms étrangers »… afin d’avoir un large panel de possibilités. Si vous êtes vraiment désespérés ou si vous recherchez des noms à consonance plus terrienne, vous pouvez toujours chercher à vous procurer (légalement) cet ouvrage : le Gary Gygax's Extraordinary Book of Names. Nombre d’ouvrages comportent également des listings de traits de caractères, de but et autres spécificités. Cela reste une bonne source d’inspiration à condition de respecter des règles de cohérence. Après, vous pouvez pousser le vice jusqu’à faire des listes de statistiques typiques de PNJ aux rôles récurrents (garde, bûcheron, artisan, tavernier…) mais c’est techniquement moins obligatoire pour l'interprétation. On peut pour se faire utiliser un tableau avec colonne, décrivant les différents points que vous souhaitez avoir en référence (carac, niveau, profession, traits de caractère...).
Images : avoir sous le coude des photos, dessins de PNJ est toujours sympathique. Cela permet de fixer les idées des joueurs. Pensez parfois à innover en la matière. Si vos joueurs incarnent des policiers, pourquoi ne pas utiliser une sorte de tableau d’affichage avec des punaises et des connections à l’instar de ce qu’on peut voir dans les séries et films ? Une communauté de mages présentés sous forme d’un grimoire de magie, c’est classe. Bref, soyez créatifs.
DESCRIPTIONS
De l’importance sociale : on s’accorde à dire que l’on remarque souvent plus les personnes de haut statut social que les subalternes. Oui, oui, c’est un peu tiré par les cheveux dit comme cela. Mais bon, si vous êtes face au roi et sa suite, vous risquez d’abord de remarquer le roi. Probablement la reine ensuite et quelques courtisans à la mode. Mais guère plus. Votre description peut donc librement s’attarder sur ces individus remarques et écarter, pour l’heure, le reste des courtisans. L’importance sociale est bien évidemment relative. Mais, même à la cour des miracles, vous allez probablement bien focaliser sur leur chef, aussi pouilleux et estropié soit-il.
De l’importance des armes : il est également assez commun de se rappeler qu’on mémorise assez bien les personnes armées –instinct de conservation oblige. Dans une pièce, avec le roi et son connétable, vous allez, sans difficulté, remarquer la présence silencieuse du capitaine des assassins pourpres –les soldats du roi– qui se tient à côté de la porte, main posée sur son épée draineuse de vie. De fait, n’oubliez jamais de préciser ce genre de détails à vos joueurs (à moins que le capitaine des assassins pourpres soit invisible, on s’entend).
Décrire un personnage en trois mots : souvent peu usité par les maîtres de jeu, elle est assez efficace lorsque les PNJ sont nombreux ou pour des scènes nécessitant un certain dynamisme –qui souffrirait, de fait, d’une longue pause descriptive sur chaque PNJ. Il s’agit de résumer un personnage à quelques mots.
Exemples : deux piliers de bar se lèvent à votre remarque. Un soulographe ventripotent, tenant à peine debout et son acolyte, au facies porcin. Le comte von Brunner s’approche de votre troupe, accompagné de son serviteur, un type efféminé aux relents écœurants de parfum bon marché. Avec un port altier, la reine fait quelques pas vers les personnages en affichant un sourire carnassier. Derrière elle, sa servante aux formes généreuse, dégage un magnétisme animal indéniable.
De plus, ces descriptions peuvent permettre de fournir au maître de jeu des surnoms bon marché sans grand effort, comme Gras-du-bide, Nez crochu et le Balafré, idéal pour les situations de combat. Attention toutefois à ne pas trop introduire de référence hors-jeu dans ce type de petits noms affectueux, car appeler un PNJ « Rocco » ou encore « Sarko » risque de créer quelques dissipations.
CONCEPTUALISER
Combien de traits de personnalité pour un PNJ ? : en fait, il n’y a pas de règles précises. J’ai tendance à dire qu’il vaut mieux un caractère unique bien joué qu’un ensemble de traits qui s’accordent mal ensemble ou que vous ne saurez pas interpréter.
Nature et attitude d’un PNJ : emprunté à la vieille édition de Vampire, cette dichotomie a le mérite de permettre de gérer ce que le personnage dégage, montre, de ce qu’il est réellement. On peut être « Sympathique » mais en fait « Totalement amoral » ou « Fier » d’apparence mais « Juste » dans ses décisions. Rien n’empêche cependant d’avoir une attitude et nature identique. Une magicienne pourrait être, par exemple, uniquement « arbitraire ». User de cette méthode est plus réaliste mais nécessite plus d'expérience.
PNJ humanoïdes : il arrivera plus souvent qu’on ne le croit que vos PNJ appartiennent à une race non humaine. Se mettre dans la peau de quelque chose qui n’existe pas est délicat. Néanmoins, dans la logique, ce type de PNJ doit avoir autre chose qu’une différence d’apparence pour les qualifier. Un elfe ne se résume pas à un humanoïde avec des oreilles pointues qui aime la nature. Dans l’idéal, votre manuel offrira une description assez étayée des différences de comportements, traditions, caractères que l’on rencontre chez ces peuplades. Il conviendra donc d’intégrer ces éléments pour obtenir un protagoniste crédible (bref, autre chose qu’un humain avec des oreilles pointues et un nom en « il »).
PNJ étrangers : bien souvent, l’univers de jeu dispose d’un riche panel de langues. Une des difficultés repose sur l’échange d’informations avec des étrangers, dont la langue natale n’a peut-être rien en commun avec ceux des personnages. En admettant que l’étranger ou les personnages disposent d’une base commune, vous pouvez introduire des expressions typiques, des traductions littérales et autres errements de langage. Leur nombre variera en fonction de l’éducation relative de chacun (un expert en langue devrait avoir juste un accent typique là où un quidam baragouinera des mots simples). Par exemple, au lieu de dire « hache », un PNJ pourrait utiliser le mot Skenchel. Ou dire « j’ai suivi le chemin qui ne tourne jamais jusqu’à la montagne-grotte » (comprendre : j’ai suivi la route toute droite jusqu’à la ville ; oui, j’admets, c’est tout pourri comme exemple).
PNJ inhumains : l’avantage avec les animaux plus ou moins fabuleux, c’est que le plus souvent, ils ne parlent pas. Du coup, on se dit que la psychologie est à mettre au panier. Pour autant, même un animal possède un comportement spécifique qu’il convient d’interpréter. Les loups, par exemple, ont une organisation en meute, avec un alpha à leur tête. Ils s’attaquent généralement à une proie blessée, faible et usent souvent de tactique d’harcèlement. Un puma va, quant à lui, tuer sa proie et la manger dans une zone abritée. Bref, avec des PNJ inhumains, il convient de rester attentif au comportement.
PNJ super intelligent : grosse difficulté que celle-ci. Vous devez interpréter un PNJ dont le cerveau fonctionne beaucoup mieux ou beaucoup plus vite que vous. Comment rendre cet état de fait en jeu ? C’est un parti pris, mais dans ce cas de figure, je considère personnellement que le PNJ est quasi omniscient. C'est-à-dire qu’il possède une vue d’ensemble totale sur ses champs d’expertise, équivalente, pour comparer, à celle du maître de jeu qui connait les tenants et aboutissants de son scénario (enfin, normalement). Outre comprendre tous les sous-entendus, il est capable d’appréhender instantanément les implications possibles de chaque décision (ce qui par ailleurs peut le pousser dans un certain immobilisme). S’il est en plus doué d’une bonne forme d’empathie, il peut anticiper les réactions. Au pire, si vous n’avez pas d’autres possibilités, dire qu’il a les bouquins de règles sous les yeux et qu’il peut faire des calculs de dingue en se basant sur les facultés décrites dans votre système.
QUANTIFIER
Niveau des PNJ : quel que soit le système, j’ai recours à un raccourci pour quantifier les PNJ. Je fixe arbitrairement, en fonction de ma vision du quidam, le niveau de « puissance » du PNJ. J’en retiens quatre : plus faible que les PJ (-), de même niveau (=), plus fort (+) et outrageusement fort (++). En somme, ce niveau très théorique me permet de visualiser succinctement ce que le PNJ est capable de faire par rapport à mes PJ. Si j’ai besoin, je quantifie ce niveau d’adversité en statistiques rapides. Par exemple, un niveau de puissance faible pourrait dire dans ma tête : score des PJ – 5, un niveau outrageusement fort Score des PJ + 10 (ici à décliner selon le système). Bien sûr, dans de nombreux cas, cette échelle est absolue inutile. Par exemple, quel est le niveau de puissance d’un roi ? Au combat, sans ses gardes, probablement inférieur à celui d’aventuriers entrainés. Mais en termes de ressources, il peut devenir une sacrée nuisance. Dans ces cas de figures, toujours selon mon échelle virtuelle, je sépare les capacités en plusieurs sous-parties, à savoir :
• Alliés : Personnes mobilisables par le PNJ.
• Ressources : Argent et biens à disposition.
• Combat : Degré d’adversité en combat.
• Magie : Degré de maîtrise des arts mystiques, si cela existe.
• Social : Degré de maitrise de la rhétorique et de l’intrigue.
Mon roi pourrait ainsi devenir A : ++ ; R : ++ ; C : - ; M : - ; S : =.
J’expose ce système non pas pour dire qu’il est « extraordinaire » mais il est assez simple à manipuler pour éviter des calculs/préparations longues et fastidieuses. Il a également un autre intérêt : il permet de réutiliser des statistiques génériques pour tout un ensemble de jeux.
Appréciation : quel que soit le système de jeu, je retiens une échelle comme suit : Allié / Amical / Favorable / Indifférent / Méfiant / Rival / Ennemi. C’est d’ailleurs plus un positionnement intellectuel qu’autre chose, mais rien n’empêche de tenir une comptabilité précise, notamment dans le cas de scénario centré sur des complots. Les termes parlent d’eux-mêmes mais je vais les expliciter par souci de clarté.
• Allié = amant ou meilleur ami. Prêt à sacrifier sa vie pour le personnage.
• Amical = ami. Son opinion et son jugement compte. Prêt à se mettre dans l’embarras pour le personnage.
• Favorable = connaissance qu’on apprécie sans bien la connaître. Prêt à rendre quelques menus services si cela n’expose pas à des représailles évidentes.
• Indifférent = aucun idée préconçue ou claire. Tout service exigera un échange de réciprocité.
• Méfiant = on n’apprécie pas le personnage. Un service sera rendu en échange d’une réciprocité plus importante (en gros, il faut que cela rapporte plus que cela ne coûte).
• Rival = clairement, on fait tout pour gêner le personnage. Aucun service rendu, à moins que cela soit un moyen de provoquer chantage ou embarras ultérieur.
• Ennemi = on fait tout pour liquider le personnage. La dévotion à la tâche dépend cependant de la haine portée.
Dans cette optique, il est également évident qu’il sera plus facile d’obtenir un service contre quelqu’un de non apprécié ou inversement plus dur de mobiliser un camarade contre quelqu’un qu’il affectionne. En somme, si le Duc de Rochefort est rival d’un PJ et que quelqu’un lui propose un plan pour le discréditer, le Duc sera très enclin à participer. Inversement si la proposition est faite au meilleur ami d’un PJ, le PNJ risque de refuser (ou d’accepter et de vendre la mèche). L’appréciation initiale oscille entre favorable et méfiante (j’utilise ici un jet adéquat, typiquement un truc genre diplomatie). Si le personnage possède des points communs avec mon PNJ, je l’augmente d’un cran ou deux crans vers le « sympa » (par exemple, un PJ militaire aura des affinités avec d’autres militaires, s’ils ne sont pas de camps opposés, bien entendu). Par la suite, ce sont les actions des joueurs qui changeront la donne. Rendre service de manière altruiste (=gratuit) ou servir les desseins du PNJ augmente l’appréciation. Et inversement. Allié n’est accessible que si les personnages ont mis leur vie en jeu pour sauver les miches, la position ou la famille du PNJ. Bien sûr, ce n’est pas systématique (un PNJ peut être ingrat) mais l’idée est là. Ennemi arrive lorsque les joueurs gênent les PNJ ou qu’ils s’en prennent à leurs biens, situation ou proches.
INTERPRÉTER
Effets spéciaux : interpréter un PNJ offre de multiples possibilités de mettre en avant ses talents de maîtrise. On peut décliner plusieurs types. On a tendance à dire que les premiers sont simples à mettre en place, mais cela dépend de chacun (on a tous des facilités différentes).
• La voix : changer sa voix pour qu’elle corresponde à celle du PNJ. Généralement limitée à « grave aiguë », mais également des accents ou des débits différents.
• Les tics de langage : expressions figées ou imagées employées régulièrement par le PNJ. Voire problèmes d’élocutions (zozotement, bégaiement…)
• La gestuelle : usage du corps pour mettre en avant une physionomie, une manière de se déplacer, de parler, de se tenir.
• Les grimaces : déformer son visage pour refléter des traits physiques.
• Déguisements : postiches ou accessoires (lunettes, chapeau) pour personnifier un PNJ. Facilite surtout l'immersion.
Chaque technique peut être employée individuellement. Il convient de noter que ce type d’effet nécessite souvent entrainement préalable (pour ne pas paraitre ridicule) et qu’ils se sont que des « plus » et non des « passages obligés ». Il est préférable de ne rien faire que d’utiliser une technique mal employée. Notez également que les effets spéciaux doivent se conserver sur la durée de la séance (on en reparlera à 4h00 du matin) et entre les séances. Il serait donc dommage de faire quelque chose si vous ne pouvez pas le reproduire.
Réactions initiales : ne pas sous-jouer les réactions classiques d’une communauté. Un village sur une route commerciale ne sera pas gêné autre mesure par la présence d’étrangers. Mais une communauté éloignée pourrait être plus méfiante envers une bande armée ou assez agressive, sauf si elle est en prise à du brigandage... Des personnages armés pourraient rapidement rencontrer les autorités, qui pourraient leur indiquer les règles et coutumes locales voire leur demander de véhiculer dans la cité désarmés. Bien sûr, dans des univers magiques où un type peut vous faire tomber sur la tronche un météorite géant, les réactions seront plus mesurées, mais qui peuvent parfaitement justifier des comportements prudents à l’égard d’étrangers aux capacités et agissements non connus. Le parallèle est valable pour des organisations (une guilde, par exemple), vis-à-vis de non-membres venant les questionner ou requérant des services.
Planning : l'une des difficultés majeures de certains scénario sera de suivre les actions de vos PNJ. Souvent ce travail sera fait par le scénariste, afin de faciliter la prise en main des maîtres de jeu. Mais rien n'empêche que vous procédiez de la même façon pour vos propres créations. Lister les actions des PNJ principaux, sous forme d'un tableau, permet de simplifier la gestion globale d'une séance. Par exemple, si votre trame vous conduit à mener un bal costumé, vous n'aurez qu'à indiquer dans un premier temps, qui vient, à quelle heure, avec quel costume. Puis ce que chacun va faire lors du bal (danse de 21 à 22h, s'isole avec untel pour parler affaire de 22 à 23h, s'éclipse à minuit pour cambrioler le bureau...). Ce planning peut également être réactif c'est à dire prendre en compte des notions de "si les joueurs font ça, alors...".
PNJ Multiples : très grosse difficulté. Il s’agit de gérer simultanément plusieurs PNJ. L’exemple typique est la taverne, où les interactions peuvent fuser avec plusieurs personnages en même temps ou le bal avec pléthore d’individus. L’idéal est de séquencer, c'est-à-dire d’utiliser vos PNJ par vagues successives. Par exemple, d’abord ils sont abordés par untel, puis par truc. Mais ce n’est pas toujours possible, notamment lorsque vous vous retrouvez avec des scénarii commerciaux qui ont la fâcheuse tendance à ne pas se soucier de ce genre de difficultés. Il faudra donc faire avec et tenter de limiter la casse, car l’exercice est ardu. En premier lieu, cherchez à bien différencier votre voix ou votre ton. Cela facilite la lisibilité de vos interventions et évite de devoir répéter « machin dit alors ». En second lieu, orienter votre corps pour camper la position relative de vos PNJ. Si par exemple la comtesse du Barry et le prince de Moldav discutent avec vos joueurs, en vous plaçant de profil droit (avec votre voix de sansonnet) vous serez la comtesse, puis en vous plaçant de profil gauche, avec votre accent russe, le prince. N’hésitez pas à intervenir en nommant le PNJ a qui vous répondez, style « Tout à fait madame la Comtesse, je n’aurais pas dit mieux… » qui ne laisse guère de doute sur l’origine de cette réplique (et toujours plus élégant qu’un « le prince dit alors »).
Enfin, il reste une dernière technique, qui peut être mise en place par ailleurs dans de nombreux autres cas (et sans grande préparation) : filez les PNJ à vos joueurs. En somme, vous avez besoin d’aide pour gérer des scènes où le nombre de PNJ est important, préparez une petite fiche explicative avec description, caractère et objectif et demandez à l’un de vos joueurs de s’y coller. Cela fonctionne souvent mieux qu’on ne le croit.
Bonne approche ? : flatter plutôt que d’intimider. Menacer plutôt que convaincre. Les gens ne réagissent pas également aux sollicitations sociales. Une possibilité pour différencier les PNJ est de créer une table de réaction spécifique à certains stimuli, voire, si vous êtes un sociopathe de la préparation, à certains arguments. Par exemple, vos PNJ peuvent recevoir une liste comme suit, assortie de difficultés relatives :
• Flatterie : facile
• Intimidation physique : facile
• Intimidation psychologique : moyen
• Séduction : très difficile
• Arguments : impossible
PNJ affables : il est souvent tentant, lorsqu’on a bien travaillé ses PNJ, de vouloir livrer leur histoire, leurs inclinaisons et leurs ambitions dès que l’occasion se présente. C’est plutôt à éviter. En effet, dans l’absolu, une personne que vous venez de rencontrer, sauf à être particulièrement alcoolisée, n’aura pas tendance à s’étendre sur son passé, ses parents, son éducation, à moins qu’on la questionne directement (et que la question ne soit pas indiscrète). Soyez donc pudiques sur ce point. D’autant plus que vous pouvez, par petites touches successives, dévoiler la complexité de votre énergumène. L’exemple typique est le PNJ vexé par une réflexion pourtant amusante d’un autre personnage, sans que l’on comprenne vraiment pourquoi. Mais voilà, votre PNJ a souffert de moqueries similaires, est complexé par sa petite taille ou a vécu une expérience traumatisante qui explique une réaction épidermique. Un bon moyen d’intéresser vos joueurs sur qui ils fréquentent et de les inciter à ménager leur susceptibilité.
Dilemme : si cela vous parait délicat de trancher sur la réaction d'un PNJ, utilisez l’arme ultime du maître de jeu pour prendre votre décision : un jet de dé qui, non seulement vous permettra de réfléchir mais également pourra vous influencer (style haut = réussi, bas = raté).