Yàvië passa devant l'arbre où habitait Cyroen. Elle actionna une des cordelettes qui faisaient tinter des clochettes au plus haut de l'arbre et la figure sympathique de l'elfe apparût. Elle était chez elle. Elle disparut quelques secondes puis réapparut précipitamment, se jetant littéralement dans les airs, accrochée à une corde qui descendait jusqu'en bas et touchant terre en quelques secondes à peine, aussi légèrement qu'une plume.
Tout sourire, elle dit :
« Mon amie, alors racontes-moi tout, comment cela s'est-il passé avec Faragoll ? Tu es déjà de retour ? »
Et elle fronça les sourcils.

Tout sourire, Yávië répondit « Waow !!! »
« Avec Faragoll tout se passe très bien ! »
« Mes protégés s'intègrent à la meute, j'appréhende mieux leur apprentissage.
Sauf que ... »
Yávië eut alors une petite moue embarrassée.
« Faragoll m'a renvoyée au village « pour me trouver de quoi m'équiper ».
On part à la chasse, « pour au moins un mois » a-t-il dit
et il je reste avec lui certainement pour six mois.
Et c'est vrai que je n'ai que ces vêtements-ci avec cette dague pour tout équipement. »
Sa moue devient encore plus craquante
« En fait, le pire, c'est que je ne sais même pas « quoi » demander, ni « à qui » ...
Avant notre exode, je vivais en ville. La pleine nature ... je découvre ! »

Cyroen était ravie d'apprendre que tout se passait bien pour Yàvië même si cela ne l'étonnait guère. Elle tenait Faragoll en haute estime.
« Il te faudrait des tenues de rechange, je suppose ? Faragoll ne t'a-t-il donc pas conseillé là-dessus ? Si tu n'as que cette dague, nous te trouverons certainement une arme plus appropriée. Faragoll ne doit rien posséder que tu puisses aisément manier. Vous n'avez pas vraiment le même gabarit ! »

« Merci Cyroen ! » s'exclama Yávië
« Oui, des tenues de rechange, une arme plus appropriée,
Et quoi que ce soit d'autre que tu puisses me conseiller. » s'excusa-t-elle
« Il est vrai que je n'ai pas le gabarit de Faragoll ... »

Puis, étourdie par l'expectative de cette expédition, Yávië s'en remit aux bons soins de son amie.

Cyroen songea :
« Non je ne vois rien de plus, si ce n'est un sac de voyage. Je t'en trouverai un. »

Cyroen amena Yàvië dans l'arbre le plus grand du village et qui avait une position centrale. Un escalier en colimaçon, constitué de planches fixées à des cordages, permettait d'accéder aux plateformes qui le ceignait. De nombreux elfes étaient présent, certains jouaient de la poésie, d'autres mangeaient. Tout le monde salua Yàvië d'un signe de tête ou d'un sourire. Dans une grand pièce de l'autre côté du tronc se trouvaient de nombreuses armoires. Cyroen fit essayer plusieurs tenues à Yàvië qui en sélectionna trois particulièrement discrètes qui lui conseilla son amie. Dans autre pièce, elle prit un sac à dos de voyage, parmi les nombreux qui étaient entreposés là.
Puis elle repartirent en direction de l'extrémité est du village, quittèrent les abords de la forêt pour arriver à une hutte, bordée d'une grotte creusée dans un énorme rocher calcaire. Des bruits de marteaux se faisaient entendre et un elfe massif était à l’œuvre à l'intérieur. Cyroen dit à Yàvië de l'attendre. Elle s'entretint brièvement avec le forgeron qui fit un signe de tête, puis elle ressortit avec la clef de la hutte dans laquelle elle entra pour en ressortir avec une épée courte de belle facture, qu'elle tendit à la jeune fille.

« Voilà pour toi ! Garde quand même ta dague, elle te servira toujours notamment pour tes repas. J'espère que cette épée te portera chance. »
Yàvië posa les yeux sur l'arme, la lame était fine et légèrement recourbée, parfaitement tranchante. Son pommeau portait des inscriptions elfiques et la garde était ornée d'étoiles et de feuilles dorées.

(en sindarin) « Alu arumuamuat metaudas'sunial nospssa
ax et ibant vin le etent onamo mipe » murmura Yávië les yeux embrumés d'émotions en contemplant ses cadeaux.
« Serait-il possible d'avoir aussi un ... arc ? » demanda-t-elle poliment.
« J'apprécie de mettre de la distance entre moi et le danger. »

Ravie que Yàvië utilise sa langue maternelle, Cyroen sourit :
« La bénédiction vaut pour toi comme pour moi, mon amie. »

« Malheureusement non, je n'ai pas d'arc à te donner, pour la simple et bonne raison que nous avons pour coutume de le concevoir chacun, nous-même, en choisissant en fonction de nos affinités respectives, le bois qui le compose. Peut-être que Faragoll t'apprendras, sur le chemin, et te guideras dans ton choix. »

Ravie de ses cadeaux, Yávië prit quelques temps avec son amie à en faire le tour et en apprendre l'utilisation.
Puis elles prirent ensemble quelques temps à profiter de leurs compagnies respectives en papotant gaiment.
Enfin, arguant de ses devoirs envers les petites panthères - surtout les frères de Keena qui ne les avaient pas accompagnées- Yávië reprit, en sautillant d'allegresse, le chemin de la cabane de Faragoll.

Yàvië retourna à la maison de Faragoll à la mi-journée. Elle était vide, même les trois petits n'étaient plus là. Mais au bout d'une heure environ, la meute refit son apparition avec les trois nouveaux adoptés. La jeune fille ne manqua pas de constater que leurs babines étaient rougeâtre.
Faragoll salua la Numenorénne :
« Te revoilà. On dirait bien que nous avons des petits chasseurs en herbe. J'ai maintenant compris l'attitude de Luan hier soir. Je pense qu'elle les a amené chasser. Elle ne voulait pas qu'ils s'habituent à être nourri. Et cela a l'air de bien fonctionné. Nous allons suivre son instinct, et ne nourriront pas la panthères. Elle devront se débrouiller d'elle-même. Ils ont réussit à attraper deux mulots. Au début, j'ai pensé qu'il jouait, mais il n'en était rien. Moitié joueurs, moitié chasseurs. Voilà qui devrait te rassurer. Alors dis-moi, as-tu trouver ce qu'il te fallait au village ? »

« Je pense ....
dites-moi s'il manque quelque chose ... » répondit la jeune fille en déballant l'ensemble des affaires récoltées et en les étalant soigneusement autour du sac qui les contenait.
« Cyroen m'a dit que vous me montreriez pour faire un arc » ajouta-t-elle en déballant l'épée
« je suis plus à l'aise à distance ... »

Faragoll sourit, il observa tous les objets que la jeune fille avait étalé et compléta :
« Je vais remplir votre gourde d'eau et je crois que cela suffira. » dit-il en riant.
« Je rajouterai une petite hache, afin de m'aider à dépecer les proies. Elle vous sera aussi très utile si nous venions à nous séparer.
En ce qui concerne l'arc... » il prit un air songeur :
« Pourquoi pas. Mais il faut que j'apprenne à mieux vous connaître. Mais nous aurons certainement du temps pour cela. Il faudra d'abord vous entrainer sur des objets plus simples d'abord. Ne vous inquiétez pas, je ferai en sorte que vous n'en éprouviez pas le besoin avant longtemps. Je ne voudrais pas risquer que vous blessiez un de nos compagnons à quatre pattes !
Je vois que vous avez également une de nos cordes. C'est un cadeau précieux que vous apprécierez à sa juste valeur, le jour où vous l'utiliserez. Elle ne pèse presque rien et est fort utile. »


« Nous partons cet après-midi, finalement. Des nouvelles pressantes m'ont fait changer mes plans. Nous prendrons la direction du Nord Est, en commençant pas suivre le fleuve Lhûn sur la rive qui n'appartient pas au royaume Noldor. Allons préparer notre dernier repas attablé avant longtemps. »

(en sindarin) « Ni sipami dinopan ancic mis qu ea ves » déclara Yávië
(en sindarin) « Antibul fetuor mmnoni erapulabus seglt gntind ve »

« Ce sera plutôt un travail de concert. »

Ce dernier repas dans la maison de Faragoll eut à nouveau lieu sous un concert de protestation de la part de Keena. Yàvië se régala des mets préparés avec le chasseur, elle se doutait qu'un tel régime ne serait plus de mise avant un long moment.

L'étrange compagnie prit donc les chemins du Harlindon en direction des collines de l'Emyn Beraid, l'endroit où le roi Gil-Galad avait fait la promesse d'élever trois tours en l'honneur de l'arrivée des Edain rescapés de Numenor. Faragoll connaissait les moindre recoin de ce territoire et nombre des personnes qui croisaient leur route. Tous les elfes rendaient hommages à Luan lorsqu'ils croisaient la route du chasseur. La chienne était majestueuse et son attitude était peu commune. Elle guidait le reste de la meute qui s'éloignait fréquemment de Faragoll avec une grande liberté. Il passait parfois plusieurs heures sans que les chiens ne croisent leur chemin. Les panthères commençait à prendre les mêmes habitudes, mais elles n'osaient s'éloigner trop de la compagnie des humains, en particulier Keena, qui ne supportait guère longtemps de rester en dehors de la vue de Yàvië. Les bivouacs étaient constitués des proies que Faragoll chassait, accompagnées des galettes et fruits secs qu'ils avaient emportés dans leur sac de voyage. Faragoll s'approvisionnait régulièrement dans les villages qui croisaient leur route. Les jours défilaient dans une douceur que la jeune fille avait rarement connus. Certes, les marches étaient fatigantes, mais le Lindon était un pays somptueux et les elfes constituait une compagnie très agréable. Rare étaient les soirs où ils se retrouvaient seuls et les soirées rimaient souvent avec chants, poésie et découvertes de mets dont la jeune Numenorénne ne soupçonnait pas l'existence.
Les jeux des panthères se faisaient plus agressifs. Faragoll dût retenir plusieurs fois Yàvië d'intervenir alors qu'elle pensait que la fratrie finirait par se blesser sérieusement. Il encourageait leur attitude de chasseur et Yàvië en fit de même. Luan se préoccupait toujours de les empêcher de toucher aux proies chassées par la meute. Les petits devaient chasser par eux-même ou bien se contenter du lait que Yàvië tirait de la chèvre.

Après trois jours de marche, le groupe contourna la ville de Harlond dont Yàvië put apprécier les hautes tours qui se dessinaient à pic sur les falaises. Elle aurait beaucoup aimé visité la cité néanmoins Faragoll ne le permit pas, arguant que cela lui ferait perdre trop de temps. Une semaine plus tard, il étaient sur les collines de l'Emyn Beraid, emplies de fleurs et enivrés des fragrances de garrigues sous le soleil estival. La marche fut plus ardue parmi les reliefs et Yàvië, peu habitué à ces efforts continuels, accusa le coup. Faragoll n'en ralentit pas moins l'allure et deux jours plus tard, ils avaient rejoint la route de l'Est, sur laquelle ils ne s'attardèrent point. Ils coupèrent par les hauts reculés, moins élevé que l'Emyn Beraid, qui les bordait à l'ouest et dont les reliefs plongeait la vallée forestière qui les séparait dans l'ombre quand le jour déclinait. Les rencontres se faisaient plus rares. A la pointe nord de la dernière colline, alors qu'ils avaient établi leur camp pour la nuit, Faragoll annonça :
« Demain nous quitterons la sécurité du royaume du Lindon. Je ferais en sorte que la meute ne s'éloigne plus autant de notre position, même s'ils le feront instinctivement, par instinct de protection à notre égard. En cas de danger, mets toi à l'abri et laisse nous nous charger de résoudre la situation. Ton rôle est de protéger les petits, jusqu'à ce qu'il soit en mesure de se défendre eux-mêmes. Ne panique pas et si tu devais en arriver à combattre... montre-moi donc de quel bois les femmes de Numenor sont constituées. » dit-il en souriant.

« En parlant de bois, où en es-tu de la sphère que tu as commencé à notre départ ? »

Faragoll prit l'objet de couleur blanche, tirant vers le rose, que lui avait tendu Yávië, sans un mot.
Il l'observa avec attention et en caressa la surface rugueuse.
« Oh, il semble que vous ayez été inspirée. C'est certainement une belle réussite pour un premier travail du bois, à moins que vous n'en soyez pas à votre premier essai ? Le bois que vous avez utilisé est du tilleul. C'est de tous les arbres celui qui produit le bois le plus facile à sculpter et il est donc idéal pour les débutants. Il se travaille facilement, comme vous aurez pu le constater, car il est tendre. En revanche il ne résiste pas assez pour les travaux de la plus grande finesse. »

Faragoll rendit son œuvre à la jeune fille :
« Demain, si je trouve un morceau de bois approprié, vous tenterez de reproduire la broche qui tient les deux pans de votre cape.
Autre chose... Vous ne m'avez point questionner sur notre destination ni sur les objectifs de notre périple. Cela me surprend. Je vous imaginais plus curieuse. »

« J'aime bien vous suivre en découvrant le paysage. » répondit la jeune fille
« Vous m'aviez dit que nous prendrions la direction du Nord Est, en commençant par suivre le fleuve Lhûn sur la rive qui n'appartient pas au royaume Noldor.
Mais si vous avez une destination, ou un objectif, je serais ravie de l'apprendre ... »